Le 14 juillet 2021
Une tragédie fraternelle et flamboyante, incarnée par deux acteurs puissants, Vincent Rottiers et Kévin Azaïs, quasiment filmée à la façon d’une réécriture du mythe d’Abel et Caïn.
- Réalisateur : Sylvain Labrosse
- Acteurs : Vincent Rottiers, Kévin Azaïs, Pauline Parigot, Genti Kamé
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Distributeur : Destiny Films
- Durée : 1h22mn
- Date de sortie : 14 juillet 2021
- Festival : Festival d’Angoulême 2019
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Résumé : Emilijan et son jeune frère Stanko sont liés par un secret d’enfance qui les a contraints à quitter leur pays natal. Aujourd’hui, Emilijan s’est parfaitement intégré en France. Il travaille dans la zone portuaire de Brest et vit une histoire d’amour avec Gabrielle. Stanko, lui, vit dans la nostalgie du passé et attend impatiemment de rentrer au pays pour y retrouver leur vie d’avant. Tout bascule le jour où Emilijan lui annonce qu’il ne veut plus repartir…
Critique : Stanko, c’est le petit frère, et Emilijan, l’aîné. Il y a quelque chose entre eux qui va au-delà de la simple fraternité. C’est un amour qui exclut tous les autres, dévoré par le souvenir de leur enfance sur les terres d’Europe de l’Est, par le secret qui les oppose et les lie à la fois, et surtout par l’effroi de succomber à la solitude et à l’abandon. En réalité, Frères d’arme ne raconte par un simple récit familial. Le film dénoue les fils d’un enracinement perdu, de la pesanteur familiale et culturelle qui empêche l’émancipation des enfants. Il s’agit en quelque sorte d’une réécriture très personnelle du récit biblique Abel et Caïn, pour lesquels la mort et l’amour semblent les deux mêmes faces d’un destin commun. Ils sont engagés dans une promesse impossible, celle de ne jamais se quitter, alors même qu’ils ont dû abandonner leur pays natal, pour échapper à la vengeance et à la violence des clans rivaux, afin d’endosser un avenir plus serein.
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Sylvain Labrosse installe sa caméra au bout de la Bretagne, à Brest exactement. La mer est très présente dans ce récit tragique, avec ses dockers, ses ouvertures sur l’horizon, le bruit de l’écume qui s’écrase contre les rochers. Elle semble incarner un personnage à part entière au milieu de ces deux frères, leur offrant la possibilité d’un ailleurs, qu’il s’agisse du métier de logisticien qu’ils occupent sur les ports, que des moments rares où ils redonnent des forces à un poulet de combat, quand ils ne s’adonnent pas à la fraîcheur revivifiante de l’océan Atlantique. La mer est toujours difficile à filmer. Le réalisateur y parvient avec la même pudeur que pour ces deux animaux blessés, naufragés d’un souvenir tragique qui les hante l’un et l’autre. La culpabilité est en permanence lisible chez ces frères, alimentée par la réminiscence du passé qui resurgit à chacune de leurs nuits.
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Frères d’arme ne serait pas ce qu’il est sans la présence foudroyante des deux comédiens, Vincent Rottiers et Kévin Azaïs. Ils interprètent une langue slave, celle de l’enfance des deux frères, avec une irrésistible adresse. Ils paraissent s’être appropriés les tonalités des terres d’où leurs personnages émergent, la mélancolie de l’exil, et la diglossie inexorable qui s’empare des exilés partagés entre le pays d’accueil et celui d’origine. Fondamentalement, les deux comédiens se sont appropriés le langage et les codes de cette fraternité si particulière. Le plus jeune des deux qui entraîne un coq au combat, évolue entre rage et détresse. Il offre le spectacle tragique d’un enfant que la mort a privé de son père et que l’exil a contraint au regret de ses racines. Le plus grand, lui, incarne la figure du voyageur ou du sage, qui cherche à redonner du sens à son immigration forcée.
- Copyright La vie est belle
Il y a beaucoup de violence dans ce récit fraternel. Mais elle n’est jamais gratuite. Cette violence est sans doute celle de nombreux exilés qui doivent fuir le traumatisme d’un passé difficile. La dignité des personnages gagne toujours sur la tentation de l’excès, de la démonstration. Stanko et Emilijan avancent coude à coude sur le chemin qu’ils tentent de se recréer, partagés entre le désir de liberté et celui de faire allégeance aux liens du sang qui les unit irrémédiablement. La mise en scène ne faillit jamais dans la lourdeur ou le mélodrame. Au contraire, Frères d’arme rend hommage au devoir d’humanité dont il faut savoir faire preuve quand le pire survient dans nos existences.
- Copyright Destiny Films, 2020
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