Le 11 octobre 2022
Une œuvre puissante et sans concession qui regarde la tragédie de la guerre ukrainienne à travers les familles restées dans les villes et le retour des soldats du front, broyés par le traumatisme. Un choc.
- Réalisateur : Maksim Nakonechnyo
- Acteurs : Rita Burkovska, Natalya Vorozhbit, Daria Lorenci, Lyubomyr Valivots
- Genre : Drame
- Nationalité : Tchèque, Croate, Ukrainien
- Distributeur : Nour Films
- Durée : 1h47mn
- Titre original : Bachennya metelyka
- Date de sortie : 12 octobre 2022
- Festival : Festival de Cannes 2022, Festival de La Rochelle 2022
L'a vu
Veut le voir
– Sélection officielle Cannes 2022 : Un Certain Regard
Résumé : Dans le Donbass. Une femme soldat, dont le nom de code est Butterfly, est échangée après deux mois de capture. Arrivée chez elle, elle tente de se remettre de ses traumatismes et découvre qu’elle est enceinte de son geôlier qui l’a violée. Avant l’avortement, elle commence à douter...
Critique : On est abreuvé d’images d’Ukraine sur les écrans de télévision du matin au soir, réduisant la guerre à une série d’explosions qui amputent les villes et les campagnes. Les soldats sont parfois vus furtivement, dans leur véhicule ou sur le front. On ne pense pas à ces centaines de femmes et d’hommes qui sont enlevés par les séparatistes russes et font l’objet de tractations funestes entre la Russie et l’Ukraine. Lilia est de ceux-là. Elle a été capturée par des séparatistes en plein Donbass. Elle revient auprès des siens, avec un corps défait, des cicatrices profondes à la place des tatouages qui habillent ses bras et son dos. Elle revient surtout avec des cauchemars pleins les yeux, et un ventre rond d’un enfant qui a été conçu en captivité.
- Copyright Nour Films
Tout est dit. Butterfly Vision n’est pas un simple film sur la guerre. C’est un rappel solennel que la guerre abat les hommes, mais qu’elle se révèle encore plus monstrueuse à l’égard des femmes. En plus d’être soldats, elles sont la proie de toutes les perversités humaines, leur corps étant convoité pour la jouissance macabre qu’il augure chez l’ennemi.
Mais Maksim Nakonechnyo ne fait pas un film partisan. Il adopte un point de vue très digne, très dépouillé, jusqu’au choix d’une image sombre, sans filtre. Les examens médicaux que la jeune femme subit sont regardés de loin, derrière un panneau, comme s’il ne fallait pas répéter l’outrage que son corps a déjà subi. Le passé monstrueux de la jeune femme ressurgit par saccades, mais le réalisateur refuse d’ostraciser les tortures qu’elle a connues. La suggestion est la voie la plus appropriée pour dessiner les contours de l’indignité, de l’inhumanité et de l’ignominie. Maksim Nakonechnyo ne rajoute pas du drame au drame. Il regarde son personnage avec ses démons, ses blessures ; il la tient à distance de la caméra, comme si, à travers la comédienne magnifique qui incarne ce personnage brisé, il fallait encore plus de recul et de respect pour envisager les corps féminins.
Butterfly Vision est beaucoup plus qu’un film de cinéma. C’est une œuvre qui témoigne de toutes les blessures laissées par la guerre et de la difficulté, voire l’impossibilité de retrouver une existence paisible. Le nationalisme et le racisme contre les communautés Roms se mêlent à ce récit tragique, rappelant à nos consciences que la ligne du bien et du mal est de loin aisée à tracer.
- Copyright Nour Films
Galerie photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.