Dotée d’un QI exceptionnel et d’une famille prolo qu’elle voudrait oublier, Lou décroche une bourse d’études pour passer sa dernière année de lycée dans une banlieue de Chicago. Le début d’une nouvelle vie, espère l’adolescente qui, du haut de ses seize ans, se verrait bien ne jamais remettre les pieds dans son Australie natale. Mais l’aventure se révèle rien moins qu’idyllique, et son rêve américain prend progressivement des allures de cauchemar. Car sa famille d’accueil, modèle de banalité et satisfaite d’elle-même, se trouve rapidement mal à l’aise face à cette adolescente cérébrale et maladroite. Avant de prendre carrément peur quand elle découvre le penchant de la jeune fille pour le gin, penchant qui lui sert à tromper son mal-être.
Rien de plus périlleux que la chronique d’adolescence ; pour ce qui est de la violence et du désarroi de cette période d’apprentissage, l’amnésie est monnaie courante. Or avec ce premier roman, l’auteur brosse un portrait qui ne manque pas d’acuité. On pourra certes regretter, ici et là, une tendance à la caricature, dont les sœurs peu futées de Lou font notamment les frais. Autre bémol, on a parfois du mal à croire tout à fait aux exceptionnelles capacités intellectuelles de l’héroïne... Mais le mérite de M.J. Hyland est de se colleter sans mièvrerie avec l’envie d’échapper à soi-même et l’égocentrisme propre à la grande jeunesse. Tour à tour attachante, égoiste, mythomane, Lou campe un personnage fort et émouvant, en proie à un tenace désir de changer de peau. Une série de rencontres, cocasses ou mélancoliques, ponctue son parcours à haut risque vers plus de lucidité. Un voyage initiatique singulier, toujours au bord de la rupture. Et un auteur qu’on ne demande qu’à suivre.