Grand Paris - Martin Jauvat - critique

Critique : Il y a des films sortis de nulle part, qui apparaissent sur les écrans français comme des ovnis au beau milieu du ciel. Et cela tombe bien car ce drôle d’objet cinématographique parle d’extraterrestres, de banlieue, de stations de métro en construction, d’amour, d’amitié et de drogue. Grand Paris est né de l’imagination osée d’un jeune réalisateur, Martin Jauvat, habitant Chelles en Seine-et-Marne, à l’inverse même des étudiants qui sortent de la FEMIS ou d’autres grandes écoles de cinéma. Le cinéaste n’a pour bagages que des courts-métrages, ce qui n’a pas empêché la production Ecce Films de l’accompagner dans cette comédie hirsute et originale.

Copyright Ecce Films

L’histoire prend sa source dans une course que le jeune Leslie doit faire depuis la gare de Saint-Rémy lès Chevreuse pour un dealer qu’on ne verra jamais, le Roi. Il propose à son ami, Renard, de l’accompagner dans cet exil forcé au bout de la ligne B où après avoir vaguement dragué deux passantes, ils font la découverte d’un mystérieux objet qui pourrait être autant sorti des temps ancestraux qu’avoir été projeté par une soucoupe volante non identifiée. Tout le récit emprunte ensuite au road movie, sinon que leur balade nocturne les amène d’un bout à l’autre de la banlieue parisienne, notamment le long des stations en construction du métro du futur Grand Paris.

Copyright Ecce Films

Grand Paris demeure un film particulièrement attachant et drôle. Les deux protagonistes parlent de ce qu’ils connaissent : la vie de banlieue. Ils ne cèdent en aucun cas au misérabilisme bourgeois et bien-pensant, ou, au contraire, au policier ultra-violent. L’intention de Martin Jaunat, ce nouveau jeune prodige du cinéma, est de rire de lui-même, peut-être d’une partie de ses copains, mais aussi d’offrir de ces gamins multiculturels une image sensible, attachante et débonnaire. Le réalisateur n’hésite pas à se moquer des stéréotypes dont les mômes de banlieue sont parfois les premiers auteurs, en adossant à ses personnages, avec une certaine subtilité, des comportements à l’inverse de ce que les cultures urbaines peuvent véhiculer.

Copyright Ecce Films

Grand Paris est une belle surprise au milieu du paysage cinématographique français trop souvent emprunt des relents de la Nouvelle Vague. Martin Jaunat réinvente la comédie en faisant un clin d’œil non dissimulé au cinéma fantastique de Spielberg et à l’inventivité de Quentin Dupieux.