Le 13 juillet 2016
Un petit film noir inégal mais qui comporte assez d’éléments passionnants pour mériter d’être vu.
- Réalisateur : Philip Leacock
- Acteurs : Rod Steiger, Alan Ladd, Dolores Dorn
- Genre : Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Sidonis Calysta
- Titre original : 13th west street
- Date de sortie : 11 mai 1962
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– Sortie DVD : le 6 mai 2016
Résumé : Agressé et blessé par cinq loubards, l’ingénieur Walt Sherill exige justice. L’enquête de la police étant trop longue à son goût, il prend lui-même les choses en main, de plus en plus aveuglé par une soif de vengeance qui lui fait perdre son emploi et met ses proches en danger.
Notre avis : Il y a une raison d’être déçu par Lutte sans merci, ce que souligne François Guérif dans les bonus, c’est la mise en scène de Philip Leacock : avec un tel scénario, on rêve de ce qu’aurait donné le film s’il avait été plus nerveux, plus soigné, avec un vrai point de vue ou davantage de confiance en l’image. Leacock souligne ou étire, sans jamais trouver le bon rythme peut-être faute d’un montage trop lâche. Il y a pourtant de belles séquences : la seconde poursuite ou quelques plans d’extérieurs, par exemple, ou de belles idées, comme le nom du détective qui apparaît en ombre, le gros plan sur l’arme dans la vitrine. Mais que de faiblesses par ailleurs, jusqu’au tic gênants qui vient insister sur un gros plan par un travelling avant.
Pour le reste, ce film noir méconnu mérite largement d’être vu pour son scénario très riche, qui développe des thèmes alors rares : un homme banal, Walter, se fait agresser par des jeunes ; il s’associe à un policier, Koleski, puis, insatisfait, engage un détective et tente de se faire justice lui-même. On est loin cependant des « vigilante movies » sans morale : l’interrogation sur la violence ne cesse d’affleurer soit dans les dialogues soit dans des séquences étonnantes de brutalité. Le film montre parfaitement comment la violence détruit : Walter voit son ménage se briser (malgré une fin heureuse expédiée), ne peut plus travailler, rongé qu’il est par l’idée ou plutôt l’obsession de vengeance. Il devient paranoïaque, transmettant même cette peur à sa femme - voir les belles séquences dans lesquelles un jeune homme apparaît comme une menace potentielle. Dans ce cadre, la scène de la piscine est une magnifique réflexion en actes sur l’engrenage de la violence.
D’autant que le film est porté par une belle interprétation : Rod Steiger, sobre en policier opiniâtre, concurrence un Alan Ladd vieilli mais toujours efficace. Le voir s’entraîner à tirer est comme une allusion à son passé cinématographique. D’une certaine manière, Lutte sans merci peut être vu comme un documentaire sur un acteur en fin de carrière (c’est son avant-dernier film), auréolé d’un prestige déjà lointain en 1962 : Ladd n’est plus le cow-boy prestigieux de L’ Homme des vallées perdues ou le sombre héros de Tueur à gages et, face à une bande de jeunes, il ne peut plus se battre. Symboliquement d’ailleurs, il boite tout au long du film alors que le « méchant » affiche une virilité agressive et arrogante. La relève, ces jeunes riches et oisifs, porte en elle une violence qui ne se justifie plus ; les dialogues le soulignent, la violence d’antan reposait sur une certitude, celle de l’obligation ou de la raison. Mais les délinquants des années 60 n’ont pas d’idéal, simplement une « haine » aveugle, gratuite ; ils agissent sans voir les conséquences de leurs actes. En ce sens le visage fatigué de Ladd apparaît comme un symbole de cette incapacité à comprendre et à réagir.
Fort heureusement, le scénario refuse les explications sociologique ou psychologique ; tout au plus se permet-il une rapide condamnation de parents complices. Jamais on ne sent la tentation de ramener à des schémas simplistes : en se cantonnant à une histoire tendue, en respectant les codes du noir, Lutte sans merci garde tout l’intérêt d’un film de genre, certes inégal, mais constamment intéressant et, somme toute, original.
Les suppléments :
Outre une galerie photos et la bande annonce, le DVD propose deux entretiens, l’un avec l’inévitable Patrick Brion (8 minutes), l’autre avec François Guérif (12 minutes). Les deux sont intéressants et ne versent pas dans la promotion aveugle. Centrés sur la carrière d’Alan Ladd, ils reviennent aussi sur la réception et l’époque.
L’image :
En général et malgré quelques infimes parasites, la copie est propre et bien définie. Le noir et blanc est somptueux, l’image précise même dans la profondeur de champ.
Le son :
La vo (mono 2.0) est agréable, avec des dialogues clairs et une musique sans saturation. La vf est plus abîmée.
Galerie Photos
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