L’enfer, c’est la fête !
Le 17 juin 2015
- Réalisateur : Gianfranco Parolini
- Acteurs : Gianni Garko, Margaret Lee, Aldo Canti, Salvatore Borghese
- Genre : Film de guerre
- Nationalité : Italien
- Editeur vidéo : Artus films
- Durée : 92 min
- Titre original : 5 per l'inferno
- Date de sortie : 5 août 1969
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Produit de son époque, Cinq pour l’enfer est une joyeuse série B qui tient autant du film de guerre que du western ou du cartoon. Explosions, fusillades et acrobaties sont au programme de ce divertissement dynamique qui confronte deux monstres sacrés du cinéma de genre italien : Gianni Garko et Klaus Kinski.
L’argument : Italie. 1944. Un commando spécial de soldats américains est formé pour mettre la main sur des plans ennemis. Dirigée par le lieutenant Hoffmann (Gianni Garko), la troupe doit investir une villa qui sert de QG aux Nazis. Ils vont devoir faire face au colonel Mueller (Klaus Kinski), officier SS d’une cruauté glaciale.
Notre avis : Si Deux salopards en enfer tirait son originalité de sa confrontation entre une vision désabusée de la guerre et un symbolisme catholique, le deuxième film de la nouvelle série d’Artus consacrée aux films de guerre italiens est bien différent. L’intrigue elle-même est sommaire et tout se concentre sur l’action et l’aventure. On pourrait d’ailleurs résumer le film en une seule phrase : un commando de cinq militaires surentrainés prennent d’assaut la Villa Verde, QG des nazis, pour récupérer le Plan K qui se trouve dans un coffre fort et déjouer leurs plans d’attaque. Le pitch pourrait d’ailleurs être celui d’un jeu vidéo, et quand on entend les bruits grotesques avec lesquels sont doublés les bagarres, on se dit qu’on a sûrement plus à faire à un cartoon qu’à un film de guerre. Les GI américains sont chacun recrutés selon leur spécialité : un génie des explosifs, un acrobate champion de trampoline (!), un spécialiste des coffres-forts ou encore un as du lancer de balles (!). On se croirait dans une série télévisée du style Mission impossible ou L’Agence tous risques, mis à part qu’on ne laisse pas vraiment le temps aux personnages de développer une vraie psychologie. On reste d’ailleurs tellement à la surface que quand certains d’entre eux meurent, on y fait à peine attention.
Film de divertissement grand public, Cinq pour l’enfer n’en est pas moins tordu. À tant flirter sur le registre de la comédie d’action, le long métrage en oublie presque l’ "enfer" dont il est fait référence dans le titre, si ce n’est quelques petits rappels dans la deuxième partie du film (le peloton d’exécution) et le personnage du colonel Hans Mueller campé par Klaus Kinski, toujours sublime quand il s’agit de jouer un être cruel et d’endosser l’uniforme nazi. Étonnamment, son rôle est assez effacé et ne déborde jamais, associé à son désir pour l’espionne Helga Richter (Margaret Lee). On sent que ses minutes à l’écran sont comptées et que c’est le pactole qu’il a empoché en cash qui l’a motivé à s’embarquer dans cette aventure. Du coup, malgré le côté bon enfant, Cinq pour l’enfer se révèle presque plus problématique que la vague de nazisploitation qui allait exploser dans l’Italie des années 1970. D’ailleurs, le scénariste Sergio Garrone se reconvertira dans le genre quelques années plus tard avec Horreurs nazies (1976) et Roses rouges pour le Führer (1977). Au moins dans ces films crapuleux, l’horreur et la cruauté de la guerre ne sont pas mises de côté, même si c’est pour couvrir un érotisme malade. Ici, ce contexte tragique est presque nié pour ne tout résumer qu’à une suite de coups de poing, de fusillades et de cascades. La guerre c’est presque la fête pour ces hommes avides d’aventure et d’adrénaline. Le seul personnage qui ressent de l’angoisse et de la tension, Johnny White (interprété par Luciano Rossi) n’est-il pas appelé "Chicken" pour la poule mouillée qu’il est et considéré comme un lâche ? Car oui, Cinq pour l’enfer est un film de gros bras et de mecs qui en ont dans le pantalon. Il n’est donc pas surprenant de retrouver au casting l’athlétique champion de lutte Samson Burke, colosse qu’on avait déjà croisé dans plusieurs péplums.
