Les temps modernes
Le 16 juin 2010
Décevant, Baaria est une fresque qui n’a de superbe que ses décors et ses acteurs et dont la dimension historique est occultée au profit d’une surenchère d’émotions.
- Réalisateur : Giuseppe Tornatore
- Acteurs : Raoul Bova, Francesco Scianna, Margareth Madé, Giorgio Faletti
- Genre : Drame, Historique
- Nationalité : Italien
- Date de sortie : 16 juin 2010
- Plus d'informations : Le site officiel
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– Durée : 2h40mn
Décevant, Baaria est une fresque qui n’a de superbe que ses décors et ses acteurs et dont la dimension historique est occultée au profit d’une surenchère d’émotions.
L’argument : Surnommée Baaria par ses habitants, cette petite ville de la province de Palerme est le théâtre d’une saga familiale qui s’étend sur trois générations.
Des années 30 aux années 80, de Cicco à son fils Peppino, et à son petit-fils Pietro, Baaria nous entraîne dans une odyssée peuplée de personnages habités par des passions et des utopies qui les imposent comme de véritables héros. À travers leurs amours, leurs rêves et leurs désillusions, cette fable drôle et nostalgique dresse le portrait d’une petite communauté sicilienne, microcosme où se joue une comédie humaine universelle.
Durant la période fasciste, sa condition de simple berger laisse à Cicco la liberté de s’adonner à ses passions : les livres, les poèmes épiques, les grands romans d’amour populaires. Son fils Peppino va être le témoin de la famine et des injustices perpétrées pendant la Seconde Guerre mondiale qui le pousseront à s’engager politiquement...
Notre avis : Baaria, « porte du vent » en arabe, est le nom de la ville dans laquelle le cinéaste a grandit (Bagheria, à l’origine). Mu par le désir de raconter l’histoire du lieu et de ses habitants, Giuseppe Tornatore, dont on se souvient du très beau Cinema Paradiso, Une pure formalité ou encore L’inconnue, s’est lancé dans la réalisation d’une fresque historique, retraçant le destin de trois générations au cours du vingtième siècle. Pour cela, le cinéaste s’est donné les moyens de ses ambitions, pour un rendu visuel impressionnant : plus de six mois de tournage, 35000 figurants, la reconstitution complète de la ville au Maroc et Ennio Morricone - avec qui il collabore depuis son premier long-métrage - pour la bande-originale.
- © Quinta Distribution
La volonté clairement affichée de Giuseppe Tornatore est de relater l’Histoire de l’Italie, à travers les petites histoires des héros de Baaria. Mais, à se concentrer sur les récits personnels, le cinéaste en oublie son sujet et la Seconde Guerre Mondiale se résume à un seul bombardement... Le long-métrage est parcouru par les espoirs, conflits et engagements communistes des héros de père en fils. Là encore, aucun développement n’est proposé pour expliciter expressément les motivations politiques de ces hommes. Par ailleurs, Baaria s’arrête aux Années de Plomb mais c’est tout juste si elles sont annoncées ; à peine suggérées par la mise en présence d’un homme recevant un pot de vin. La Mafia, qui jusque là était quasiment absente du film, prend le pouvoir, sans autre précision. Ce manque de rigueur historique perturbe la construction narrative du film car les héros semblent plus animés par leurs impulsions que par une cause réellement réfléchie.
- © Quinta Distribution
Si l’Histoire demeure évasive, les sentiments, eux, sont surexposés. Omniprésente, la musique vient en permanence souligner l’aspect dramatique des évènements. Ce procédé est appréciable lorsque l’enfant de Baaria rêve, apportant une touche lyrique au récit. Mais, récurrent, ce phénomène exaspère. Les images suffisent à elle-même et Giuseppe Tornatore en donne trop à voir. En effet, quelle nécessité y a-t-il à montrer un enfant se faire battre (plusieurs fois de surcroît) ou de filmer une tête explosée après un coup de feu, quand le reste de la séquence est parfaitement explicite sans ces images ? Cette tentation voyeuriste installe la sensation du « plan en trop » dans nombre de scènes, par ailleurs émouvantes, grâce à des héros attachants.
- © Quinta Distribution
A trop vouloir en montrer et émouvoir à tout prix, Giuseppe Tornatore est complètement passé à côté de la dimension historique de son sujet. Il ne fait aucun doute du talent du cinéaste, la photographie d’Enrico Luccidi est par ailleurs superbe et les décors sont grandioses. De même le couple phare du récit est convaincant. Pourtant, au final, on ressort déçu, avec l’agaçante sensation d’avoir assisté à un spot promotionnel de l’office du tourisme de Baaria plutôt qu’à une oeuvre homogène retraçant avec finesse l’Histoire de l’Italie.
- © Quinta Distribution
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