Requiem for a nightmare
Le 12 mai 2008
À trop vouloir en faire, un film qui ne ressemble plus à rien. Passons notre chemin.


- Réalisateur : Stephen & Timothy Quay
- Acteurs : Amira Casar, Gottfried John, Assumpta Serna
- Genre : Fantastique, Expérimental
- Nationalité : Britannique, Français, Allemand

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– Durée : 1h39mn
– Titre original : The piano tuner of earthquakes
Faire des films qui ne ressemblent à rien de connu, c’est vraiment très bien. Faire un film tout court, ce serait quand même mieux. Ou même ne pas en faire un, dans le cas des frères Quay, ce serait encore plus recommandable.
L’argument : D’après ce qu’on en a compris : un neurologue tombe amoureux d’une cantatrice qui ne l’aime pas. Pour la posséder, il la tue et la maintient dans un état de mort comateux. Pour l’opéra qui doit venir parachever son projet, il engage un accordeur de pianos mais très vite ce dernier se rend compte de l’horrible situation et essaye comme il peut de sauver la belle des mains de la bête.
Notre avis : Sur le papier, dit comme ça, pour sûr, ça paraît simple. Là où ça devient compliqué, c’est qu’à l’écran, cette tragédie devient un concentré d’esthétisation maniaque fomenté par deux petits frimeurs qui ont bien révisé leur petit Buñuel illustré. Avec L’accordeur de tremblements de terre, les frères Quay, qui auraient sans doute mieux fait de s’en tenir au format court, ont battu des records dans le registre de la transcendance du néant et, en constante admiration d’eux-mêmes, délivrent après Institut Benjamenta une nouvelle tambouille expérimentale qui a plus sa place dans une expo d’art moderne que dans une salle de cinéma.
Cette petite boutique des bizarreries s’interdit rigoureusement tout humour et affiche une fascination presque effrayante pour la contemplation stérile. Sans chercher à développer les enjeux dramatiques, les cinéastes ne font que dans l’étrangeté poussiéreuse, du genre qui tape violemment sur le système et qui réclame un bon acide acétylsalicylique. Maintenant, les frangins imposent cet étron lénifiant dans tous les festivals au monde et se dédouanent d’avoir réalisé un gros salmigondis en revendiquant de nombreuses influences picturales (ça se veut proche des peintures de Magritte et Böcklin).
Le problème, c’est qu’ils ont davantage fait office de peintres que de cinéastes tant ils semblent s’être obstinés à annihiler tout mouvement. En ce sens, le pari est plutôt réussi : ce truc pelliculé ressemble à un tableau désincarné incapable de conférer la moindre émotion si ce n’est l’ennui, lourd et maladroit, qui revient à la charge quand on n’a pas sa dose d’ennui. Bref, amis avides d’expériences "autres", ne vous y fiez pas : ce film à l’autisme volontariste ne renvoie pas à l’appétit de merveilleux cher aux surréalistes ; c’est même souvent inerte, plutôt artificiel et surtout très prétentieux. Si Dziga Vertov a inventé le cinéma-œil, les frères Quay perfectionnent, eux, la caméra-chromo. Sauve qui peut.