Le 7 décembre 2016
L’un des chefs-d’oeuvre du cinéma philippin. Une implacable immersion dans les bas-fonds de Manille, à travers l’itinéraire d’un jeune homme désoeuvré.
- Réalisateur : Lino Brocka
- Acteurs : Hilda Koronel, Rafael Roco, Jr
- Genre : Drame
- Nationalité : Philippin
- Durée : 2h01mn
- Reprise: 7 décembre 2016
- Titre original : Maynila: Sa mga kuko ng liwanag
- Date de sortie : 28 avril 1982
- Festival : Cannes Classics 2013
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– Année de production : 1975
Résumé : Sous les auspices d’une certaine Madame Cruz, Ligaya a quitté sa famille et son village pour étudier à Manille. Son fiancé, un jeune pêcheur, ne reçoit plus de ses nouvelles et essaie donc de la retrouver. Pour survivre, il se fait embaucher sur un chantier. Mais, cette plongée dans la vie urbaine ressemblera à une descente aux enfers.
Critique : Lino Brocka, décédé en 1991, est une des voix importantes du cinéma philippin. Il a d’abord tourné des films qu’il a qualifiés lui même de "commerciaux" et qui ont rencontré le succès. Puis, après avoir fondé une maison de production indépendante, Ciné Manila, il s’est orienté vers un cinéma plus social : Manille dans les griffes du néon est le premier long-métrage d’un cycle de chefs-d’oeuvre, encore méconnus, comme Insiang, en 1976, ou Bayan Ko, sorti en 1982. Ces films engagés, qui dénoncent la misère de la société philippine, ont subi les foudres du pouvoir dictatorial. Il faut dire que Brocka s’attaque à la misère et à l’oppression engendrées par la loi martiale du régime de Marcos, à travers l’itinéraire tragique de gens ordinaires.
Manille met en scène un jeune homme, Julio Madaga, autrefois pêcheur, débarqué dans la capitale pour retrouver sa petite amie, Ligaya, soustraite à sa famille, par une rabatteuse de bordel. Il s’engage dans un chantier de construction que dirige un patron tyrannique, partage le quotidien d’ouvriers maltraités et sous-payés, profondément solidaires. Des visions récurrentes font émerger Ligaya dans des paysages plus agrestes, nimbés de lumière.
Souvent, Julio ne sait pas ce qu’il fait là, ni ce qu’il va faire. Et souvent, la caméra saisit son visage encore enfantin, figé dans le souvenir de celle qu’il recherche et qui, au détour d’analepses évanescentes, semble une figure quasiment mythifiée. La sordide réalité du monde social ne semble pas affecter sa quête : lorsque le contremaître du chantier annonce, cigarette à la lèvre, les noms de ceux qui seront licenciés, il ne cille pas, alors que des plans de coupe saisissent d’autres ouvriers, la tête baissée. Sans travail, Julio erre dans un Manille interlope et nocturne, qui est aussi celui d’une jeunesse de la débrouille. Pas forcément désespérée, d’ailleurs.
Ainsi, Bobby, beau jeune homme avenant, double de Julio, en un peu plus pileux, s’est accommodé de la prostitution et de l’aisance financière qu’elle lui prodigue. Mais Julio n’en sera pas, qui, bouche figée sur le souvenir de sa bien aimée, jette l’éponge après une passe dans une chambre miteuse.
Faudra-t-il qu’un malheur advienne pour que ce jeune homme, absent au monde qu’il entoure, mesure ce que les injustices sociales et l’oppression politique font subir à des corps ? Ligaya aura tout juste le temps de raconter l’horreur de ce qu’elle a subi. Son décès amorce enfin la révolte du personnage, allégorisée par une manifestation de rue qu’il suit. S’il parvient à venger Ligaya en tuant son souteneur, Julio finit, dans tous les sens du terme, au fond d’une impasse. Cette tragique issue, que des travellings haletants précipitent, condense le désespoir social de toute une population.
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