Ilda attend que les anges bousculent sa vie. "Car mille choses se transmettraient en une seconde, quand mon regard croiserait celui des anges..." On ne peut pas désobéir aux anges. Ils appellent la mère. Alors la mère va à leur rencontre, la nuit... Elle va mieux après, elle sent une odeur bizarre, mais elle va mieux.

A ces anges, Ilda aimerait bien parler un peu de son enfance, s’ils daignaient se montrer... Enfance bousculée, entre une mère fugueuse, enlisée dans sa folie, un père bûcheron muet comme un tronc, une grand-mère qui meurt en bonne santé et un grand-père malade qui débarque chez elle, après que Dieu ait ouvert le ciel et inondé son village...

Ainsi s’écrit l’Histoire dans ce petit coin du Portugal, ni plus pauvre, ni plus fruste qu’un autre. Les portes claquent, les adultes crient. Ilda, qui ne va pas à l’école, ou si peu, essaye de se trouver une place, dans cet univers décalé... Le grand-père, moins taiseux, ouvre un espace dans l’imaginaire de l’enfant. Il lui apprend à lire, grâce à un vieil almanach, et Ilda apprend à déchiffrer : "Le porcelet de janvier accompagne sa mère au fumoir et précoce est la châtaigne qui vers mars ricane..."

Les anges parlent de la rudesse des corps qui se cherchent, sans les mots pour le dire. Ici, dans un espace-temps pétrifié par la moiteur ambiante, va se jouer, dans l’indifférence absolue des adultes, la fin de l’innocence de la narratrice. Allégorie d’une ruralité qui ne se sait pas encore menacée, par l’une des voix les plus originales et novatrices de la fiction contemporaine portugaise, le récit est de ceux qui laissent trace bien après avoir refermé le livre.