Le 23 novembre 2018
Un fort coffret tout entier consacré au peuple arménien, entre passé traumatisant et recherche d’identité. Le parti pris de témoignages rend l’ensemble souvent poignant.
- Réalisateurs : Serge Avédikian - Jacques Kebadian
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Editeur vidéo : Éditions Montparnasse
- Durée : 10h21mn
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– Sortie du coffret DVD : le 4 décembre 2018
Résumé : Témoignages de rescapés du génocide, parcours de vie d’exilés, mais aussi l’importance de la danse ou la peinture comme passerelle entre passé et présent... Ce coffret est comme un récit, unique sur le sujet, qui doit son existence à la volonté des enfants des survivants qui ont patiemment recueilli leurs souvenirs.
Le coffret contient :
– Mémoire arménienne, de Jacques Kébadian, Mireille Bardakdjian et Jean-Claude Kébadian (1993, 2h15mn).
– Sans retour possible de Jacques Kebadian et Serge Avédikian (1983, 1h36mn)
– Dis-moi pourquoi tu danses ? de Jacques Kébadian (2007-2015, 1h03mn)
– Que sont mes camarades devenus ? de Serge Avédikian et Jacques Kébadian (1984, 55mn)
– Vingt ans après de Jacques Kébadian (2002, 1h12mn).
Notre avis : Il y a les faits, connus, accessibles dans les livres d’Histoire. Et il y a les témoignages : Mémoire arménienne et Sans retour possible interrogent les survivants du génocide, précieuse parole recueillie pendant qu’il était encore temps : souvent poignants, chargés d’émotion, précis jusque dans les détails les plus improbables (le salaire pour 50 kg de haricots triés), ces récits racontent les violences subies de la part des Turcs, les insultes, les coups, les familles déportées ou tuées. Quelques images d’archives appuient cette mémoire, mais pour l’essentiel, c’est face caméra que ces vieilles personnes relatent leur calvaire. Tous disent les massacres, les pillages, ruptures brutales après une cohabitation sereine, avec des mots simples et évidemment douloureux. Pas de grande explication géopolitique, seulement des évocations.
Ceux qui parlent racontent aussi la difficile intégration, les camps, l’exploitation, le racisme ordinaire vécu en France, mais aussi la collaboration pour construire des maisons ou une église ou le changement après la guerre et l’engagement des Arméniens.
Poursuivis par une nostalgie tenace, incapables d’oublier, ces témoins restaient des étrangers habités par un héritage pesant : leur volonté de retourner dans leur pays s’étant heurtée aux chimères staliniennes à partir de 1947, il n’y avait pas d’alternative au déracinement définitif.
On regarde souvent les images le cœur serré, malgré des répétitions voire des reprises d’un film à l’autre. Plus que des documentaires, ces métrages sont des stèles mémorielles, indispensables édifices du souvenir.
Dis-moi pourquoi tu danses ? prolonge d’une autre manière la même réflexion, à partir de paroles de danseuses : leur art tient de la revendication identitaire, du cri libérateur. C’est encore de l’Histoire, mais de l’Histoire symbolique, et c’est encore de la mémoire. Moins émouvant que les précédents, ce documentaire n’en est pas moins intéressant pour découvrir un territoire inconnu, de l’entraînement au spectacle en passant par les coulisses. Où l’on voit que, même chez les jeunes, les questions de l’héritage et de la place dans la société française ne sont pas réglées.
Émotion encore avec ce retour en Arménie soviétique (Que sont mes camarades devenus ?), balade entre passé et présent dans une république dominée par une propagande dont on a quelques exemples savoureux. Le voyage tient pour nous de l’exotisme, sur un mode tendre et sourdement nostalgique. Pour autant, avouons que dans cette description du quotidien, le temps nous a paru un peu long.
Enfin, tourné à New-York, Vingt ans après part du film précédent (dont il reprend des scènes) pour relater le voyage et la vie d’une famille qui a quitté l’Arménie et vit aux États-Unis. Là encore le rythme indolent peut lasser, mais l’intégration de ces gens déracinés a de quoi fasciner, d’autant que, date oblige, les images sont de bien meilleure qualité. En superposant trois époques (dont la désastreuse année 1994, après tremblement de terre et guerre), le cinéaste montre sans pathos ni grand discours des êtres malmenés mais singulièrement courageux. Une leçon, en quelque sorte.
Les suppléments :
Avec le premier DVD, trois courts-métrages de Serge Avédikian (Bonjour Monsieur (10mn), Au revoir Madame (15mn) et M’sieur Dames (14mn) rejouent de manière drolatique des situations caricaturales reposant sur la difficulté d’être arménien en France. Plus amusant que réellement maîtrisé. Sur la troisième galette, ce sont des films de Jacques Kébadian : Colombe et Avedis (36mn) est le récit sous forme d’enquête d’une émouvante histoire d’amour qui a duré 57 ans et embrassé l’histoire dramatique de l’Arménie ; plus récent, L’atelier de Jacques Aslanian (13mn) peut se voir comme un art poétique à partir de quelques toiles.
Le dernier disque est tout entier consacrés aux bonus, c’est à dire à d’autres courts-métrages proposant de nouveaux éclairages. Les deux premiers sont des montages sans commentaires sur les conséquences du tremblement de terre, en 1988 (Lux Aeterna,11mn) et en 1998 (Terra Emota,10mn). Toujours pas de son éclairant le trajet puis la rencontre du grand cinéaste (Paradjanov libéré – Tiflis décembre 1982, 12mn). Deux autre films s’attardent sur des tableaux, soit en caméra se promenant sur les toiles, (Buvards, 8mn), soit en observation attentive dans l’atelier (Lousnak et Jansen, 12mn). Les cinq sœurs (21mn) rappelle davantage les longs-métrages par l’évocation de souvenirs lointains, comme Arménie 1900 (13mn30), belle lecture illustrée. Enfin, 12 jours en Arménie (22mn) est un film brut et un peu long sur un voyage effectué en 1973.
L’image :
On est très loin des canons actuels : la définition est souvent médiocre, les couleurs bavent un peu et des parasites intermittents s’invitent plus ou moins selon les films. Rien de rédhibitoire cependant, au vu de l’intérêt du coffret.
Le son :
Là encore, entre acidités, confusions et de rares interventions difficilement audibles, les bandes-son ne sont pas au top, avec cependant des disparités importantes selon les dates de tournage et les conditions d’enregistrement.
Galerie photos
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