Le 31 mai 2019
L’intérêt de cette dernière saison ne se trouvait pas où on l’attendait. Toujours pris dans ce rythme très réducteur, Game of Thrones aura néanmoins offert sur ses derniers épisodes l’intensité à laquelle on pouvait s’attendre.
- Série : Game of Thrones
- Acteurs : Peter Dinklage, Emilia Clarke, Kit Harrington, Sophie Turner, Maisie Williams
- Genre : Drame, Fantastique
- Nationalité : Américain
- Date de sortie : 14 avril 2019
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Résumé : Il y a très longtemps, à une époque oubliée, une force a détruit l’équilibre des saisons. Dans un pays où l’été peut durer plusieurs années et l’hiver toute une vie, des forces sinistres et surnaturelles se pressent aux portes du Royaume des Sept Couronnes. La confrérie de la Garde de Nuit, protégeant le Royaume de toute créature pouvant provenir d’au-delà du Mur protecteur, n’a plus les ressources nécessaires pour assurer la sécurité de tous. Après un été de dix années, un hiver rigoureux s’abat sur le Royaume avec la promesse d’un avenir des plus sombres. Pendant ce temps, complots et rivalités se jouent sur le continent pour s’emparer du Trône de Fer, le symbole du pouvoir absolu.
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- Copyright : HBO
Notre avis : La conclusion de Game of Thrones pouvait-elle éviter le clivage auquel elle est confrontée depuis la diffusion de l’épisode 6 ? Donner un point final à ce pilier de la télévision des années 2010 allait forcément diviser tant, et c’est tant mieux, elle n’a pas essayé de contenter tout le monde en ne contentant, au final, personne. Heureusement (pour nous en tout cas), D.B. Weiss et David Benioff, s’ils ne sont pas exempts de tout reproche, ont eu l’intelligence de conclure leur série comme ils l’entendaient, avec des choix à l’origine de certaines divisions dans le public. La saison 8 ne brille pas pour autant par ses prises de risque – il suffit de lister les morts pendant la bataille contre les Marcheurs –, puisqu’elle met en scène des trajectoires finalement assez prévisibles. Aucune légitimité à cracher sur le destin de Daenerys, tant l’histoire le dirigeait irrémédiablement vers cette finalité. Si autant de critiques sont tombées sur la saga pour ce choix en lui-même, c’est bien parce que les showrunners ont eu le courage d’aller jusqu’au bout de ce qu’ils avaient construits sur toutes les saisons précédentes, en conservant le fatalisme cruel qui caractérise Game of Thrones depuis ses débuts. En réalité, la série nous a fait une Martha, avec les réactions disproportionnées qui vont avec. Le problème ne réside pas tant dans le choix (pour Martha c’est de l’association libre, donc rien de choquant, bien au contraire), mais dans la manière dont il est amené, faille majeure de la franchise depuis son avant-dernière saison.
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Pour ces six derniers épisodes la dé-complexification des intrigues se ressent comme jamais auparavant, puisqu’il s’agit de ramener vers un épicentre des histoires qui s’étalaient sur de multiples terres, avec de multiples personnages. Au final, les enjeux se resserrent et même si la série prend soin de ne pas occulter toutes les magouilles politiques, elle laisse l’impression que tous ces épisodes, toutes ces années, n’auront convergé que vers un banal affrontement entre les vivants et les morts, ainsi qu’entre les vivants et Cersei, du gentil contre du méchant (pour grossir le trait). Là où le bât blesse de manière plus significative, c’est que Game of Thrones essuie un échec cuisant avec la conclusion qu’elle donne, concernant la menace des Marcheurs Blancs. Au-delà du fait qu’on ne voit absolument rien (mais il faut croire que la faute nous revient, c’est à cause de nos téléviseurs), l’impact de la bataille entre les vivants et les morts est amoindri par un point de vue omniscient bien fade. Regarder cet épisode revient à regarder une énième bataille d’Avengers contre une pléthore d’ennemis anonymés. Aucun impact, parce qu’ aucune proximité palpable avec les personnages et leur sort. L’épisode peut nous sortir une baston entre plusieurs milliers de vivants et de morts ou nous montrer deux dragons se foutre sur la tronche, qu’importe, tout simplement parce que la caméra adopte un point de vue divin et déshumanisé, loin de l’asphyxie brutale de la Bataille des Bâtards, notamment. La menace soi-disant majeure se trouve expédiée en un épisode, une bataille et bien peu d’émotions. Game of Thrones nous a fait frissonner pendant des années avec son Winter is Coming pour au final nous jeter un coup de froid sur la finalité de cette intrigue.
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En réalité, l’affrontement qui restera dans les mémoires concentre des efforts bien moindres pour en mettre plein les yeux. L’intensité n’est pas forcément là où on l’attendait avec l’épisode 5, qui renoue avec le chaos à échelle humaine, travaillant l’Homme non pas comme une masse qui se fait lamentablement écraser, mais plutôt comme un groupement d’individus dissociables. Ce principe va servir de base à la dramaturgie des trois derniers épisodes, tirant profit autant que possible des contraintes rythmiques, occasionnant raccourcis et coups de bol insensés. Game of Thrones questionne notre propre crédulité et notre tolérance vis-à-vis d’erreurs scénaristiques nécessaires, pour prodiguer dans un court laps de temps un roller coaster d’émotions, qui, chez nous, a très bien fonctionné. Chacun se fera son propre avis, mais il ne faut pas oublier que cette configuration a plus ou moins toujours été un des ingrédients de la série, pour amener des événements clés. Elle savait juste mieux les camoufler auparavant (et encore, ça reste discutable).
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Cette dernière saison, un peu malgré elle, nous rappelle que Game of Thrones n’a jamais été constante dans la qualité de l’écriture. La différence avec ces six épisodes (13, si l’on inclut ceux de la saison 7) réside dans le fait qu’ils ne se sont pas appuyés sur l’œuvre de George R. R. Martin, passant d’une adaptation à une création (presque) originale. Il est d’autant plus facile de taper sur la série que cet argument se révèle plutôt pertinent, si l’on considère la centralisation des intrigues vers des enjeux plus directs et linéaires. Le fait que la franchise a opéré des choix que l’on ne voulait pas, ne légitime toutefois pas les nombreuses critiques et réactions absurdes à l’endroit de cette fin. Et c’est finalement à cela que l’on peut mesurer la portée de Game of Thrones et sa place dans le quotidien de nombreuses personnes. En ne courbant pas (excessivement) l’échine pour contenter tout le monde, la série a ouvert les portes aux virulents retours venant de spectateurs qui ont consacré une partie de leur vie à la partager avec celles des Stark, Targaryen ou encore Lannister. C’est à l’excessivité des réactions, tranchées, portées par l’émotion, que l’on reconnaît une production artistique qui a bouleversé son médium. Il est temps de passer à autre chose. Jusqu’aux prochains spin-offs.
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