Le 4 décembre 2017
René Clément réalise une œuvre curieuse, souvent maladroite mais attachante par son observation d’adultes immatures.
- Réalisateur : René Clément
- Acteurs : Jean-Louis Trintignant, Lea Massari, Robert Ryan
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters
- Nationalité : Français, Italien
- Editeur vidéo : Tamasa
- Durée : 2h20mn
- Box-office : 1 077 246 entrées France
- Date de sortie : 15 septembre 1972
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– Ce film fait partie du coffret Tamasa consacré aux thrillers de René Clément paru le 7 novembre 2017
Résumé : Pour échapper aux gitans qui le traquent, Tony se réfugie à Montréal. Là, il est témoin d’un règlement de comptes entre truands. Ces derniers l’enlèvent, d’abord dans l’intention de le supprimer, mais, peu à peu, ils intègrent le jeune homme à leur bande.
Notre avis : La course du lièvre à travers les champs, avant-dernier film de Clément, fait partie des thrillers qu’il a réalisés en fin de carrière, après des œuvres plus classiques qui lui avaient valu une reconnaissance officielle ; mais « thriller » n’est pas ici tout à fait le mot, même si le scénario de Sébastien Japrisot en reprend les ingrédients qu’il aligne comme autant de repères : il y a bien des bandits, une menace, un héros, une énigme, un « coup » et pourtant ce sont des motifs presque vides dont le cinéaste se désintéresse très vite malgré un début en fanfare. Le film se mue alors en huis-clos statique fondé sur des affrontements psychologiques et des rapports de séduction. Charley, superbement interprété par un Robert Ryan vieillissant, est ainsi partagé entre la fascination pour Tony (Jean-Louis Trintignant) et sa volonté de récupérer l’argent que celui-ci lui a pris. Pareillement, Sugar (Lea Massari) tombe peu à peu amoureuse pendant que les rivalités éclatent dans la bande.
Le scénario développe alors deux pistes, plus passionnantes que le prétexte policier. La première est amorcée par un début intrigant mettant en scène des enfants, qu’il faut relier à la citation initiale de Lewis Carrol : « Nous ne sommes, mon amour, que des enfants vieillis qui s’agitent avant de trouver le repos ». Et de fait, les personnages se conduisent comme des gamins : Mattone, vêtu d’un peignoir rose, gémit : « Tu ne m’aimes pas, Charley » ; deux bandits jouent à mettre des boulettes dans un panier ; Tony lui-même fait un caprice parce qu’il a faim. Quant à la fin, qui reprend le motif des billes, elle ne manque pas de panache. Ce sont bien des enfants qui se défient, se fâchent et se mesurent perpétuellement, tous attachés à leur jeune âge qui revient périodiquement en courts flash-back. Si Clément appuyé par Japrisot les montre ainsi, c’est que leur vision du monde repose sur des humains qui s’agitent en vain, pour des enjeux dérisoires et finalement hors de portée. Ce sont davantage des rêveurs ou des paumés en quête d’affection que des malfrats actifs. D’ailleurs, et c’est là le second thème majeur, Charley se perd entre les regrets d’un temps passé et la promesse d’un avenir meilleur tout en se rendant compte qu’il vieillit et, qu’au fond, sa démarche a quelque chose de suicidaire. Ryan est l’interprète idéal, avec son passé cinématographique, de ce bandit lassé qui joue sa dernière partie.
Certes, le film n’est pas exempt de défauts : trop long, trop confus, maladroit par moments (la référence à Leone, en particulier), il souffre également de dialogues très inégaux et d’une seconde partie bancale versant dans la tragédie. En revanche, il bénéficie de superbes paysages et d’une réalisation intrigante qui alterne banalités et plans léchés, en particulier un goût prononcé pour les contre-plongées, mais c’est surtout par l’interprétation et la sourde mélancolie des rapports humains qu’il peut encore séduire aujourd’hui alors que les scènes d’action ont pris un sérieux coup de vieux.
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