Le 23 juin 2017
Que les fans de la série Hannibal se réjouissent, American Gods en est une transposition stylistique dans le road movie mythologique.


- Acteurs : Ian McShane, Emily Browning
- Genre : Fantastique
- Nationalité : Américain
- Date de sortie : 30 avril 2017

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Résumé : Un homme sortant de prison rencontre un vieil escroc qui l’embauche comme garde du corps, et l’entraîne dans un long périple à travers les Etats-Unis. L’ex-détenu découvrira alors que son "patron" est un ancien dieu nordique en plein combat contre les divinités modernes : Internet, les voitures, la télévision, et tous les nouveaux médias.
Notre avis : Malgré l’annulation de Hannibal au terme de sa troisième saison, son showrunner, Bryan Fuller, réitère pour American Gods l’exacte singularité artistique responsable des très faibles audiences du show sur le cannibale. Sa persévérance est plus que louable, d’autant lorsque, comme nous, vous avez adhéré à l’ovni Hannibal, mais surtout l’étonnement vient du relativement discret dans le monde de la production, Starz. Non contente de produire une œuvre que probablement personne ne voulait produire de par son orientation formelle, la chaîne télé injecte en plus tout le budget nécessaire à l’élaboration des différents délires de ses showrunners (Il ne faut pas oublier Michael Green). Car American Gods est incontestablement une série qui coûte cher, très cher. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que cet argent fut dépensé à bon escient tant tous les effets spéciaux, décors et costumes contribuent par leur qualité à la constitution de cet univers bien particulier. Pour mettre en place les quelques dieux présentés dans cette saison 1, la série vogue entre les époques et les civilisations, multiplie les paysages grandioses et les CGI d’excellente facture pour exprimer les exubérances d’un show tellement couillu que ses expérimentations et coup de folies finissent par se fondre dans la masse d’une œuvre plus surprenante si elle se "normalisait" (ce qu’elle ne fait pas). Cette identité, aussi singulière et parfaitement exécutée soit-elle, engendre cependant une overdose peut-être encore plus rapide que celle de Hannibal. Avec ses segments de 53 minutes en moyenne, American Gods fatigue assez vite, au pont qu’elle dégoûte le spectateur de s’enchaîner plus d’un épisode par semaine. Clairement pas dérangés par son manque de rythme flagrant, Fuller et Green paraissent plus préoccupés par enchaîner les idées visuelles trop souvent injustifiées que par la progression de leur intrigue.
- Copyright : Starz
Avec son allure plus ronflante qu’un espagnol pendant sa sieste post-déjeuner du dimanche,American Gods comble le vide par le style. S’il le fait plutôt bien sur les premiers épisodes, la curiosité et l’étonnement du spectateur l’avantageant significativement, le show ne parvient rapidement plus assez à retenir l’attention par son inventivité, simplement parce que pas grand-chose n’avance au cours de ses 10 premiers épisodes. La narration se dilate indéfiniment et on se dit las définitivement de cette démonstration visuelle pour une telle vacuité scénaristique. Pour preuve, il faut attendre le final pour qu’enfin le Voyageur dévoile son identité, connue depuis déjà plusieurs épisodes (voire même avant) par le public. Surtout, et c’est ce qui agace le plus, American Gods tourne bien trop autour du pot, en complexifiant ce qui n’a pas matière à être complexifié. Les showrunners se permettent même une digression sous forme de conte de 55 longues minutes dont la seule utilité est de nous éclairer sur l’origine de la relation entre Laura et le leprechaun. On pourrait penser que cet étirement de la narration s’opère par amour des personnages, mais au vu de leur caractère assez creux pour certains, dont l’ancêtre de Laura, la série infirme cette hypothèse. Ce qui l’intéresse avant tout, c’est de densifier sa forme, pas ses protagonistes.
- Copyright : Starz
Ainsi, l’entièreté de la saison 1 se focalise sur un unique élément d’évolution pour Shadow Moon (ça sonne bien mieux que Ombre Moon avouez-le), celui de croire, d’avoir la foi alors qu’il ne l’avait pas. Ainsi, en faisant de cet ex-taulard une incarnation du déboussolement du spectateur, la série entend également transmettre sa croyance à ce dernier pour l’incroyable en banalisant les actes divins et cette ambiance surréaliste au possible. Bien que très intéressante, cette seule caractéristique ne peut remplir à elle-seule l’identité d’un personnage pas forcément attachant, car mis en scène avec bien trop de froideur et de maniérisme. Heureusement incarnés correctement, les différents protagonistes disposent en revanche de dialogues et de situations cocasses, surtout entre Laura et le leprechaun, rendant leur road trip plus dynamique et attrayant par l’insolence de l’un comme de l’autre. Quant au Voyageur, Ian McShane oblige, son charisme apporte une dimension très classieuse à une réalisation, qui, malgré tous ses défauts, n’en manquent pas non plus. Pour cette raison, American Gods, malgré sa première saison en demi-teinte, détient entre ses mains de bonnes cartes pour assurer une seconde partie plus passionnante, moins introductive et plus rentre-dedans dans son sujet, tout en gardant son empreinte sensorielle si chère à Brian Fuller et Michael Green.
- Copyright : Starz