Méfiez-vous du Belge !
Le 21 mai 2018
Essayer de nous faire croire que toutes ses saynètes s’emboîtent dans un scénario cohérent n’est certainement pas le canular le plus élaboré de François Damiens. Ses impostures restent des vignettes amusantes : alors pourquoi ne pas se faire piéger pour en profiter ?
- Réalisateur : François Damiens
- Acteurs : François Damiens, Tatiana Rojo, Matteo Salamone
- Genre : Comédie
- Nationalité : Français, Belge
- Distributeur : Universal - StudioCanal
- Durée : 1h27mn
- Date télé : 16 août 2024 20:50
- Chaîne : Game One
- Date de sortie : 30 mai 2018
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Résumé : Dany Versavel a un souci avec son fils : à quinze ans, Sullivan ne veut plus d’un père qui fait le king derrière les barreaux. Pour Dany, son « ket » , c’est sa vie, hors de question de le laisser filer. Il décide donc de s’évader de prison prématurément ! Entre cavales, magouilles et petits bonheurs, il a tant de choses à lui enseigner. Un apprentissage à son image. Au pied de biche, sans pudeur ni retenue. Mais là où l’on pouvait craindre le pire, se cache peut être le meilleur…
Critique : Avant de rigoler, soyons un peu théoriques. La condition sine qua non à la qualité objective de tout film de fiction a toujours été ce que l’on appelle sa potentielle absorption diégétique. Comprenez, sa capacité à faire croire à son public qu’il raconte une histoire. Un seul sous-genre, que l’on a vu apparaître assez récemment, n’a pas, par nature, à s’embêter avec cette contrainte, il s’agit de la succession de sketchs : on a plus ou moins récemment pu voir passer Jackass – le film et ses suites, ou, en France, N’importe qui. Mais peut-on concrètement les qualifier de « films » ou de simples « version étirée de programme télévisés » ? À cette question presque philosophique, un homme est venu rendre une réponse pertinente : c’était le Britannique Sacha Baron Cohen avec ses films Borat et The Dictator qui, eux, se bâtissaient sur de véritables dramaturgies mais dont certaines scènes étaient rendues particulièrement drôles grâce à des caméras cachées qui captaient les réactions de témoins aux performances de l’humoriste-transformiste.
- Copyright StudioCanal
Ce schéma semble être devenu un modèle pour tous ceux qui veulent convertir leur format court en long. C’est par exemple ce qu’avait fait Camille Cottin en 2014 pour que sa vignette télévisuelle Connasse devienne un film. Aujourd’hui, c’est donc au tour du Belge François Damiens de marcher sur ces pas. En guise de premier film, il nous propose ainsi de lier des impostures en caméra cachée –dans la parfaite continuité de ceux qui le firent connaître à la télévision– par une histoire, celle d’un homme qui s’évade de prison pour retrouver son fils. La spécificité du résultat est justement que pour l’apprécier, il n’est absolument pas nécessaire d’y rechercher une intrigue ou une tension dramatique. À la différence de ce qu’avait tenté Cottin, le scénario rabougri que propose Damiens ne sert finalement qu’à justifier les impostures et à les compiler l’une après l’autre. Au diable l’absorption diégétique et l’émotion qu’elle devrait susciter, seul importe l’humour. Et quand bien même on retomberait dans la succession de sketchs que l’on est réticent à qualifier de « films », et que François Damiens assume un mauvais goût qui n’est pas ce que l’on préfère de lui, la plupart de ses scènes réussissent à faire rire, alors autant essayer d’en profiter.
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Pour chacune d’entre elles, il y a au moins trois angles de prise de vue, donc il est impossible de ne pas se demander constamment comment les caméras ont pu être dissimulées. De la même manière, se pose la question du nombre de fois où Damiens a dû renouveler ses mystifications avant de capter un quidam qui joue le jeu et dont les réactions puissent être intégrées au film. Parmi celles-ci, on a par exemple du mal à croire que Damiens soit tombé du premier coup sur cet ex-taulard qui se confie à lui dans la salle d’attente d’un hôpital. C’est en fin de compte une nouvelle forme d’absorption qui est sollicitée. Non pas celle qui devrait nous faire croire à la relation père-fils sur laquelle se bâtit la dramaturgie de l’ensemble, mais celle qui voudrait nous faire croire au dispositif de chaque scène, individuellement. Alors, cessons de nous prendre la tête, acceptons aveuglement l’honnêteté de ces impostures et rigolons de ces pauvres gens, de leur malaise ou de leurs réactions excessives, qui se sont fait avoir avant d’accepter d’apparaître dans le film. Car il faut le préciser, ce n’est jamais Damiens lui-même qui est drôle. Pas facile de l’admettre, mais après tout la moquerie d’autrui est une valeur plus sûre que tous les fondements du septième art, et ça François Damiens l’a bien compris.
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