Le 30 septembre 2021
Le portrait sans fard d’une jeune fille déterminée à s’affranchir des lois de parents trop bien intentionnés.
- Réalisateur : Kamir Aïnouz
- Acteurs : Amira Casar, Lyes Salem, Zoé Adjani, Louis Peres
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Belge, Algérien
- Distributeur : Paname Distribution
- Durée : 1h40mn
- Date télé : 11 août 2022 21:00
- Chaîne : OCS City
- Date de sortie : 6 octobre 2021
- Festival : Festival de Venise 2020, Les Arcs Film Festival 2020, Festival du film de Cabourg 2021, Festival du Film Francophone d’Angoulême 2021
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Résumé : Selma, 17 ans, vit dans une famille berbère et laïque, à Neuilly-sur-Seine, en 1993. Lorsqu’elle rencontre Julien, un garçon provocateur, elle réalise à quel point les diktats du patriarcat contrôlent son intimité. Alors que Selma décide de découvrir la puissance et les dangers de son propre désir, l’équilibre de sa famille se fissure et la terreur du fondamentalisme émerge dans son pays d’origine.
Critique : Se jetant goulûment dans l’écriture et la réalisation de ce premier film, la réalisatrice Kamir Aïnouz embrasse plusieurs sujets : les relations familiales, l’appartenance à une double culture, la guerre civile en Algérie dans les années 90 et enfin, la place de la femme dans la culture algérienne observée par le prisme d’une relation mère-fille fusionnelle qui se déconstruit peu à peu pour divergence de points de vue, dont celui de la sexualité féminine mise sous séquestre au nom de principes moraux d’un autre âge.
Dès le générique de début, les graphiques évocateurs du sexe féminin alternant avec les images d’une jeune femme langoureusement étendue sur le sable ne cachent rien des intentions de la réalisatrice. Un peu plus loin, la dégustation boulimique par Selma (Zoé Adjani) de cette pâtisserie orientale chargée de symbolique sexuelle qu’est le cigare au miel suggérant une compensation alimentaire face au plaisir sexuel interdit le confirme.
- Copyright Eliph Willow
Entre un père avocat (Lyes Salem) et une mère médecin (Amira Casar), Selma a grandi dans une famille riche issue de la haute bourgeoisie berbère installée en France. Elle a reçu une éducation stricte. Pour ses parents, attentifs mais étouffants, la priorité, ce sont les études. Ensuite, le mariage avec un garçon issue d’une famille du même standing que la leur. Si Selma revendique haut et fort sa double culture, elle n’hésitera pas à outrepasser les limites imposées. Elle fréquente une école de commerce où elle obéit aux rites établis (même les plus vulgaires) et ses rapports avec les garçons sont libres. Mais une fois bien calfeutrée dans le confort du chic appartement de ses parents, elle cache soigneusement cet aspect de jeune fille sexuellement affranchie. Car finalement, le véritable enjeu est la préservation de la virginité de Selma, dont elle décidera de se débarrasser elle-même lors d’une scène où la violence du geste est adoucie par la tendresse dont la réalisatrice l’entoure. Cette défloration signe pour la jeune fille le début de l’émancipation mais ne marque pas pour autant sa renonciation totale aux principes sociaux de ses parents. Une manière forte de confirmer sa double identité. A ce titre, elle accepte de rencontrer Luka, issu d’une famille de banquiers. Pourtant, le jeune homme bien sous tous rapports ne fera pas preuve d’un comportement exemplaire.
- Copyright Eliph Willow
Puis, brusque changement de tonalité et de décor. Direction la Kabylie des années 90, où la lumière et la nature apportent un autre regard vers le monde en même temps qu’une véritable bouffée d’oxygène malgré les attentats toujours latents. La découverte de ses racines, du sort réservé aux femmes et la rencontre avec sa grand-mère permettent à la jeune fille en quête d’identité de tisser le maillage de sa filiation mais surtout d’harmoniser toutes ses références contradictoires et de comprendre enfin comment mener efficacement cette lutte contre un système patriarcal qu’elle rejette.
- Copyright Eliph Willow
Si elle est bâillonnée par une mise en scène trop sage qui l’empêche de prendre toute son ampleur, l’histoire perd également de sa force à vouloir traiter d’un trop grand nombre de sujets. Mais elle est largement éclairée par la présence de Zoé Adjani. De toutes les scènes, sa justesse de ton donne de beaux accents de vérité à cette jeune fille caméléon dont elle distille la moindre nuance. Judicieusement entourée de Lyes Salem qui, entre tendresse et autorité, campe un père universel et attachant, et d’Amira Casar qui prouve une fois de plus qu’elle évolue avec autant d’aisance au cœur du drame que de la comédie, elle se révèle d’une générosité émouvante. Pas totalement abouti, Cigare au miel se classe néanmoins honorablement parmi les multiples témoignages cinématographiques autour de l’émancipation féminine ici ou là-bas.
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