La trilogie Warren Ellis - La chronique BD

Warren Ellis livre dans trois récits puissants son interprétation du genre super-héroïque, initialement paru chez Avatar Press, l’un des éditeurs étasuniens qui permet aux auteurs de sortir des grandes franchises pour proposer d’autres types de récits. Les trois dystopies permettent au scénariste de poser des questions de fond et d’égratigner ce mythe américain. Au fond, les super-héros sont-ils vraiment désirables ? Ne traduisent-ils pas plutôt les angoisses d’une Amérique individualiste, fascinée par la violence et ivre de sa toute-puissance ? Sous couvert de fiction, Warren Ellis offre une analyse très politique de son époque. Chez Warren Ellis, la violence, même dans son expression la plus extrême, sert toujours le propos.

©Warren Ellis / Juan Jose Ryp - ©Bragelonne pour la traduction française

Ces trois récits très nerveux sont porteurs d’une intrigue au rythme millimétré, avec une chute très efficace. Les dessins sont essentiellement assurés par Juan Jose Ryp. D’aspect à première vue très classique, le graphisme comporte quelques belles trouvailles (les yeux de John Horus dans Black Summer, les planches cauchemardesques de No Hero) et des scènes d’actions dynamiques et graphiquement réussies. Comme le laisse entendre la couverture, le dessin y va franchement sur l’hémoglobine et sur les scènes macabres (dans No Hero notamment). Les auteurs se sont déchaînés.

À travers ces trois récits, Warren Ellis démontre – comme Moore en son temps - qu’il n’a pas besoin de s’appuyer sur les galeries de personnages de Marvel ou DC pour offrir des récits de super-héros de grande qualité. Cette trilogie est une perle. Elle fait partie de ces récits que l’on découvre avec enthousiasme, qui conservent leur force à leur relecture et que l’on conserve précieusement dans sa bibliothèque.