Arnaud fait son 2e film - la critique du film

Frais, drôle, et émouvant, une petite perle de cinéma.

L’argument : À 45 ans, Arnaud voudrait réaliser - enfin - son deuxième film. Il voudrait aussi avoir un enfant avec Chloé, la femme de sa vie. Mais tout semble bloqué. Alors, il se sépare de Chloé et reprend son travail de professeur au cours Florent. Là, il rencontre Gabrielle...

Notre avis : Près de onze ans après Clara et moi, Arnaud Viard (révélé au grand public en 2008 grâce à la mini-série de TF1 Que du bonheur) revient au cinéma avec une nouvelle œuvre qui dresse le portrait d’un comédien talentueux et réservé, avide de gloire et de reconnaissance. À travers un récit juste et touchant, c’est finalement l’existence de nombreux artistes qui nous est racontée.

© ARP Sélection

Dans son ouvrage Seigneurs et nouvelles créatures, Jim Morrison écrit : « Le cinéma est le plus totalitaire des arts » : en effet, dans ce monde fascinant et angoissant, c’est à celui qui parviendra à rester le plus longtemps en haut de l’affiche sans se laisser rabaisser par la concurrence. De plus, il est difficile de se faire une place parmi les grands quand on n’est pas issu du milieu, et Arnaud, le héros du film, ne fait pas exception à la règle. Ce quadragénaire insouciant, fils de la bourgeoisie provinciale et professeur dans un prestigieux cours d’art dramatique, se démène comme il peut pour boucler ses fins de mois et rembourser ses dettes. Mais ce qu’il souhaite par-dessus tout, c’est réaliser son deuxième long-métrage. On se trouve là dans un méta-film culotté, révélateur des rouages d’une industrie obtuse et bornée, bien loin de la machine à rêve à laquelle on pourrait songer. Arnaud, qui a mis un point final à son scénario, entame un véritable parcours du combattant, dans lequel le spectateur se laisse emporter avec délice. Chaque séquence est totalement décomplexée, et n’hésite pas à se moquer ouvertement du PAF et du cinéma français. En témoignent les scènes d’improvisation hilarantes des étudiants du Cours Florent.

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En outre, Viard conduit une véritable psychanalyse de l’acteur – ou plutôt de l’actrice – à travers le personnage de Gabrielle, son élève, qui ne souhaite qu’une seule chose : être connue. Feignant de tomber sous le charme de son professeur, elle accepte de jouer le premier rôle féminin de son film après que celui-ci eut enfin trouvé un producteur. Cependant, sous ses airs de belle jeune femme sensible et affectueuse, se cachent la corruption et l’appât du gain, les plus sombres vices du show business… et de l’homme. Alors, quand toutes ces affaires le dépassent, Arnaud saute dans le premier TGV et regagne sa province natale. Mais la famille n’offre pas toujours le meilleur des réconforts. Et voilà que nous assistons à un tout nouveau métrage, court cette fois-ci : "Arnaud et ses sœurs", comédie dramatique où le protagoniste doit partager l’héritage familial avec trois névrosées. Même dans les moments difficiles, le film sait détendre l’atmosphère, tout en continuant de rendre un hommage sincère et grinçant au cinéma. Ce qui n’est pas pour nous déplaire.
Par-delà tout l’humour et la légèreté dont il fait preuve, Arnaud Viard appelle ouvertement à une remise en cause des codes et conventions de l’industrie cinématographique – notamment de la production – qui a bien du mal à dépasser les normes qu’elle a elle-même créées, et préfère continuer de faire du chiffre avec des navets "bankables", plutôt que de permettre à des films originaux de voir le jour. Il suffit, pour s’en convaincre, de se rappeler ce que disait Woody Allen à propos du système hollywoodien : « Hollywood, c’est une usine où on fabrique dix-sept films sur une idée qui ne vaut même pas un court-métrage ».