Le 11 octobre 2017
- Scénariste : Ludovic Debeurme>
- Dessinateur : Ludovic Debeurme
- Coloriste : Fanny Michaëlis
- Genre : Ecologie, Science-Fiction
- Editeur : Casterman
- Famille : BD Franco-belge
Ludovic Debeurme propose avec Epiphania un magistral conte moderne.
Epiphania traite avec une finesse et acuité d’enjeux propres à notre époque à travers un récit qui emprunte au fantastique. Chronique du premier album d’un triptyque qui confirme que Ludovic Debeurme est est bien l’un des meilleurs auteurs francophones de sa génération.
Depuis Céfalus en 2002, Ludovic Debeurme nous gratifie à intervalles réguliers d’excellentes bandes dessinées, aussi bien chez Cornélius (Le Grand Autre, Un père vertueux, deux albums magistraux) que chez Futuropolis avec le diptyque Lucille et Renée. Le voici désormais chez Casterman pour une série de trois albums qui se tourne davantage vers le grand public : en témoignent l’utilisation du gaufrier ainsi qu’un ensemble en apparence plus standardisée, notamment du fait d’une colorisation par informatique. Mais ce parti-pris symbolisé par un changement d’éditeur n’a en rien altéré la force narrative et graphique de Ludovic Debeurme, qui nous offre une bande dessinée de grande qualité, porté par un dessin très expressif aux couleurs vives.
Epiphania nous plonge dans ses toutes premières pages dans les angoisses de David, un musicien renfermé dont le quotidien est marqué par un cauchemar récurrent dans lequel sa femme, Jeanne, donne naissance à un enfant monstrueux. Cette crainte de la paternité est à l’origine de dissensions dans le jeune ménage, qui se lance à l’initiative de Jeanne dans une étrange thérapie de couples collective sur une île dépeuplée. Leur séjour est brusquement interrompu par un tsunami d’une rare violence qui emporte Jeanne et la grande majorité des habitants de l’île, qui ont tout juste le temps de voir que trois météorites se sont abattues sur Terre. Cette catastrophe naturelle a une conséquence inattendue : des enfants, dont on découvre progressivement certaines caractéristiques animales, sortent progressivement de terre. Rentré chez lui, David trouve l’un de ces étranges petits êtres dans son jardin… S’ensuit un récit intense où les hommes, après cette catastrophe naturelle, sont confrontés à des individus à la fois identiques et autres, désignés sous l’appellation « mix-bodies » ou « Epiphanians ».
Au début du récit, David rêve qu’il tient dans ses bras un enfant monstrueux - © Ludovic Debeurme/Casterman
C’est toujours avec une grande subtilité que Ludovic Debeurme traite des sentiments humains, sans jamais porter de jugement définitif. C’est ainsi qu’ Epiphania nous entraîne dans un récit qui - tout en ayant pour fil rouge le thème de la paternité, cher à l’auteur - soulève aussi bien la question du racisme et de l’adaptation sociale de personnes différentes que le rapport de l’homme à son environnement.
David et Jeanne se rendent sur une île pour y suivre une étrange thérapie de couple collective - © Ludovic Debeurme/Casterman
Le trait de Debeurme ainsi que les choix judicieux de découpage et de mise en couleur confèrent à ce premier tome d’Epiphania une grande force graphique. Si les couleurs vives renforcent le caractère fantastique et parfois crépusculaire du récit, cet album doit beaucoup à la finesse du trait de son auteur quand il s’agit de décrire les différentes expressions de ses personnages. Cette expressivité permet à Epiphania d’éviter d’être verbeux, puisque de nombreuses idées et sensations passent par le dessin. Quant au découpage, très bien pensé, il confère une intensité au récit et lui offre quelques images iconiques sur lesquelles le lecteur prendra du plaisir à s’arrêter pour apprécier la qualité du trait.
En somme, Ludovic Debeurme nous gratifie avec Epiphania d’un grand album, incontournable pour ceux qui apprécient l’auteur, mais qui constitue également une excellente porte d’entrée à son univers pour le néophyte.
Vous pouvez retrouver un entretien avec l’auteur à propos de cet ouvrage sur le site de Casterman
120 pages - 22€
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Galerie photos
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