Comme pas mal de films de cette époque, le modèle reste Les Douze salopards (1967) de Robert Aldrich qui ici flirterait avec les super-héros des bandes dessinées. Mais en basant tout sur l’action, Gianfranco Parolini ne permet pas à son casting de choix d’exprimer vraiment son talent et ce matraquage de scènes spectaculaires se révèle vite assez vide et rébarbatif, d’autant plus que l’accompagnement musical ne fait vraiment pas dans la finesse. De toutes façons, quoi attendre de plus d’un film où les casse-cous se baladent avec un trampoline sous le bras ? Ne cherchez pas la réalité historique dans cette bobine ! Sans être vraiment comique non plus, le métrage mêle assez d’ingrédients pour en faire un succès populaire, ce qu’il a été. Curd Ridel nous explique dans le bonus DVD que le film est resté un an à l’affiche dans le plus grand cinéma de Tel Aviv. Comme souvent pour ces grands spectacles, toute profondeur est absente et on finit par les oublier aussitôt après les avoir vus. Le spectateur se doit de se mettre du côté des gentils - même s’ils trucident pas mal d’allemands sur le passage - et de détester les affreux nazis. Le schéma est simpliste au possible, pourtant cela nous permet de décerner les filons du cinéma populaire de l’époque et de retrouver pas mal de gueules du cinéma bis (Aldo Canti, Salvatore Borghese et surtout Gianni Garko, le fameux "Sartana", qui interprète ici le lieutenant Glenn Hoffmann). Du coup, encore une fois, Artus fait un travail remarquable pour déterrer des films tombés aux oubliettes et qui, chacun à leur manière, nous en révèlent un peu plus sur l’Italie de l’époque et ses goûts en matière de spectacles.
Au final, Cinq pour l’enfer n’est pas plus un film de guerre qu’une comédie acrobatique du style slapstick mêlée à des éléments de western et de cartoon. Hésitant dans le ton à tenir, le métrage, comme pas mal d’autres films de guerre transalpins tournés à cette époque, manque de violence, de lyrisme, de sadisme, de cynisme et de tous les ingrédients qui ont nourri le culte des autres genres populaires du cinéma italien. N’ayant peur ni de l’exagération ni du ridicule, Parolini propose néanmoins des scènes d’action musclées et survitaminées et nous permet le temps d’une heure et demi de nous mettre dans la peau du spectateur lambda de ce genre de spectacles populaires datés.
Les suppléments
En bonus du film, nous sont proposés un diaporama, ainsi que les bandes annonces des deux films de la nouvelle collection d’Artus sur le cinéma de guerre. Mais évidemment, l’intérêt vient de l’entretien avec l’habitué Curd Ridel, qui laisse les étagères de livres et de DVDs de côté pour un décor plus champêtre. Intitulé "Le commando des spécialistes", ce document de vingt-sept minutes en caméra fixe permet de revenir sur la carrière de chacun des acteurs du film ainsi que sur le réalisateur, surtout doué pour le spectaculaire, comme Cinq pour l’enfer en témoigne.
Image & Son
En termes d’images, il faut préciser que durant certains passages la pellicule devient floue alors qu’à d’autres moments la photographie est impeccable. Ces petits défauts sont très rares et ne gênent en rien le visionnage. Le film est, comme d’habitude, proposé en version française et en version originale italienne sous-titrée. On préfèrera d’ailleurs la version française, très agréable à suivre, et avec un mixage plus réussi à notre goût.
Galerie Photos
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