Les entretiens aVoir-aLire
Le 15 octobre 2014
Le réalisateur du très poétique "Lilting" a répondu à nos questions à l’occasion de son passage à Paris pour promouvoir son premier long-métrage.
- Réalisateur : Hong Khaou
- Plus d'informations : La page Facebook du film
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Le réalisateur du très poétique "Lilting" a répondu à nos questions à l’occasion de son passage à Paris pour promouvoir son premier long-métrage.
Notre critique du film : Lilting
aVoir-aLire : Lilting est votre premier long-métrage. Comment définiriez-vous la genèse de ce projet ? Et-ce que l’idée d’évoquer l’histoire-même de votre famille, réfugiés politiques immigrés en Angleterre, vous a inspiré dans l’écriture du scénario ?
Hong Khaou : L’idée, je suppose, m’est venue de ma famille. Je viens d’un milieu d’immigrés et mes parents ont trouvé difficile de s’intégrer à la vie au Royaume-Uni. Je voulais imaginer de quelle façon une mère s’en sortirait si elle se voyait coupée de son unique lien avec le monde extérieur. Comment une telle personne s’en sortirait. Je voulais aussi aborder le thème de la communication et avoir un film qui serait en deux langues.
Comment avez-vous choisi le titre du film ?
Lilting signifie "chantant" (un doux rythme mélodieux). Certaines langues peuvent être considérées comme chantantes telles que le portugais brésilien, le gallois et le mandarin par exemple. Des accents tels que le français ou l’irlandais peuvent aussi être considérés comme ayant une qualité chantante. Le film a beaucoup de cette qualité "chantante" avec les langues, la musique, la danse, le rythme, les passages du passé au présent. Je voulais qu’il soit interprété poétiquement.
Le film dévoile certains aspects négatifs de la communication et du langage. Pourquoi avez-vous choisi de faire appel à un personnage qui servirait de traducteur, et non à de simples sous-titres ?
Dans de précédentes versions j’ai en effet pensé à utiliser les sous titres, mais ça ne collait pas. Je voulais avoir un traducteur comme principal dispositif de narration et explorer les défis que cela imposait. Il est plus réaliste d’avoir un traducteur dans une situation où deux personnes ne se comprennent pas. On sait que communiquer permet de se comprendre et de surmonter les différences. Mais cela peut aussi tout autant accentuer des différences si fortes que de par là même surviennent des conflits. Je voulais montrer les deux faces d’une même médaille.
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Le casting du film est très cosmopolite. On ne peut qu’imaginer les réactions diverses dans les salles quand le public comprend le mandarin et/ou l’anglais. Avez-vous constaté des réactions particulières lors des projections ?
Lorsque vous avez des personnes parlant mandarin dans la salle, cela crée une charmante dynamique où une partie du public réagit avant l’autre. C’est vraiment plaisant quand cela arrive car je sens que cela permet au public de se mettre à la place des personnages.
Les deux acteurs principaux partagent un grand talent pour s’exprimer avec leurs corps et à travers des regards. Comment votre choix s’est-il arrêté sur Ben Whishaw et Pei-Pei Cheng ?
Pei Pei n’a pas grand chose à dire mais elle est si expressive tandis que Ben fait paraitre chaque mot avec une grande sincérité. J’aime cette dynamique. Je suis fan de Ben depuis que je l’ai vu dans Le Parfum. J’ai pensé qu’il était véritablement incroyable. Et Pei Pei est juste une légende. J’ai grandi en regardant ses films de kung fu ; c’est un genre très physique et expressif. Le film avait vraiment besoin d’acteurs tels qu’eux afin que les nuances de l’histoire fassent écho chez le public. J’apprécie la façon dont chacun d’entre eux pleure le même homme.
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Vous citez John Sayles comme source d’influence, notamment son film Lone Star. En quoi ce long-métrage vous a inspiré pour mettre en scène la chronologie des évènements ?
Lilting est une histoire qui se doit d’être racontée avec des flashback. Mon souci était de déterminer comment la raconter d’une manière plus intéressante et réfléchie. D’avoir ce sentiment de peine infiltrer le film. Quiconque ayant déjà expérimenté une peine profonde sait qu’elle peut survenir soudainement et coexister dans la même chronologie. C’est une émotion addictive. Je me suis souvenue que John Sayles dans son film Lone Star avait fait quelque chose de semblable où la caméra oscillait entre passé et présent sans arrêt. Je voulais faire de même mais en modifiant cela un peu afin que cette technique fasse écho.
Votre film se base également sur l’histoire d’amour entre deux hommes. Pourquoi avoir choisi de si peu tourner de scènes où il est possible de les voir ensemble ?
Les personnages principaux sont Junn et Richard. Je voulais que le film évoque leur peine et la façon ils la surmontent différemment.
Je voulais que Kai manque au public lorsqu’il est absent. Il y au total trois scènes où Kai et Richard sont ensemble. Il est difficile de trouver le juste milieu. S’il y a trop de scènes où ils sont ensemble, Kai ne vous manquerait pas. Mais s’il y en a trop peu, vous ne ressentiriez pas pleinement l’intensité de leur relation. Cela m’a paru être le juste milieu. C’est la preuve que Ben et Andrew ont été capable de transmettre toutes les belles nuances de leur relation.
Pensez-vous que votre film échappe à une certaine dimension politique, avec des thèmes tels que l’immigration ou l’intégration ? Avez-vous volontairement laissé ces thèmes de côté pour que le public se concentre sur les difficultés des personnages à se comprendre et à communiquer ?
Les thèmes de l’immigration et l’assimilation sont bien là et c’est bien sûr dû à la nature de l’histoire. Je ne voulais pas que cela pèse trop ou que ce soit trop évident sinon ce serait devenu un autre genre de film. Il s’agit là encore de trouver le juste milieu. Les thèmes principaux sont le langage et la communication.
Lilting a reçu un excellent accueil, autant auprès de la critique que du public. Pensez-vous que votre film a une portée universelle, avec des thématiques qui touchent finalement un large public, comme la retraite ?
Vous faites un film dans l’espoir que les gens comprennent ce que vous souhaitez transmettre. Dans le monde des festivals, j’ai rencontré des personnes qui ont trouvé que différents aspects du film étaient plus importants que d’autres et les touchaient davantage.
Quels sont vos projets ? Un second long-métrage est-il en préparation ?
Je pars pour le Vietnam en octobre afin de faire des recherches et écrire sur la mousson. C’est un film actuel à propos de la guerre du Vietnam.
Propos recueillis le mercredi 1er octobre 2014
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