Le 10 janvier 2018
Un documentaire attachant et subtil sur deux sœurs d’une famille yéniche, qui confirme le talent de la réalisatrice Marie Dumora.
- Réalisateur : Marie Dumora
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Distributeur : New Story
- Durée : 1h47mn
- Date de sortie : 10 janvier 2018
- Festival : Festival de Cannes 2017
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Résumé : Belinda a 9 ans. Elle aime la neige, la glace pour glisser, plus encore sa sœur avec qui elle vit en foyer. On les sépare. Belinda a 15 ans. Pas du genre à vouloir travailler dans un magasin de chaussures, en mécanique à la rigueur. Belinda a 23 ans, elle aime de toutes ses forces Thierry, ses yeux bleus, son accent des Vosges. Elle veut se marier pour n’en être jamais séparée. Coûte que coûte.
Critique : Marie Dumora avait signé une trilogie documentaire dans laquelle elle filmait déjà une famille yéniche (branche de la communauté tzigane) dans l’Est de la France : Avec ou sans toi (2002), Emmenez-moi (2004) et Je voudrais aimer personne (2010). Belinda en est le prolongement. En 2000, à l’occasion d’un tournage, la réalisatrice avait rencontré Belinda, une fillette solaire et joyeuse qui vivait avec sa sœur Sabrina dans un foyer d’enfants abandonnés, et avait souhaité en faire le point de départ d’une série documentaire. Si le dernier volet était axé sur Sabrina, le présent film se focalise sur Belinda à trois étapes de sa vie. Les trois segments n’ont pas la même durée : le premier semble un prologue, le second dure une quinzaine de minutes, le reste du film étant centré sur la jeune adulte. Voilà un documentaire exaltant et émouvant, qui transcende la tonalité naturaliste du contenu pour proposer un beau témoignage d’espérance et d’humanité, tout en renouvelant le genre. On s’attache très vite à Belinda, mi-Cosette, mi-Paulette Goddard dans Les Temps modernes et à son côté space compensé par une réelle sincérité, même si la jeune femme n’est pas, loin s’en faut, un modèle d’intégrité. En effet, une ellipse inattendue amènera plusieurs scènes sans Belinda : on apprend alors qu’elle séjourne quatre mois en taule pour avoir racketté des passants avec un uniforme de policière, et ce afin de financer ses frais de mariage…
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Mais Belinda fait tout pour être solidaire de ses parents défaillants et fragiles, qui ont jadis été dans l’impossibilité de l’élever, et de sa famille proche et éloignée. La pratique religieuse donne un sens à son existence, et l’amour qu’elle éprouve pour un délinquant récidiviste illettré témoigne de sa combativité. Le film n’a pas la patte lourde sur les thèmes sous-jacents : « Je ne voulais pas […] réduire son histoire à son ancrage sociologique, à un cas », a déclaré la réalisatrice. Elle aborde pourtant frontalement, au même titre que Spartacus et Cassandra de Ioanis Nuguet, certains sujets de société, comme la précarité d’emploi, le cercle vicieux de l’exclusion, le déterminisme social ou la stigmatisation dont sont victimes des communautés. Mais l’essentiel est ailleurs : dans ces dialogues maladroits entre Belinda et Thierry, dans le souvenir d’une tragédie familiale et historique à travers la photo des grands-parents, ou dans ce plan d’un bain solitaire, illustré par la chanson d’Adamo « Tu ne viendras pas ce soir ». Quant à l’idée de filmer Belinda et Sabrina sur plusieurs années, elle n’est pas sans évoquer la démarche de l’excellent documentaire télévisé Que deviendront-ils ? de Michel Fresnel, des films de Lola Pinell et Chloé Mathieu (Kiss & Cry), mais aussi et surtout de belles fictions de cinéma : la série des Antoine Doinel de François Truffaut, ou Boyhood de Richard Linklater.
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