Contes prémâchés
Le 16 mai 2018
Un film choral sans cohérence narrative ou thématique, qui pâtit surtout d’un manque d’originalité et de pertinence.
- Réalisateur : Dustin Guy Defa
- Acteurs : Michael Cera, Philip Baker Hall, Abbi Jacobson, George Sample III, Tavi Gevinson
- Genre : Comédie dramatique, Film choral
- Nationalité : Américain
- Distributeur : UFO Distribution
- Durée : 1h25mn
- Titre original : Person to person
- Date de sortie : 16 mai 2018
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Résumé : Une journée à Manhattan. Dès le réveil, Benny, fan de vinyles collectors et de chemises bariolées n’a qu’une obsession : aller récupérer un disque rare de Charlie Parker. Mais il doit aussi gérer la déprime de son coloc Ray qui ne sait comment se racheter après avoir posté en ligne, en guise de vengeance, des photos de nu de sa copine. Pendant ce temps, Claire, chroniqueuse judiciaire débutante passe sa première journée sur le terrain aux côtés de Phil, journaliste d’investigation pour un tabloïd ayant des méthodes douteuses pour obtenir un scoop. Leur enquête va les mener jusqu’à Jimmy, un horloger qui pourrait détenir, sans le savoir, les preuves d’un meurtre. Quelques blocks plus loin, Wendy, une étudiante désabusée du monde actuel, tente de persuader sa meilleure amie Mélanie qu’idéaux féministes et désirs sexuels ne sont pas incompatibles. S’ils ne se croisent pas toujours, une connexion existe entre tous : l’énergie de New York.
Notre avis : Lors d’une journée, une petite galerie de personnages new-yorkais anodins vivent, chacun de leur côté, une petite aventure. La recette est celle d’un film choral tout ce qu’il y a de plus banal, or l’expérience nous a appris qu’il n’y a rien de plus accablant qu’un long-métrage qui se complait à entremêler des courts-métrages quelconques. Dustin Guy Defa a au moins pour socle d’uniformisation la patte graphique avec laquelle a capté sa ville. Cette photographie automnale n’est d’ailleurs sans laisser derrière elle un petit air de déjà-vu qui permet aisément, dès les images d’ouverture, de deviner sur quel modèle de cinéma il se calque. Pour ceux qui douterait alors encore que son long-métrage ne fait que recycler lourdement les clichés du cinéma indépendant new-yorkais, la présence de Ben Safdie, l’un des modèles du genre, vient définitivement enfoncer le clou. Encore pourrait-on y voir un hommage si le réalisateur avait quelque chose de neuf à apporter aux standards obsolètes qu’il emprunte, mais sa mise en scène impersonnelle se limite de suivre en parallèle plusieurs scénarios qui peuvent tous être, individuellement, être qualifiés de "sous-sous-Woody Allen".
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Si certains personnages parviennent à être un tant soit peu attachants, c’est uniquement grâce au capital sympathie que leur apportent leurs interprètes. C’est en particulier le cas du duo formé par Abbi Jacobson et Michael Cera qui prêtent leurs traits à des journalistes enquêtant sur un fait divers sordide. Cette intrigue, qui sert de fil narratif central au film, souffre du même manque d’enjeux que les saynètes observant les conversations insipides de vieux hommes sur une terrasse. Les arcs scénaristiques suivant les arnaques dans lesquels se retrouvent embrigadés les personnages incarnés par Bene Copersmith et George Sample III sont, sur le papier, celles qui pourraient être les plus captivantes. Toutefois, le peu de temps que le scénario leur laisse pour se développer, et plus encore le manque d’énergie que Defa y insuffle, en font des situations anecdotiques et fastidieuses à suivre. Le caractère grotesque qu’emprunte inopportunément une course-poursuite en vélo –pourtant censée être le climax de l’une des histoires– du fait de sa mise en scène accablante, et en l’occurrence de son découpage brouillon, est parfaitement caractéristique de cette réalisation mal inspirée jusqu’à en être contre-productive.
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La vacuité thématique et l’absence de souffle stylistique en viennent vite à court-circuiter le plaisir de se sentir en terrain connu que l’on peut ressentir dans les premières minutes. Au final, seul le choix de certaines musiques entraînantes assure le statut de feel good movie à ce long-métrage insipide. Dustin Guy Defa semble croire qu’il lui suffit de s’interdire de mettre la moindre gravité à ses histoires, qui traitent pourtant de vol, de meurtre, de chantage ou encore d’homophobie, pour les transformer en sympathique comédie de mœurs. Son traitement léger de sujets aussi lourds ne fait en fin de compte que l’éloigner plus encore de la charge émotionnelle qui anime les œuvres dont il voudrait s’inspirer mais sans oser en adopter l’humour cinglant et le second degré. Ne résulte de cette recette aussi réchauffée que timorée qu’une bouillie narrative désuète et sans âme.
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