Infiltration du 38ème parallèle nord
Le 17 septembre 2018
Cette plongée dans les méandres du conflit coréen se perd dans une narration longuette et souffre d’une inspiration vacillante.
- Réalisateur : Yoon Jong-bin
- Acteurs : Hwang Jung-min, Jo Jin-woong, Lee Sung-min, Ju Ji-hoon
- Genre : Drame, Espionnage
- Distributeur : Metropolitan FilmExport
- Durée : 2h21mn
- Date télé : 21 octobre 2021 22:55
- Chaîne : Canal +
- Titre original : 공작 (Gong Jak)
- Date de sortie : 7 novembre 2018
- Festival : Festival de Cannes 2018, L’Étrange festival 2018
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Résumé : Séoul, 1993. Un ancien officier est engagé par les services secrets sud-coréens sous le nom de code "Black Venus". Chargé de collecter des informations sur le programme nucléaire en Corée du Nord, il infiltre un groupe de dignitaires de Pyongyang et réussit progressivement à gagner la confiance du Parti. Opérant dorénavant en autonomie complète au cœur du pays le plus secret et le plus dangereux au monde, l’espion "Black Venus" devient un pion dans les tractations politiques entre les gouvernements des deux Corées. Mais ce qu’il découvre risque de mettre en péril sa mission et ce pourquoi il a tout sacrifié.
Notre avis : Depuis ces quelques années que le cinéma coréen est reconnu à l’international comme l’un des plus créatifs au monde, le genre de l’espionnage a peu été exploité alors que sa situation géopolitique s’y prête particulièrement. A l’heure où l’actualité locale est celle d’une volonté de réchauffement diplomatique entre le Sud et le Nord, le réalisateur Yoon Jong-bin a choisi d’exploiter une affaire politico-judiciaire des années 90. Un précédent effort de rapprochement avait en effet été alors effectué entre les dirigeants, mais il s’agissait d’une manipulation des services secrets qui met en lumière la difficulté de voir se concrétiser une telle tentative de pacification entre ces deux pôles au statu quo depuis 1951.
- © 2018 CJ E&M Corportation. Tous droits réservés.
Cette reconstitution historique se concentre, pendant plus de la moitié des 140 minutes, sur la façon dont Park Seok-young, un ancien soldat à la solde de Séoul, se retrouve embauché par le NIS, l’agence de services secrets locale, avant d’avoir infiltré les réseaux commerciaux de Pyongyang. Le scénario suit donc le long cheminement qui a mené ce faux homme d’affaires depuis de piètres trafics entre les Nord-Coréens et les Chinois jusqu’à réussir à influencer Kim Jong-il, qui apparaît comme une figure impressionnante, loin du sociopathe nombriliste tel qu’on a l’habitude de le voir représenté. L’enjeu principal de ce parcours tortueux est alors la difficulté avec laquelle ce personnage doit surmonter son rejet de l’idéologie communiste tel que lui a inculqué des décennies de propagande sud-coréenne. Toutefois, les longueurs avec lesquels sont amenées ces péripéties laborieuses marquent un frein à l’empathie envers cet espion anti-héroïque que l’on suit de près tout du long.
- © 2018 CJ E&M Corportation. Tous droits réservés.
La confusion qui pèse sur le rythme de cette première moitié – qui s’achève par la rencontre avec le dictateur nord-coréen, dont l’apparition est assurément la scène la plus mémorable du film – finit par se retrouver contrebalancée par l’intrigue bien plus passionnante qui se dessine après cette introduction péniblement élancée. Dès lors que les enjeux dépassent le seul personnage incarné par Hwang Jeong-min (récemment vu dans les rôles du chef d’orchestre dans Battleship Island et du shaman de The Strangers) pour atteindre une dimension géopolitique, le thriller gagne en intensité. Et quand bien même les tensions qui précédèrent l’élection de Kim Dae-jung en 1998 ne parleront pas au grand public français, le complotisme que dénonce le scénario est un élément qui leur sera bien plus évocateur.
Ceux des spectateurs qui seront les plus déçus sont ceux pour qui espionnage est synonyme d’action. Park Seok-young n’est pas un « James Bond made in Korea », loin de là, et d’ailleurs Yoon Jong-bin s’amuse à jouer de ce manque d’action en faisant en sorte que le seul et unique coup de feu que l’on voit tiré à l’écran le soit avec un jouet pour enfant. A défaut de poussées d’adrénaline, qui auraient pu rendre plus fluide le parcours du personnage principal, les passages au cours desquels la mise en scène délaisse son extrême sobriété sont ceux, en particulier à la fin, qui se bâtissent sur la charge émotionnelle qui naît de la difficile amitié entre cet agent infiltré sud-coréen et le responsable des services secrets nord-coréens. Une tonalité mélodramatique qui atteint son paroxysme dans la conclusion à l’occasion de laquelle le réalisateur n’hésite pas à sortir les violons dans l’espoir assumé de nous faire verser une petite larme.
- Copyright Metropolitan FilmExport
Assurément, The Spy Gone North se savoure davantage pour l’exploitation de son contexte propice au nationalisme et à la paranoïa que par son récit lui-même, loin de la violence et de l’ambiguïté que l’on aime du cinéma coréen. Dans son développement étiré et verbeux, le film brasse beaucoup d’informations, ainsi que quelques émotions de façon bien plus grossière, qui visent à replacer le conflit à hauteur d’hommes. Une intention tout à fait louable mais pour laquelle il apparaît en fin de compte qu’une histoire d’espionnage n’était certainement pas la plus appropriée.
© 2018 Metropolitan FilmExport Distribution. Tous droits réservés.
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