En attendant Violette - la critique du film

Copyright Cinéma Saint-André des Arts

Il serait facile d’éluder la fougue de Matthieu Maury et Warren Dupuy, duo de jeunes cinéastes dont En attendant Violette constitue le premier long-métrage. L’on pointerait à ce titre, au sein de ce dernier, une fragilité dans la mise en scène, le cadrage, et même par moment dans les effets de montage. Pour autant, ces approximations - signes d’une réelle spontanéité autant qu’indices d’un budget infime - ne sauraient travestir une certaine singularité dans l’écriture. À travers la trajectoire des apprentis scénaristes Greg et Jonas, adulescents écartelés entre leurs rêves de succès et leur insouciance, les deux réalisateurs semblent avoir articulé une mise en abyme de leur expérience personnelle. Sous cet angle, leur film devient dès lors le théâtre de leurs propres obsessions, le révélateur de leurs questionnements individuels. À la question de savoir si leur scénario doit ou non se structurer autour d’un sentiment amoureux ou d’un personnage étrange, les antihéros Greg et Jonas s’avèrent incapables de répondre à l’unanimité. Il n’empêche que leurs regards opposés doivent pourtant s’accorder. Qu’à cela ne tienne, ce déséquilibre se voit précisément incorporer tel quel dans l’intrigue du film En attendant Violette, qui oscille programmatiquement entre la comédie dramatique/romantique et le suspense. Comme si Matthieu Maury et Warren Dupuy partaient à chaque fois d’une interrogation palpable pour dessiner leur réalisation.

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Cette tendance auto-complaisante à tendre vers soi-même un miroir révèle un semblant de lucidité et même de détermination, mais ne déjoue pas cependant quelques faiblesses. À commencer par une symétrie trop évidente entre le jeu de dissimulation orchestré d’un côté entre les protagonistes principaux, de l’autre entre la fiction et le spectateur. Demeure néanmoins dans En attendant Violette ce bouillonnement atypique dont se parent quelquefois les premiers films. Une particularité liée à la propension des comédiens, souvent remarquables, à dépasser le canevas préétabli par le scénario - ici manifestement à travers l’improvisation, qui donne aux dialogues une véritable élasticité. Grâce à cette ambivalence, Matthieu Maury et Warren Dupuy échappent en partie à la tentation d’un schéma trop préconçu : ils brouillent ainsi la recette énoncée justement par Greg à la lumière d’un manuel de scénario écrit par John Truby - scénariste capitaliste incapable de voir en un script autre chose qu’un nécessaire conflit entre deux adversaires, débouchant sur une évolution morale. Certes, le cheminement se veut, en creux, également moral dans En attendant Violette : l’un des sujets prééminents, que l’on retrouve d’ailleurs rarement dans un film de vingtenaires, étant la fidélité. Toutefois, suspension et errances des personnages prévalent en définitive nettement sur une quelconque vérité dogmatique. À défaut d’être une révélation, ce premier essai se montre stimulant. De quoi pourquoi pas augurer de belles choses à l’avenir pour les deux comparses cinéastes.