Le 15 janvier 2020
Une grande enquête, filmée comme un roman politique, en Palestine, à la recherche d’un Dieu vieux de 300 ans avant Jésus-Christ, mystérieusement rescapé des eaux et disparu dans les tréfonds de Gaza. Insolite et instructif.
- Réalisateur : Nicolas Wadimoff
- Acteur : Bruno Todeschini
- Nationalité : Canadien, Suisse
- Distributeur : Mission
- Durée : 1h18mn
- Date de sortie : 15 janvier 2020
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Résumé : En 2013, une statue d’Apollon datant de l’Antiquité est trouvée au large de Gaza avant de disparaitre dans d’étranges conditions. Œuvre de faussaires ou bénédiction des dieux pour un peuple palestinien en mal d’espoir et de reconnaissance ? Bientôt, la rumeur s’emballe alors qu’en coulisse, différents acteurs locaux et internationaux s’agitent par souci de préservation ou pur mercantilisme. Tourné à Gaza et Jérusalem, L’Apollon de Gaza se déploie comme un film enquête lancé sur les traces de ceux et celles qui ont approché ou entendu parler de ce trésor national qui fait rêver et devient très vite l’objet de toutes les convoitises.
Notre avis : Les dieux aiment se faire désirer. C’est à peu près le destin de cette statue d’Apollon, trouvée au large de Gaza en 2013, et qui disparaîtra dans l’immensité de la ville où se logent archéologues de fortune, potiers, artisans et chercheurs de trésors. Cette statue grecque, toute de bronze, est une pièce unique, vieille de 300 ans avant Jésus-Christ, dont les quelques photographies qui la montrent, témoignent d’un corps dévoré par la rouille et les algues. Elle est apparue du fond de la mer à un pécheur et elle est devenue autant un objet de fascination pour les historiens qu’un enjeu politique et financier pour nombre de Palestiniens, pauvres et ignorés, passant, avant de disparaître, d’une maison à l’autre.
- Copyright Mission - Akkafilms
L’Apollon de Gaza constitue une sorte d’enquête, qui s’intéresse au mystère de son apparition et de sa disparition. Là où certains pensent à un coup monté, d’autres y voient un signe de Dieu venu de l’eau. D’autres encore démentent la vraisemblance de ce trésor et font la démonstration d’une supercherie à ciel ouvert. En fait, cette statue magnifique magnifie toute une ville Gaza, qui a besoin de se fabriquer un mythe pour exister. Chacun expose sa vérité et réécrit le récit de ce Dieu de bronze, paré de tous les mystères. Le peuple palestinien cherche à se fonder une appartenance à partir de ce récit, qui fait autant figure de mythe que de témoignage historique du passage d’une civilisation illustre. Il devient ainsi le messager d’un peuple qui se sent méprisé et qui affirme son droit à être, son goût de l’esthétique, sa culture, à travers cet immense objet de bronze, dont on ne sait s’il est véritable ou fabriqué pour l’opportunité qu’il présente. Le cinéaste ne donne pas la solution à ce mystère. D’abord, parce que la statue n’a jamais été retrouvée. Ensuite, parce qu’il laisse la possibilité au spectateur de se créer sa propre réponse. On devine bien, à travers les témoignages, que la parole n’est pas totalement libre et que les personnes interviewées en savent beaucoup plus qu’elles ne disent. Peu importe. L’on pressent pendant tout le film la force de la manipulation politique, qui se sert de ce mythe pour donner à son peuple un sentiment de cohésion nationale. La magie de cette histoire devient centrale dans la ville de Gaza, non pas du fait de l’apparition d’un objet sacré, mais de sa disparition qui lui apporte soudain une essence transcendantale.
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L’Apollon de Gaza montre la ville de Gaza comme un écrin de couleur et de mer. Les rues paraissent vides, le soleil inonde les allées ; la caméra s’invite chez des sculpteurs, des historiens, des archéologues, et chacun de ces témoins s’approprie la paternité de l’antiquité. Devenu objet de désir et de commerce, l’Apollon dénature presque le destin même de la ville palestinienne, soumise à l’embargo des mêmes puissances occidentales qui convoitent le trésor. Le film décrit l’humanité dans ce qu’elle peut être de pire quand elle s’accroche à un rêve, celui de posséder un objet unique, ou plus largement, celui de donner à un peuple dominé, l’opportunité de se façonner un Dieu et de s’inscrire dans l’histoire du monde.
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Nicolas Wadimoff s’intéresse depuis plus de vingt ans au destin contrarié de la Palestine. C’est un cinéaste militant, courageux, qui passe de la fiction au documentaire, en affirmant son projet de donner la voix aux peuples méprisés. Quelque part, en montant cette enquête à la recherche de la statue d’Apollon, il s’engage à restituer à la Palestine sa légitimité et de réhabiliter tout une société que l’orgueil et la bêtise politique privent du droit fondamental à exister. Il participe à l’idée géniale qu’une communauté, pour se construire une identité, a besoin de s’inventer des mythes. En tous les cas, L’Apollon de Gaza demeure un objet de cinéma déroutant et tout à fait intéressant, dans sa manière de décliner d’un point de vue philosophique et sociologique, ce qu’on pourrait nommer la fabrique spirituelle des peuples.
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