Le 10 avril 2016
Un drame zulawskien, qui utilise brillamment les ficelles du fantastique, pour mieux évoquer les tourments de son héroïne et dresser le portrait d’une jeunesse perdue.
- Réalisateur : Akiz
- Acteurs : Carolyn Genzkow, Sina Tkotsch, Wilson Gonzalez Ochsenknecht
- Genre : Drame, Fantastique
- Nationalité : Allemand
- Durée : 1h32
- Festival : Hallucinations collectives
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Un drame zulawskien, qui utilise brillamment les ficelles du fantastique, pour mieux évoquer les tourments de son héroïne et dresser le portrait d’une jeunesse perdue.
L’ argument : Une jeune adolescente fêtarde voit sa vie changer du jour au lendemain suite à l’apparition d’une créature à laquelle elle est physiquement liée.
Notre avis :Réalisé par le plasticien allemand Akiz, Der nachtmahr (Le cauchemar) est un film surprenant, qui utilise les ficelles du fantastique pour dresser le portrait d’une jeunesse en perdition.
Ce long métrage suit une bande de jeunes à Berlin, et plus particulièrement Tina, passant la plupart de leur temps dans des raves party. A la manière de Zulawski (Possession), Der nachtmahr constitue une sorte de fable métaphorique où une créature est le réceptacle des tourments de l’héroïne.
Tina est une jeune fille ancrée dans la réalité d’aujourd’hui, constamment connectée sur les réseaux sociaux et traînant toujours avec la même bande – superficielle – d’amis, mais se sentant désespérément seule. La jeune adolescente ne trouve pas d’écho à ses diverses frustrations, et l’incommunicabilité est sans conteste l’une des thématiques majeures du film. A cet égard, Tina semble chérie par ses parents mais ceux-ci ne la comprennent pas et nient l’existence de la créature engendrée par leur fille, privilégiant plutôt l’hypothèse de la folie. Il en va de même pour les amis de Tina qui se moquent d’elle.
La créature n’est qu’une projection de Tina et ressent ses émotions, d’où une relation fusionnelle qui s’établit entre eux. De manière assez subtile, Akiz laisse planer le doute sur l’existence concrète de cette créature. Elle semble vivre uniquement dans la tête de Tina. Cela étant, cette créature va permettre à Tina de s’accepter telle qu’elle est vraiment, et de renaître. A cet égard, ce film est le début d’un triptyque, dédié à la naissance, avec comme suites attendues la vie en seconde partie et la mort pour terminer. On attend donc avec une certaine impatience ce que vont pouvoir donner les deux autres films de cette trilogie du plasticien d’Akiz.
Dans cet opus, le design de la créature est assez surprenant, oscillant entre celui d’E.T. et celui d’un animal de compagnie, avec de grands yeux très expressifs.
Dans un style qui lui est propre, Akiz développe des thématiques que ne renieraient pas Gus Van Sant ou Gregg Araki. Car mine de rien, il dresse le portrait sans fards d’une jeunesse allemande complètement perdue et détachée de la réalité. Quand on voit l’importance prise actuellement par les réseaux sociaux, la télé-réalité et autres choses qui peuvent apparaître comme futiles, le propos sonne juste et très contemporain.
Pour appuyer son propos, Akiz alterne des séquences stroboscopiques inspirées par le cinéma de Gaspar Noé sur une musique technoïde incessante et assourdissante et des scènes à la tonalité beaucoup plus clinique, traduisant le fossé entre le monde « virtuel » dans lequel évoluent les jeunes et la réalité plus froide.
Au niveau de la distribution, l’actrice principale, Carolyn Genzkow (qui a déjà tourné pour Akiz dans le film Frühling für anfänger, inédit chez nous) est remarquable. Elle interprète avec beaucoup de subtilité le rôle hanté de Tina.
Nanti d’un budget de seulement 100.000 euros, Akiz prouve que le talent permet de compenser le manque d’argent, et de proposer une expérience cinématographique inédite. Cette oeuvre insolite n’est pas loin d’être un coup de maître.
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