Greenhouse - Lee Sol-hui - critique

Critique : Comme toutes les aides à domicile, Moon-Jung n’évite pas une situation sociale de grande précarité. Elle squatte une baraque campée dans un terreplein sordide, l’empêchant de recevoir son fils qui purge une peine de prison. Pourtant, elle fait preuve d’une grande pugnacité et d’une implication irréprochable dans son travail, au service d’une couple âgé, l’un étant tombé aveugle, et l’autre succombant peu à peu à une forme de démence sénile. Elle semble avancer péniblement sur un fil où tout peut basculer du jour au lendemain. Justement, Greenhouse est le récit haletant d’un vertige, l’héroïne s’empêtrant petit à petit dans une situation totalement insurmontable.

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Voilà un pur film sud-coréen avec cette mise en tension d’un récit qui n’épargne aucun des personnages. La cruauté, la mort, l’anormalité entourent des protagonistes à l’agonie, qui sont incapables d’infléchir un destin tragique et sans pitié. La protagoniste se bat honnêtement, ce qui la rend totalement attachante. On frémit devant les décisions terribles qu’elle prend et qui la précipitent dans une horreur dont elle ne peut plus se départir. La tension de la mise en scène est permanente, jusqu’à la dernière scène qui pousse au paroxysme la dimension tragique.

Kim Seo-hyeong est une comédienne importante en Corée du Sud. Elle cumule près de vingt-cinq ans de carrière au cinéma et sur les écrans de télévision, lui assurant une véritable crédibilité dans ce personnage d’aide-soignante, aussi touchante qu’effrayante. L’actrice campe un personnage hanté par une pathologie mentale qui la contraint à s’automutiler ou se donner des coups, elle qui s’efforce de rendre la vie de autres plus légère. Elle supporte l’agressivité de la malade avec une patience admirable et accompagne le mari aveugle avec une dévotion incroyable. Mais le tableau se fissure rapidement, faisant apparaître les ravages de la maladie mentale dont elle est atteinte.

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Dans tous les pays émergents comme la Corée du Sud ou la Chine, le vieillissement de la population est un vrai sujet sociétal. La réalisatrice s’empare pour son premier long-métrage de cette question qu’elle traite sur un mode quasi horrifique. Comme la plupart des films sud-coréens, Greenhouse mêle l’hémoglobine à l’épouvante et au thriller. Les personnages sont embarqués dans un destin qui leur échappe complètement, avec la caution de certains malgré eux. La folie se déploie dans des personnalités complexes, troublantes, dans un environnement glauque qui délaisse les anciens et les êtres atteints de handicap ou de pathologies psychiatriques. La réalisatrice en profite pour égratigner le système coréen de soin en santé mentale, peu enclin à accompagner les patients qui n’en ont pas les moyens.

Greenhouse est un film cruel, follement stimulant, où la mise en scène met en mouvement toutes les émotions possibles. L’absurde côtoie de près la bêtise humaine et le vertige dans un récit stressant et survolté. Tout est fait pour provoquer le frisson du spectateur, sans négliger une certaine forme de plaisir pervers devant l’effondrement de l’héroïne.