Le 21 février 2023
Tirée d’un fait réel, cette satire sociale est un film prévisible qui manque globalement de subtilité.


- Réalisateur : Rolf Thiele
- Acteurs : Mario Adorf, Peter van Eyck , Gert Fröbe, Nadja Tiller, Carl Raddatz
- Genre : Drame, Noir et blanc
- Nationalité : Allemand
- Durée : 1h40mn
- Date télé : 10 août 2020 20:55
- Chaîne : Arte
- Titre original : Das Mädchen Rosemarie
- Date de sortie : 31 juillet 1959
- Festival : Festival de Venise 1958

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Résumé : La prostituée Rosemarie est décidée à faire carrière et vend ses charmes aux hommes influents de l’industrie du gouvernement.
Critique : Une blonde platine attend dans le hall d’un grand hôtel. De riches industriels arrivent d’une manière robotique, interrompent leur réunion pour contempler la jeune femme qui exhibe ses jambes en bas de l’immeuble, accompagnée par un duo musical (harmonica et banjo). Ce curieux début glisse sans transition d’une ambiance quasi fantastique à une atmosphère de comédie musicale. Des hommes en apparence très respectables et très riches, qui recherchent des catins dans cette version RFA de La Maison Tellier... à cela, rien de nouveau : sauf que le récit est inspiré d’une histoire vraie. A Francfort, en 1957, on retrouve une jeune prostituée morte. Elle s’appelle Rosemarie Nitribitt et son carnet d’adresses est un Who’s Who de politiques et d’industriels influents du pays. L’affaire ne sera jamais résolue.
Rolf Thiele en propose une relecture romancée. A la satire des bourgeois se joint ici le portrait d’une femme libre et déterminée, dont l’existence se trouve affligée d’une double oppression. Celle de ses deux souteneurs et celle des médiocres notables auxquels elle offre son corps. Les premiers sont de pauvres hères contraints de survivre, les seconds des idiots qui, parallèlement aux plaisirs tarifés, ourdissent des trafics en cupides affairistes. La charge anti-bourgeoise n’emprunte pas les chemins de la subtilité : lorsqu’une femme snob exhibe ses dents blanches, la caméra zoome brutalement ; quand un vieux beau aborde la prostituée, il le fait avec des lourdeurs béotiennes attendues. Dans l’ensemble, la mise en scène n’évite pas les effets appuyés, comme cette analogie convenue entre le célèbre tableau de Manet, Olympia, et la posture semblablement alanguie de Rosemarie, ou cette pose que prend l’héroïne à proximité d’une bombe à la forme phallique. Nadja Tiller, mémorable partenaire de Jean Gabin dans Le Désordre et la nuit, est ici un personnage plutôt prévisible, qui paiera cher son défi lancé à la haute société.
Et même si l’arrivée de la vamp au milieu d’une garden-party d’"amis distingués" prend des allures de réjouissante vengeance, sur fond de chantages, l’ensemble est une improbable hybridation, entre satire sociale et comédie musicale, qui rate plutôt sa cible, bien que sa fin lorgne sur un hommage esthétique à l’expressionnisme, profilant le genre de réussite qu’aurait dû être ce drame. Cette réalisation fut sélectionnée à la Mostra de Venise 1958 et reçut le prix du meilleur film en langue étrangère aux Golden Globes, l’année suivante.