Mater Dolorosa
Le 4 février 2024
Ce mélo familial, gros succès du cinéma français des années 40, a certes vieilli, mais il vaut mieux que sa réputation.
- Réalisateur : Jean Stelli
- Acteurs : Denise Grey, Aimé Clariond, Gaby Morlay, Jeanne Fusier-Gir, Noël Roquevert, Fernand Charpin, André Alerme, Paul Demange, Odette Barencey, Paul Barge, Elvire Popesco, Michel François, Marthe Mellot, Renée Devillers, Georges Grey, Camille Bert, Mona Dol, Marcel Vallée, Liliane Bert, Marcelle Géniat
- Genre : Drame, Mélodrame, Noir et blanc
- Nationalité : Français
- Distributeur : Consortium du Film
- Durée : 1h40mn
- Date télé : 19 octobre 2024 00:30
- Chaîne : France 3
- Date de sortie : 18 novembre 1942
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Résumé : 1914. Louise Jarraud, une veuve de guerre, accouche d’un enfant qui meurt quelques heures après sa naissance. L’infirmière en chef lui conseille de se rendre dans une agence de placement pour nourrices. Louise passera sa vie au dévouement envers les enfants des autres...
Critique : Gros succès sous l’Occupation, ce mélo fit pleurer des torrents de larmes dans les salles de cinéma, avant de devenir dès l’après-guerre le symbole du film pompier académique, voire pour certains une œuvre emblématique de la morale pétainiste. Il faut dire que le parcours de son héroïne est édifiant. Veuve de guerre ayant perdu son bébé, elle passe sa vie au service des autres, trouvant des substituts d’enfants dans les nombreuses familles bourgeoises où elle est placée comme nounou, lesquelles familles s’avèrent ingrates envers elle au bout de quelques années. Louise Jarraud n’est jamais révoltée, sauf quand elle s’enfuit avec un garçonnet abandonné qu’elle a quasiment élevé seule et que ses parents veulent lui arracher au bout de dix ans. Mater dolorosa dévouée et soumise, elle tend l’autre joue en cas d’humiliation, et sacrifie sa vie amoureuse en exprimant sa fibre maternelle pour les enfants des autres. Le film est découpé en plusieurs parties, qui correspondent aux différents postes de nourrice au fil des ans, après un prologue qui expose le drame initial. Sa fin de vie pathétique, suivie d’un happy end artificiel, complète de structurer un scénario où l’on retrouve des constantes : des parents irresponsables (Renée Devillers et Jean Clarieux) ou dépassés (Denise Grey et Alerme), des soupirants éconduits avec bienveillance (Charpin, Larquey), des trahisons. Louise remplace une directrice de spectacles (Elvire Popesco) qui zappe la première communion de sa fille, accepte de renoncer à ses gages pour protéger un enfant, et parvient même à gagner l’affection d’un petit sauvageon élevé par une grand-mère teigneuse (Marcelle Géniat)... Linéaire et traditionnelle, la mise en scène est au service de l’émotion qui doit rejaillir du récit, et ne propose aucune innovation au audace stylistique.
Et pourtant, Le voile bleu n’est pas « l’affreux mélo » décrit par les annales du cinéma. En dépit de son caractère daté et de ses outrances, qui doivent être replacées dans le contexte de l’époque, c’est un drame bien écrit (dialogues de François Campeaux) et habile dans sa narration. Techniquement, le produit est soigné, y compris dans sa photo et son montage, et la musique lyrique d’Alfred Desenclos et Marcel Grignon n’a rien à envier aux partitions de Maurice Jaubert. S’il exalte la famille avec des envolées qui étaient bien dans l’air du temps de la France sous Vichy, Le voile bleu est cependant critique envers la primauté des liens du sang, les rapports affectifs entre Louise et ses protégés n’entrant pas toujours dans le cadre de liens conjugaux et de parenté. C’est en ce sens que sur le plan idéologique, le film est plus nuancé dans son approche des valeurs du « Travail, famille, patrie ». L’œuvre fut en tout cas le seul titre de gloire de son réalisateur, Jean Stelli, artisan consciencieux qui signera par la suite des films tombés dans un oubli total. Le voile bleu doit enfin beaucoup à ses comédiens. Gaby Morlay, star des films de Guitry (Quadrille) ou L’Herbier (Le bonheur), est ici impériale et son interprétation ne se réduit pas à un jeu de mouchoir. Elle est entourée d’acteurs remarquables, de Jeanne Fusier-Gir en vieille fille intrigante à Georges Grey en jeune médecin reconnaissant, en passant par ou Primerose Perret, adorable petite peste.
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