Nouvelle chance ?
Le 24 mai 2012
Un film policier à thématique sociale, efficace et remarquablement bien réalisé, qui échappe en partie à la langue de bois idéologique et offre une vision pas trop idéalisée de la société est-allemande des années soixante.
- Réalisateur : Richard Groschopp
- Acteurs : Heinz Klevenow (Junior), Angelica Domröse, Helga Göring, Krista-Siegrid Lau, Volkmar Kleinert
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters
- Nationalité : Allemand
- Durée : 1h30mn
- Titre original : Entlassen auf Bewährung
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– Produit en 1964
– Sortie en RDA : 18 juin 1965
Un film policier à thématique sociale, efficace et remarquablement bien réalisé, qui échappe en partie à la langue de bois idéologique et offre une vision pas trop idéalisée de la société est-allemande des années soixante.
L’argument : Conrad, dit Conny, a été condamné pour délit de fuite après avoir écrasé accidentellement un homme avec sa moto qu’il conduisait en état d’ivresse. Il est libéré sur parole et on lui propose un emploi dans une imprimerie (il a passé le diplôme en prison).
N’étant pas le bienvenu chez son père, artisan serrurier, et la nouvelle épouse de celui-ci, il s’installe dans un meublé à demi vétuste du centre de Berlin et renoue avec son ancienne petite amie Ute. Celle-ci, issue d’un milieu bourgeois, est infirmière. La mère de la jeune femme voit d’un mauvais oeil cette liaison avec un simple ouvrier.
A l’imprimerie, la supérieure immédiate de Conny, Helga, se montre très méfiante à son égard et dirige immédiatement les soupçons sur lui lorsqu’un vol est commis dans les vestiaires.
Notre avis : Dans le paysage très surveillé du cinéma de RDA du début des années soixante le film de Richard Groschopp Die Glatzkopfbande (La bande des têtes rasées : évitons le terme de skinhead, anachronique) avait suscité une vive polémique et rencontré un succès phénoménal en sortant des sentiers battus par son réalisme inhabituel. S’inspirant de faits divers, il abordait avec franchise et sans trop de précautions oratoires des thèmes sensibles, voire tabous, comme la délinquance juvénile, l’escalade de violence au sein d’un groupe ou les influences occidentales sur la jeunesse est-allemande.
Une suite, rapidement mise en chantier, devait s’intéresser à la réinsertion des membres de la bande (démantelée à la fin de Die Glatzkopfbande) après leur sortie de prison. Mais dans Entlassen auf Bewährung les références au premier film ont été finalement réduites à quelques allusions (comme le bref échange entre le héros et un jeune à moto croisé dans la rue et qui est évidemment une ancienne connaissance) pour ne conserver que le thème de la réinsertion sociale.
- ENTLASSEN AUF BEWÄHRUNG - Richard Groschopp (1965)
En RDA ce retour à une vie normale après une peine purgée était garanti par la loi et ne devait théoriquement poser aucune problème. Or le film montre que, même dans une société qui tente de mettre en pratique l’idéal socialiste, les choses ne sont pas si simples et que réflexes d’exclusion et préjugés entraînent, là comme ailleurs, des engrenages qui peuvent venir à bout des meilleures intentions.
Bien sûr, le film prend soin de montrer que le mécanisme qui manque (de peu) d’entraîner le protagoniste dans la voie de la vraie délinquance est en partie le résultat de survivances du monde ancien (par exemple les préjugés de classe de la mère de la jeune infirmière) ou de pernicieuses influences occidentales (le personnage immédiatement antipathique du codétenu, mêlé à des trafics louches avec l’ouest). Pourtant les auteurs évitent, dans une large mesure, de céder au schématisme outrancier auquel on pourrait s’attendre.
- ENTLASSEN AUF BEWÄHRUNG - Richard Groschopp (1965)
L’attitude hostile de la méchante sous-chef qui cherche un prétexte pour se débarrasser du jeune homme qu’on lui a imposé de prendre en charge dans son équipe est par exemple clairement expliqué par l’embarras dans lequel elle se trouve. C’est à elle en effet d’annoncer à un des imprimeurs qu’il doit céder sa place au nouveau venu plus qualifié.
On notera aussi qu’il n’y a pas vraiment de héros positif. Même la cadre de l’usine et l’ouvrier qui essayent de défendre Conny le font en évitant de trop se mouiller. Quant à la lueur d’espoir entrevue à la fin, elle n’est que le fruit du hasard (un gamin blessé qu’on doit emmener d’urgence à l’hôpital) et de l’amour surmontant les malentendus.
On est très loin d’un final édifiant qui verrait triompher la justice et les valeurs communistes de solidarité.
Réalisé avec un vrai savoir-faire et un sens sûr de l’efficacité dramatique, remarquablement écrit et interprété avec justesse (notamment par Heinz Klevenow Junior, qui a surtout fait carrière au théâtre, et la délicieuse Angelica Domröse, révélée par Slatan Dudow dans Verwirrung der Liebe en 1959), Entlassen auf Bewährung, bien qu’appartenant plutôt à la catégorie de ce qu’on appelle le Problemfilm, a les qualités d’un bon Krimi (film policier) et tient plutôt bien la route au-delà de sa valeur historique et de l’intérêt documentaire des nombreuses prises effectuées dans les rues de Berlin-est.
- ENTLASSEN AUF BEWÄHRUNG - Richard Groschopp (1965)
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