Le paradis perdu
Le 6 mars 2007
Au-delà de l’étonnant numéro d’acteur de Jean-Paul Rouve, un film résolument atypique, mais pas toujours convaincant.
- Réalisateur : Stefan Liberski
- Acteurs : Jean-Paul Rouve, Francois Vincentelli, Audrey Marnay
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Français, Belge
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– Durée : 1h47mn
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Au-delà de l’étonnant numéro d’acteur de Jean-Paul Rouve, un film résolument atypique, mais pas toujours convaincant.
L’argument : Sympathique et fauché, Mimmo rêve d’être riche et célèbre, mais pour l’instant il est chauffeur de taxi. Un soir, il rencontre John Deveau, un homme riche qui l’entraîne dans un monde de luxueuses fêtes entre nantis. Sous le charme et se croyant arrivé, Mimmo pense alors que ce milieu veut de lui. En réalité, il tombe dans le piège pervers que lui ont tendu John et sa petite bande pour s’amuser.
Notre avis : La "décadanse" du XXIe siècle se fera sur fond de techno, ici scandée à tour de film, étouffée par les murs de béton du bunker-titre, répétition maladive et lointain écho d’un mal-être persistant. Un Bunker paradise en forme de terrain de jeu d’un dandy cynique et sadique, maître de cérémonie de ce théâtre de l’arbitraire. Clope au bec et veste noire, Jean-Paul Rouve s’en donne à cœur joie avec ce personnage ivre de lui-même, mais touchant derrière son masque détestable de jouisseur immoral. Un Gainsbarre encore un peu Gainsbourg à la présence détonante. De quoi faire passer la pilule d’un scénario convenu qui se contente de rejouer la bonne vieille opposition riche-pauvre, avec tout ce que ça implique de rapport de force et de réflexion sur le pouvoir corrupteur de l’argent.
En trublion un poil irrévérencieux, Liberski n’oublie pas de soigner son cadre, un atypique bunker banlieusard, en l’occurrence. Un univers borderline où se retrouve catapulté un chauffeur de taxi, "wannabe" acteur, héros d’infortune un peu pâlot.
On l’a vu avec Hell, le désespoir de la jeunesse dorée passe par l’absence du père, ici réduit à quelques apparitions d’un pervers pince-sans-rire.
Les contrastes sont soulignés par un montage qui se plaît à jouer de la rupture, en injectant des scènes racontant l’énigmatique escapade d’un jeune garçon au Japon, convoquant une poésie zen et contemplative chère au Kitano des grands jours. On peut tout de même s’interroger sur la pertinence de telles séquences qui, si elles fonctionnent d’un point de vue purement rythmique (fournissant un étonnant contrepoint à l’agitation du bunker), donnent la désagréable impression de parasiter le récit principal et d’amoindrir son impact. Bunker paradise fourmille de ce genre de détails insolites, parfois superflus.
Pourtant, la mise en scène de Liberski fait preuve d’une certaine classe, un peu poisseuse, qui reflète finalement bien la mélancolie mortelle qui se dégage de cette jeunesse brûlée, comme anesthésiée et condamnée à un éternel surplace. Jusqu’à une partie de chasse qui, comme chez Bilal [1], se chargera d’éclairer, de sa lumière blanchâtre, les motivations des protagonistes, levant le voile sur ce film attachant dont on aurait aimé qu’il soit plus abouti.
[1] Voir sa BD, fondatrice, Partie de chasse
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