Le 3 janvier 2018
Un western rare et surprenant au ton décalé.
- Réalisateur : Richard Bartlett
- Acteurs : Barbara Lawrence, Charles McGraw, Jock Mahoney, Luana Patten
- Genre : Western
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Sidonis Calysta
- Durée : 1h19mn
- Date de sortie : 21 mars 1958
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Résumé : A la fin du 19ème siècle, un mystérieux étranger arrive dans une petite ville de l’ouest américain et annonce aux habitants être à la recherche d’un Indien très connu de la région sans en préciser les raisons...
Notre avis : Démarquage évident de Un homme est passé (John Sturges, 1955), ce curieux film est d’abord un western indolent, presque placide, qui reprend le thème de l’étranger enquêtant dans une petite ville sur la disparition d’un ami. Mais là où Sturges installait une tension palpable, Bartlett cultive la distance et noie son film sous des détails dédramatisant, voire incongrus : ainsi le héros, le Joe du titre, se cogne-t-il à une enseigne ou prend-il un bain dans un abreuvoir public. De même l’intrigue se dénoue sous une pluie de pétrole et sans grande violence. De violence, de toute façon, il n’y en a quasiment pas : les coups de poings rarissimes font partie d’un jeu stupide et Joe, à deux reprises, pose son arme avant un affrontement. S’il pointe un fusil, c’est pour décourager Cal, le méchant de l’histoire. Il ne tirera pas. Le seul mort est l’Indien, mort avant le début du film et qui ne figure que dans un flash-back.
Bref, si l’on parle beaucoup, on agit peu. Dans ce décor unique et balayé par le vent, Joe Dakota mise davantage sur une ambiance et un ton décalés que sur une pression étouffante. Pour autant, la mise en scène est souvent soignée, notamment la scénographie qui unit les villageois, isole Joe et Jody (ah ! Cette proximité des prénoms qui, comme la chanson qu’ils sifflotent tous les deux les unit bien avant l’étreinte finale), ou place cette dernière en sur-cadrage constant, prisonnière qu’elle est d’une situation qu’elle n’aime pas.
Mais derrière une façade nonchalante, le film se pose en fable morale : les villageois regrettent le temps d’avant, celui des rapports amicaux que la cupidité a rongés. Car le pétrole, s’il peut les rendre riches, révèle avant tout leurs aspects les plus noirs ; comme dit le père de Jody, « nous ne sommes pas des gens méchants ». C’est oublier un peu vite qu’ils ont lynché un Indien et qu’ils étaient prêts à liquider Joe sur la foi d’un « étranger », qu’ils sont donc aptes à suivre le premier démagogue venu leur promettant la fortune. On le voit, ce western repose sur l’idée que l’Amérique, malgré sa mauvaise conscience, peut s’unir sur des valeurs saines pour peu qu’elle n’oublie pas ce sur quoi elle s’est établie. Message politique donc, mais en filigrane religieux également : Joe n’est pas très loin d’une figure christique presque non violente, qui s’oppose par la parole et l’entêtement. Il représente aussi la transgression, puisqu’il s’introduit dans une propriété privée et se baigne dans un abreuvoir, malgré le fait qu’on lui signifie que c’est interdit. Pourtant, il parvient à ressouder le village au prix d’un geste symbolique : en mettant le feu au puits de pétrole, les « bonnes gens » se redonnent une conscience et rejettent la tentation de l’argent facile.
Qu’on ne se méprenne pas, si le film baigne dans une morale diffuse, jamais il n’assène de vérité pontifiante ; c’est au contraire par la distance et une sorte d’ironie légère qu’il s’impose et séduit. Rien ici de pesant. Au contraire, le héros incarné par le flegmatique Jock Mahoney s’accorde bien au rythme tranquille de ce western atypique. Et, ce qui ne gâte rien, les seconds rôles sont formidables : on a toujours plaisir à retrouver Lee Van Cleef ou Claude Akins ; quant à la jolie Luana Patten qui, en dehors de Celui par qui le scandale arrive (Minnelli, 1960), n’a pas joué dans des œuvres inoubliables, elle passe avec aisance du charme boudeur à la séduction adulte. Vraiment, une belle découverte.
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