Le 28 décembre 2024
Entre un roi désinvolte et déchu, une reine tourmentée et manipulatrice, ce Déluge raconte à la fois avec ravissement et gravité le passage d’un dictat politique à un autre. Un film percutant.
- Réalisateur : Gianluca Jodice
- Acteurs : Guillaume Canet, Mélanie Laurent, Fabrizio Rongione, Aurore Broutin, Nicolas Buchoux, Roxane Duran, Vidal Arzoni
- Genre : Drame historique
- Nationalité : Français, Italien
- Distributeur : Memento Distribution
- Durée : 1h40mn
- Date de sortie : 25 décembre 2024
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Résumé : 1792. L’Ancien Régime touche à sa fin. À Paris, Louis XVI et son épouse Marie-Antoinette sont arrêtés et conduits au donjon de la tour du Temple. Librement inspiré des carnets de Cléry, valet de chambre du roi resté auprès de lui jusqu’à sa mort.
Critique : À l’heure où le peuple syrien a chassé cinquante ans de dictature sanguinaire, se pose pour lui la question de la gouvernance qui lui succèdera. Et déjà des exactions terribles s’engagent dans le pays avec la montée du radicalisme religieux. Toute proportion gardée, Le Déluge décrit la manière dont une nouvelle gouvernance française, la fameuse Convention, après avoir écrasé la royauté, s’adonne à des pratiques du pouvoir peu glorieuses pour un régime qui se réclame démocratique. Et c’est ainsi, si l’on ose la comparaison, que Louis XVI, redevenu le citoyen Capet ; son épouse, Marie-Antoinette ; sa sœur et ses enfants se retrouvent embastillés dans le donjon de la tour du Temple, après un séjour dans les allées luxueuses des Tuileries, où ils ont eu l’illusion de croire qu’ils seraient bien traités.
- Copyright Fabio Lovino
L’italien Gianluca Jodice ressuscite les carnets de Cléry, le seul valet qui a été autorisé à veiller le roi jusque sa mort, dans un film aussi drôle que tourmenté. Le regard non francophone du réalisateur explique la vision très décalée sur cette période historique, avec un roi, bedonnant et optimiste, et une reine, obscure et malheureuse. Il ne faut certainement pas chercher dans cette fiction historique un semblant de véracité. L’important pour le réalisateur est de montrer la défection du pouvoir, dans ce qu’elle peut connaître de pire et de grotesque à la fois. Gianluca Jodice s’amuse à mettre en scène un roi joufflu qui, par bien des aspects, fait penser à la fameuse pièce d’Alfred Jarry, Ubu roi. L’homme est irresponsable, et en même temps sa naïveté le sauve des inquiétudes de sa mort certaine, là où Marie-Antoinette sombre dans un romantisme abscons, avec des pics d’humeur absolument déconcertants. Quand elle ne cède pas à des larmes de désarroi terribles, elle joue des menuets sur son pianoforte, lui rappelant sans doute ses heures de gloire à Versailles.
La critique caricature beaucoup ce film. Le grimage qui couvre le visage de Guillaume Canet, son air malheureux qui le fait ressembler par bien des aspects à un certain ex-président français, tout cela concourt pour le cinéaste à offrir au spectateur une farce sur la chute de la royauté française. En même temps, quand le réalisateur représente les tenants de la première Constitution, Mirabeau en tête, assis au milieu des dorures de la royauté, on ne peut que penser que la vanité, l’orgueil continueront longtemps de régner, au détriment du peuple qui a cherché à s’émanciper du dictat de la noblesse et de l’Église.
Bref, Jodice ne cherche pas à émouvoir ses spectateurs sur le sort réservé à la famille royale, mais à éveiller les consciences sur les risques du pouvoir, quel qu’il soit.
- Copyright Fabio Lovino
Les acteurs principaux, à savoir Guillaume Canet et Mélanie Laurent, portent avec beaucoup de hauteur, respect et inventivité les deux personnages historiques qu’ils incarnent. Leur jeu apporte beaucoup de nuances et précautions pour aborder la psychologie complexe de ces deux êtres, qui ont toujours connu les dorures de la monarchie et la soumission de leurs proches. Il n’est donc pas possible de leur reprocher une incapacité à comprendre la mécanique de la Révolution française, ni les juger sur l’extrême maladresse de leurs comportements. Les enfants qui les entourent apparaissent plus vulnérables, et enclins à la pitié, surtout quand on sait qu’ils resteront emprisonnés après l’exécution de leurs parents, Madame Royale jusqu’à la fin de son adolescence, et le dauphin jusqu’à sa mort précoce, en 1795.
Le Déluge est un film très original, qui assume les écarts avec la vraisemblance historique. Gianluca Jodice transforme ses personnages en des marionnettes déchues du pouvoir, au milieu d’une nouvelle forme de terreur, celle instaurée par la Convention nationale. Le film de Sofia Coppola avait fait de Marie-Antoinette un être glamour, épris de liberté à travers le luxe de Versailles, là où Jodice la dote d’une intelligence remarquable, face à un mari grassouillet et idiot.
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