Le 15 décembre 2020
Un évadé de prison, dont on ne voit pas le visage, se cache dans un fût que transporte une camionnette. Polar original signé Delmer Daves, qui utilise le procédé de la caméra subjective. On y retrouve le couple Bacall/Bogart.


- Réalisateur : Delmer Daves
- Acteurs : Humphrey Bogart, Lauren Bacall, Bruce Bennett, Agnes Moorehead, Clinton Young
- Genre : Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Warner Bros. France
- Durée : 1h46min
- Titre original : Dark Passage
- Date de sortie : 7 juillet 1948

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Résumé : Un homme visiblement évadé de la prison de Saint-Quentin, s’est caché dans un fût vide, transporté sur une camionnette. Dans un virage, le fût tombe et dévale jusqu’à un cours d’eau, en contrebas de la route. A aucun moment, on ne voit le visage de l’évadé, mais on reconnaît sa voix (celle d’Humphrey Bogart).
Critique : Le couple Lauren Bacall/Humphrey Bogart se trouve réuni pour la troisième fois, mais pas sous la direction de Howard Hawks. C’est Delmer Daves qui réalise ici, sur un scénario qu’il a écrit, d’après le roman Dark Passage de David Goodis (1946, "Cauchemar" pour la traduction française).
Le film est fondé sur un parti pris, assez rare pour l’époque, bien que déjà utilisé, notamment par Robert Montgomery quelques mois avant dans un autre film noir, La dame du lac ("Lady in the Lake"), celui de la caméra subjective.
Pendant les deux premiers tiers du film, on ne verra pas Humphrey Bogart, hormis en silhouette, ou de loin et de dos. En fait, on ne profitera que de sa voix. La caméra est censée remplacer les yeux du héros. On ne découvrira le protagoniste que lorsqu’il se sera fait opérer pour changer de visage. Et encore, ce sera dans un premier temps avec la tête cachée sous des pansements !
Ce procédé, certes original, déplut aux producteurs Jerry Wald et Jack Warner et déstabilisa les spectateurs venus pour Bogart et qui ne le "verront" vraiment que pendant la dernière demi-heure. Le succès ne sera pas au rendez-vous.
Ce polar sec et rapide ne manque pourtant pas de qualités : une intrigue astucieuse, des dialogues percutants, parfois à double sens, et une distribution impeccable :
le couple vedette fonctionne, une fois de plus, admirablement,
Agnes Moorehead, qui débuta dans le célèbre Citizen Kane d’Orson Welles (1941), et connaîtra la notoriété internationale en incarnant la mère dans la série Ma sorcière bien-aimée de William Asher ("Bewitched" 1964-1972) est une méchante assez exceptionnelle, et le jeune Clifton Young campe un personnage agaçant à souhait, en opportuniste, autant petite frappe que tête à claques. A noter que cet acteur, d’abord enfant star, disparut tragiquement en 1951, à seulement trente-trois ans dans l’incendie d’un hôtel qu’il provoqua, en s’endormant avec sa cigarette.
Bogart et Bacall seront de nouveau réunis pour une dernière fois à l’écran dans Key Largo de John Huston (1949).
En orthophonie, il existe une dysphonie, appelée "syndrome Bogart/Bacall" qui se traduit par une voix anormalement grave et basse. Rien ne prouve que l’un ou l’autre, ou les deux, en étaient atteints !