Le 6 mai 2024
Rythmé, foutraque et follement drôle, Comme un lundi offre une voix nouvelle au cinéma japonais, sous couvert d’une sévère critique d’une société aliénée par le travail, au détriment de l’épanouissement des personnes.
- Réalisateur : Ryo Takebayashi
- Acteurs : Makita Sports, Wan Marui
- Genre : Comédie
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Art House Films
- Durée : 1h23mn
- Titre original : Mondays
- Date de sortie : 8 mai 2024
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Résumé : Votre boss vous harcèle ? Vos collègues vous épuisent ? Vous ne voulez plus retourner au bureau ? Vous n’imaginez pas ce que traversent Yoshikawa et ses collègues ! Car, en plus des galères, ils sont piégés dans une boucle temporelle... qui recommence chaque lundi ! Entre deux rendez-vous client, réussiront-ils à trouver la sortie ?
Critique : C’est un bureau de travail, organisé en open space, où la jeune équipe de communicants tente de faire vivre un cabinet publicitaire, mené par un cinquantenaire, aussi maladroit qu’attachant. Tous les jours, un pigeon vient s’abattre sur la façade vitrée, témoignant en réalité du fait que les protagonistes sont embarqués dans une étrange boucle temporelle. Alors tout devient irrésistiblement prévisible : l’accident de circulation de l’héroïne principale, l’arrivée en fanfare du directeur, l’écrasement de sommeil des collègues. Pourtant, les exigences des clients se multiplient, en dépit d’un combat à mener, celui de sortir de cette impasse temporelle contre laquelle ils ne peuvent pas lutter.
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Comme un lundi est écrit sur un fond fantastique. En fait, l’ambition du premier film de Ryo Takebayashi est de dresser un huis clos grinçant et ironique sur les environnements de travail au Japon. Le réalisateur alterne des images de la cité assez semblable à ce qu’on connaît de la Défense à Paris, et un bureau plus que rabougri, où la lutte des générations se joue dans une pression insupportable d’objectifs à atteindre. Les clients ne prononcent jamais un mot de trop, ils sont pourtant capables de dérober sans vergogne les meilleurs collaborateurs de leurs concurrents et mettre fin à des contrats du jour au lendemain. Le réalisateur témoigne d’un capitalisme féroce, déshumanisé, qui a conduit, les quinquagénaires notamment, à perdre toute confiance en eux et se perdre dans des identités qui ne sont pas les leurs.
Comme un lundi est un film baroque, très original, assez éloigné de la filmographie habituelle issue de l’Empire nippon. Le film fonctionne par répétitions de situation qui s’amplifient peu à peu de la complexification de la narration. Le réalisateur convoque le manga qui non seulement interpénètre le récit mais en plus, élève la narration. On ne sait plus au bout d’un moment si le spectateur n’est pas plongé malgré lui dans une bande dessinée dont le rythme lui échappe. La répétition des scènes n’est jamais ennuyeuse, bien au contraire, car elle permet d’affiner la personnalité des personnages, embarqués dans un système de travail déshumanisé et insensé.
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Il y a beaucoup d’absurdité dans la tonalité du film. Ryo Takebayashi déforme la réalité sociale japonaise dans un espace clos qui peut paradoxalement survivre en déconnexion totale avec le monde qui l’entoure. Les ordinateurs semblent les seuls liens avec l’environnement, au point que les collègues de bureau oublient de rentrer chez eux, dorment sur leur lieu de travail, sans jamais se poser la question du sens de leur existence. Cette boucle temporelle apparaît donc comme une opportunité extraordinaire pour les contraindre à s’extirper d’un quotidien aliéné, irrespirable et absurde. On pense presque aux œuvres théâtrales de Beckett ou Ionesco qui, à leur manière, interrogeaient la bêtise du monde.
Comme un lundi souffre de quelques ellipses dans la narration qui nuisent à la compréhension du récit. Pour autant, cela demeure un numéro de claquettes cinématographiques, totalement hilarant et d’un rythme fou, comme une invitation à s’immobiliser et à commencer à réfléchir à ces gestes que l’on accomplit jour après jour au bureau ou ailleurs et qui nous empêchent de regarder le monde.
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