Le 27 octobre 2017
Un western intéressant, sublimé par une esthétique décalée.
- Réalisateur : Sidney J. Furie
- Acteurs : Marlon Brando, John Saxon, Frank Silvera, Miriam Colon, Anjanette Comer, Emilio Fernández, Emilio Fernández
- Genre : Western
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Elephant Films
- Durée : 1h38mn
- Date télé : 18 octobre 2023 22:45
- Chaîne : OCS Géants
- Box-office : 375.690 entrées France
- Titre original : The Appaloosa
- Date de sortie : 7 décembre 1966
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Résumé : Matt vient de recevoir un superbe cadeau : un cheval du nom d’Osaca. Hélas, il se le fait voler par un homme et sa bande de gangsters. Ils détiennent également prisonnière une jeune femme du nom de Trini... Celle-ci va s’avère être d’une aide précieuse pour Matt lorsqu’il retrouve enfin leur trace.
Critique : Réalisé la même année que Le bon, la brute et le truand ou Django, L’homme de la Sierra appartient à cette vague de westerns revisités, après l’épuisement de la forme classique, et qui en démontent les codes : selon ses goûts, on parlera de décadence ou de reviviscence. Furie emprunte à Leone les gros plans sur les yeux, les scènes dilatées suivies d’explosion de violence, même si celle-ci est comme adoucie. Pourtant, loin de l’inspiration gratuite, il crée une esthétique qui lui est propre, notamment par l’utilisation fréquente de plans très composés, avec souvent des amorces qui cachent une partie de l’image. Esthétique soignée, élégante parfois, dont on pourrait craindre qu’elle tourne à la virtuosité vaine si elle n’était en accord avec une vision du monde que le scénario met en exergue : à travers des personnages blessés, James Bridges et Roland Kibbee proposent un univers opaque, proche de l’absurde. Il y a en effet des ratés dès le début ; là où Mateo (Brando) voulait organiser une vie nouvelle et paisible, vœu qu’il fait dans une église et qui va évidemment tourner à la prétérition, il rencontre vol, trahison et brimades. Et, qu’on y réfléchisse, le point de départ n’est pas une question d’honneur ou d’argent, mais un double mensonge : Trini, séduisante Mexicaine, l’accuse faussement auprès de son mari et lui, à son tour, ment pour ne pas perdre de face devant ses hommes. De ce double manquement naît une succession de violences qui aboutissent à des morts en un engrenage bien mené, c’est-à-dire précisément ce que le héros voulait fuir.
Mais le scénario, s’il conteste le héros traditionnel en faisant de Mateo un être trop sûr de lui, hirsute et sale, maladroit, respecte un équilibre très classique, notamment en tissant un réseau étroit de correspondances : ainsi y a-t-il deux retours du héros, et à chaque fois il surprend le même gamin devant la rivière, deux utilisations du lasso, deux fuites de Trini, etc. Il y a également un parallèle explicite entre le vol du cheval et celui de la femme. Classique donc, comme sont classiques les récits des trois protagonistes quand chacun explique ses agissements par une blessure ancienne. De ce mélange entre audaces et tradition naît un film atypique et prenant, d’autant que Brando fait un numéro impeccable (pour ceux qui aiment) et que John Saxon, en bandit sarcastique, ne démérite pas.
Mais il y a également trace d’une fatigue générale, à l’image du héros qui s’assoit souvent ou se cache dans une tombe, une fatigue morbide qui est peut-être celle du western de l’époque. Mateo n’y a d’ailleurs rien de triomphant : si, lors du bras de fer avec des scorpions sur la table, il dit ne pas craindre de perdre, il se taillade sitôt piqué. De même son premier plan pour reprendre son cheval échoue-t-il lamentablement. Certes, il finit par reconquérir sa dignité et sa monture, mais c’est au prix d’humiliations et après une mort symbolique.
Ce qui frappe surtout à la vision du film, c’est bien sûr la perfection de la photo, due à Russell Metty, qui travailla avec Sirk, Welles ou Huston, que ce soit dans les magnifiques extérieurs ou dans les jeux d’ombre subtils qui égrènent nombre de plans. Formellement superbe, L’homme de la Sierra est aussi un moment du western, une contestation maniérée (plutôt que « maniériste », comme l’affirme Jean-Pierre Dionnet dans le bonus) et fascinante. La séquence du bras de fer, avec son cérémonial et sa lenteur, est un exemple parfait de la maîtrise du cinéaste, s’il en fallait un. Mais c’est l’ensemble du film qui vaut d’être vu, comme une expérience sans lendemain (faute de succès, sans doute) et hautement recommandable.
Les suppléments :
Outre la bande-annonce et une galerie photos, le Blu-ray propose une introduction enthousiaste et documentée de Jean-Pierre Dionnet qui fait un tour rapide mais instructif aussi bien à propos de l’esthétique du film que des acteurs et du réalisateur (8mn).
L’image :
Certes, dans les plans larges, le fourmillement est très visible ; mais la précision de l’image (le grain des peaux !), le respect des couleurs, la profondeur des noirs et l’absence de défauts sont dignes d’éloges, surtout pour une œuvre aussi esthétisante.
Le son :
Les deux versions DTS-HD 2.0 sont impeccables pour un film de cet âge : on entendra les éperons sur les dalles aussi bien que les marmonnements de Brando. Quant à la musique, elle prend toute sa puissance dans les passages orchestraux.
– Sortie Blu-ray + DVD : le 25 octobre 2017
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