Le 10 novembre 2015
Un film compassé, qui vaut davantage comme témoignage d’une époque que pour son histoire et sa mise en scène.
- Acteurs : Jean Murat, Maria Casarès, Roger Pigaut, Henri Calef
- Genre : Drame, Noir et blanc
- Editeur vidéo : M6 Vidéo
- Durée : 1h35mn
- Date de sortie : 5 novembre 1948
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– Sortie DVD : le 28 octobre 2015
Un film compassé, qui vaut davantage comme témoignage d’une époque que pour son histoire et sa mise en scène.
L’argument : Carmelle est une servante de ferme, mais aussi un femme magnifique. Elle parvient à charmer un riche fermier sous les conseils de celui qu’elle aime et devient la légatrice du propriétaire.
Notre avis : Cinquième film d’ Henri Calef, alors en plein succès public, Bagarres est un film à l’esthétique soignée, au noir en blanc subtilement travaillé. Le jeu sur les ombres portées, l’alternance entre les intérieurs oppressants et les plans d’extérieurs provençaux, les cadrages précis, tout donne une idée de ce qu’était la fameuse « qualité française ». En suivant le parcours d’une femme dans un milieu paysan, le scénariste André Beucler et le cinéaste dessinent le portrait d’une humanité noire, habitée par les désirs et la cupidité : il y a le propriétaire aussi riche qu’ ignoble , Carmelle qui entre à son service pour attiser sa libido et en profiter, et toute une galerie de personnages secondaires qui jouent le rôle de commentateurs perfides ou bienveillants. On remarquera la gouaille de Mouloudji ou la surprenante composition de Jean Vilar en idiot du village. Mais c’est tout un pan du cinéma français que Calef utilise, dont des habitués de Pagnol, Poupon ou Demasis.
Le cinéaste excelle dans quelques scènes lyriques (la chasse au sanglier comme moment de pulsions irrépressibles) mais il y a également des subtilités réjouissantes ; ainsi Carmelle se regarde-t-elle à plusieurs reprises dans un miroir dont le sens change selon ses états d’esprit, jusqu’à son reflet déformé dans une casserole quand elle a cédé.
Tout n’est cependant pas de la même eau : le jeu des acteurs est très hétérogène, les dialogues par moments patauds, la musique de Kosma inégale. Mais surtout, le film paraît aujourd’hui trop calibré, avec des scènes convenues et une dramatisation artificielle. Il n’est que de comparer avec la force de Goupi Mains-Rouges, autrement plus fort et plus subtil dans la description d’un monde paysan dur et rugueux. Si Calef caractérise avec talent les personnages, il peine à les faire vivre sur la durée et s’empêtre dans une succession de rebondissements poussifs.
Bagarres a un intérêt historique évident : il représente parfaitement le cinéma d’après-guerre, cinéma littéraire (le film est l’adaptation d’un roman de Jean Proal), soigné, très « professionnel », mais qui commence déjà à se momifier : un peu trop guindé, un peu trop écrit. Sa rigidité se transforme en académisme et, on le voit bien ici, l’émotion peine à percer, tant on sent l’effort et la fabrication.
Les suppléments :
Deux spécialistes, Philippe Durant et Anne-Marie Vidal, interviennent en entretien croisé pour aborder divers aspects du film en 18 minutes très informatives.
L’image :
Débarrassée de toute impureté, la copie rend justice aux subtilités du noir et blanc. La présence d’un léger grain sur les scènes extérieures lui confère une belle authenticité.
Le son :
C’est le grand problème des films français des années 40 : la restitution des dialogues est à peine correcte et, dès que les acteurs crient, ou que la musique devient forte, la piste Dolby Digital 2.0 sature désagréablement.
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