Le 14 octobre 2019
Un mélodrame engagé, qui délivre un message très net sur une Allemagne alors déchirée. Quelques concessions au genre n’entament pas la pertinence du propos.


- Réalisateur : Helmut Käutner
- Acteurs : Horst Buchholz, Eva Kotthaus , Georg Thomalla
- Genre : Drame
- Nationalité : Allemand
- Distributeur : Europa-Filmverleih GmbH
- Date télé : 14 octobre 2019 20:55
- Chaîne : ARTE
- Titre original : Himmel ohne Sterne

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Résumé : Après la Seconde Guerre mondiale, dans l’Allemagne des années 1950, Anna Kaminski, jeune veuve d’un mari mort à la guerre, résidente dans la Thuringe en RDA, a été séparée de son jeune fils élevé par ses grands-parents en RFA. Elle passe illégalement le rideau de fer pour aller régulièrement voir son fils qui se trouve à seulement quelques kilomètres en Bavière et voudrait l’avoir toujours auprès d’elle. Elle fait la connaissance de Carl Altmann, policier affecté à la surveillance des frontières, et ils tombent réciproquement amoureux. Carl décide d’aider Anna à faire rentrer son fils en passant par la ligne de chemin de fer
Notre avis : L’amour n’a pas de frontières, c’est bien connu. Or, ici, la partition de l’Allemagne en deux pays provoque les malheurs des protagonistes : d’abord celui d’Anna Kaminski qui se jette courageusement à l’eau pour passer du côté de la RFA, où se trouve son fils élevé par ses grands-parents. Au péril de sa vie, elle le soustrait à une tutelle familiale dont l’existence lui est insupportable. Or, si elle parvient à ses fins en ramenant l’enfant de l’autre côté, elle ne sait pas que la fatalité s’acharnera sur elle, comme elle accablera le policier (Carl Altman) qui s’éprend de cette veuve aux yeux tristes. Le jeune homme aux intentions généreuses le paiera évidemment cher.
Devisant sur la configuration politique de l’Allemagne, Carl livre ses vues à son supérieur, alors que celui-ci, ayant eu vent de sa complicité dans l’enlèvement de l’enfant, lui signifie qu’il est renvoyé. Son propos, amer, s’honore d’une expertise particulièrement audacieuse pour l’époque, qui renvoie dos à dos capitalistes et communistes, parce qu’au nom d’une adhésion à une idéologie, des individus sont empêchés de vivre et de s’aimer librement. La démonstration par l’exemple du terrible déchirement que vivent les Allemands, emporte des personnages qui ne trouvent jamais leur place, passant symboliquement de l’un et l’autre côté de la frontière, les allers-retours répétés signifiant aussi que les événements peuvent basculer d’une manière favorable ou défavorable. Les deux protagonistes finissent par se trouver un abri dans un no man’s land qui n’est, par définition, aucun pays.
Trop rapidement, on les croit tirés d’affaire, lorsqu’ils sont parvenus à leur fin : mais le rejet que subit le fils d’Anna, déguisé en Indien, considéré comme un yankee par ses autres petits camarades, est déjà une alerte. Rien n’ira, parce que rien ne doit aller, tant que cette guerre froide fixera des identités insécables auxquelles sont assignés des parcours individuels. Le beau message que porte ce film courageux fait oublier une mise en scène parfois conventionnelle, qui s’alourdit de quelques clichés propres au mélodrame.