Turin 1906
Le 1er février 2014
Ce très beau mélodrame, évocation nostalgique de l’Italie des débuts du vingtième siècle, surprend par la variété de sa palette et sa tonalité profondément mélancolique.
- Réalisateur : Goffredo Alessandrini
- Acteurs : Anna Magnani, Elisa Cegani, Enrico Viarisio, Amedeo Nazzari, Silvana Jachino
- Genre : Historique, Mélodrame
- Nationalité : Italien
- Durée : 1h28mn
- Titre original : Cavalleria
- Date de sortie : 20 août 1937
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– Année de production : 1936
Ce très beau mélodrame, évocation nostalgique de l’Italie des débuts du vingtième siècle, surprend par la variété de sa palette et sa tonalité profondément mélancolique.
L’argument : Turin au début du vingtième siècle. Umberto Solaro, officier de cavalerie , aime Speranza , la fille d’un noble piémontais. Mais celle-ci , bien qu’amoureuse d’Umberto , épouse un diplomate autrichien pour sauver son père de la ruine financière.
Devenu un des champions d’équitation de l’armée italienne , Umberto retrouve Speranza quelques années plus tard à Rome . Les commérages suscités par leurs rencontres amènent le frère de la jeune femme à se battre en duel .
Après avoir lu la lettre d’adieu de Speranza Umberto fait une chute qui cause la mort de son cheval fidèle Mughetto . Pendant la guerre il devient un as de l’aviation et meurt lors d’une opération militaire.
- Anna Magnani - Cavalleria
Notre avis : S’il a tourné quelques films après 1945, dont une vie d’Anita Garibaldi (Camicie Rosse , 1952) interprétée par son ex-épouse Anna Magnani, le nom du cinéaste Goffredo Alessandrini est avant tout lié à ce qu’on appelle en italien il cinema di regime, c’est à dire la production de l’époque fasciste dont il a été un des artisans majeurs, réalisant aussi bien des comédies sentimentales (Seconda B, réputé excellent) que des films relevant ouvertement de la propagande religieuse Abuna Messias ou politique Luciano Serra pilota.
Distingué à la Mostra Internazionale d’Arte Cinematografica di Venezia de 1936, Cavalleria célèbre lui aussi les valeurs militaires et patriotiques. Pourtant la tonalité générale du film est bien peu guerrière et on sera frappé par l’absence totale de grand discours et de grandiloquence triomphaliste , même, et surtout, dans les séquences finales se déroulant pendant la Première Guerre mondiale.
Sans le remettre explicitement en question le film mine en quelque sorte le message nationaliste qu’il contient, faisant clairement apparaître le dévouement de son héros à l’armée et son sacrifice à la patrie comme un second choix, une manière de compenser le renoncement douloureux et jamais totalement accepté à l’union avec la femme aimée.
Une exquise morbidezza, une douceur empreinte de tristesse voilée, imprègne de bout en bout un film gagné peu à peu par l’incurable mélancolie des vies manquées. Pourtant l’évocation nostalgique de la Turin et de la Rome des premières années du vingtième siècle n’est pas exempte de touches pittoresques (dont une apparition non créditée de la Magnani en chanteuse de caf’conc) et même comiques.
- Cavalleria (Goffredo Alessandrini 1936)
Mais c’est le souci d’exactitude documentaire, pré-viscontien, qui frappe, aussi bien dans tout ce qui a trait au monde de l’équitation que dans la peinture de société. Le cinéaste jette un regard acéré, dénué de complaisance, sur un milieu qu’il filme en vrai, faisant figurer d’authentiques membres de la noblesse dans des palais non reconstitués en studio.
La scène où, après que leurs routes se soient à nouveau croisées, les deux protagonistes se donnent rendez-vous lors d’un concert dans le grand monde est particulièrement éloquente, un superbe et très long panoramique scrutant les visages de la noble assistance bien plus attentive aux échanges chuchotés du couple qu’à l’exécution musicale en cours. La scène, animée d’un humour discret et caustique, est d’un authentique grand cinéaste, tout comme les merveilleuses séquences à la campagne, quasi renoiriennes, qui évoquent irrésistiblement la peinture impressionniste ou celle des Macchiaioli, notamment les toiles de Silvestro lega , cet hommage pictural s’appuyant sur le travail exceptionnel du grand chef opérateur Václav Vich.
La direction d’acteur est elle aussi admirable et jamais plus Amedeo Nazzari et Elisa Cegani, presque débutants ici, ne retrouveront cette justesse d’un jeu comme en sourdine, dénué de toute emphase déclamatoire.
Plus encore que le fameux diptyque Noi vivi - Addio Kira ! (1942), magnifique mais à la noirceur un peu trop uniformément sublime à notre goût, ce très beau film permet à Goffredo Alsessandrini de déployer la variété de sa palette de couleurs et d’émotions, révélant le talent et la sensibilité d’un cinéaste à redécouvrir.
- Cavalleria de Goffredo Alessandrini
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