Les deux vies de Pénélope - La chronique BD

Judith Vanistendael est de ces artistes qui choisissent des sujets périlleux et les traitent avec tact et brio. Ainsi, dans ses ouvrages, elle n’hésite pas à marcher sur des œufs, tout en traçant sa route de manière dynamique jusqu’à son point d’arrivée.

Les deux vies de Pénélope ne déroge pas à cela. En suivant une femme qui a besoin de se sentir utile et a le sentiment de l’être davantage sur le terrain qu’au bercail, elle se livre à une radioscopie de différents sentiments (amoureux, maternels, filiaux…) et interroge les conventions sociales. Pénélope se ressent tout autant - davantage ? - mère face à une fillette qu’elle ne réussit pas à sauver que devant sa fille. Elle est exaspérée par les attitudes et propos culpabilisateurs véhiculés par sa mère et sa sœur. Et elle en a le droit.

Judith Vanistendael / Le Lombard

L’une des grandes forces de Judith Vanistendael est de ne pas séparer qualités et défauts de ses personnages. Son très beau portrait de femme en mouvement, qui doute, se double de plusieurs réflexions fertiles sur la personnalité et les masques revêtis, consciemment ou non, comme sur la place fréquemment assignée à la femme, place que celle-ci peut refuser avec souplesse, mais fermeté, comme l’effectue cette touchante Pénélope qui, finalement, tient davantage d’Ulysse que de son épouse.

Judith Vanistendael / Le Lombard

Formellement, l’autrice emplit son récit plutôt sombre d’une belle luminosité comme de touches d’humour. Cela est parfaitement véhiculé par un découpage et un dessin semi-réaliste toujours dynamiques et, ainsi, pleins de vie.
Une nouvelle fois, nous ne pouvons que féliciter Judith Vanistendael ! Nous attendons avec curiosité et impatience son prochain album, fruit d’une collaboration avec Zidrou.