Critique : Sandro Ferri ne mâche pas ses mots et sait pourtant prendre de la distance. Ce paradoxe n’est pas le seul de cet ouvrage très instructif. Il s’agit d’un essai, mélangeant d’un côté une réflexion sur l’état du marché du livre en Italie et de l’autre côté, une touche autobiographique revenant sur des souvenirs et des moments forts de la vie de Sandro Ferri, liée à sa maison d’édition E/O.
L’auteur cherche les causes de la baisse de qualité dans l’offre littéraire. En fait, il les a même trouvées, puisqu’il nous les explique clairement, sans prendre de gants.
Ce livre, très frais, nous intéresse tout autant que les Italiens, car les problèmes rencontrés de l’autre côté des Alpes semblent les mêmes que ceux que l’on vit ici : explosion du nombre de publications, mainmise du marketing au détriment du message des recueils, trafics douteux dans les remises de prix littéraires pour n’en citer que quelques-uns.
Sandro Ferri trace aussi un bilan de son parcours, ses choix d’éditeur, son combat pour proposer de la qualité plutôt qu’une campagne commerciale.
Il nous parle des rencontres avec les auteurs, les commerciaux, les autres éditeurs, il aborde le développement de sa société, évoquant des moments de grâce comme des échecs.

Ce premier texte est suivi d’un autre, plus biographique, mais qui n’est pas un second essai. Sandro Ferri, au tout début, a tenté l’aventure de la librairie. Il revient sur ses années de jeunesse où la richesse de sa famille lui a permis d’investir à perte dans ce projet. C’est une autre facette du monde littéraire que nous découvrons, avec une histoire cocasse, celle de trois copains qui décident de vendre des livres sans rien y connaître. Ils vont dans le mur, mais lancent une effervescence d’événements et d’activités qui vont attirer tout le monde, sauf des clients.

Ces deux récits sont écrits dans des styles différents. Toutefois, l’on y sent la patte d’une même personne. En effet, si Sandro Ferri est devenu un éditeur qui pèse sur le marché international, il est aussi un auteur qui sait écrire de manière légère, se référant à des faits amusants pour garder le lecteur attentif, jusqu’à la dernière page.

L’éditeur présomptueux ou comment un petit éditeur indépendant rencontre le succès tient les promesses de son titre. Cet essai rehaussé d’une touche autobiographique s’avère un livre fort instructif et souvent drôle.