Le 4 février 2024
A Man est une œuvre hybride qui, derrière l’enquête d’un avocat, dresse le portrait d’un Japon assommé par ses contradictions.
- Réalisateur : Kei Ishikawa
- Acteurs : Akira Emoto, Yōko Maki, Sakura Andō, Satoshi Tsumabuki, Masataka Kubota, Nana Seino
- Genre : Drame, Romance, Policier
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Art House Films
- Durée : 2h01mn
- Titre original : Aru otoko
- Date de sortie : 31 janvier 2024
- Festival : Festival de Venise 2022
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Résumé : Rie découvre que son mari disparu n’est pas celui qu’il prétendait être. Elle engage un avocat pour connaître la véritable identité de celui qu’elle aimait.
Critique : D’abord c’est un tableau où un homme peint de dos regarde dans un miroir qui répète à l’infini cette forme d’humanité. L’essentiel est dit dès les premières secondes dans un récit qui fonctionne par cercles jusqu’à la fin où les contraires s’assemblent. Il y a dans A Man autant de mystère que de poésie et de cruauté. Le film est une ode à un Japon très urbanisé qui se cherche une identité à travers des personnages complexes, fascinants, en quête d’eux-mêmes. Le long-métrage n’est surtout pas un simple thriller. Il offre une pluralité de voies qui hésitent entre le drame, le réalisme sociologique et la fiction familiale. Rien n’est vraiment stable, le scénario brouille les pistes, en dépit de la figure de l’avocat, chargé de résoudre des problématiques d’héritage et d’assurances-vie, droite et sereine, qui faillit peu à peu au vertige du brouillage identitaire.
- Copyright 2022 A Man Film Partners
A Man est un récit à la fois linéaire et très riche. La question des identités constitue le fil conducteur principal de cette fiction où les personnages se cherchent une issue à des passés difficiles et des futurs incertains. La question de l’identité n’est pas seulement personnelle, elle emprunte le ressort complexe du racisme au Japon contre les migrants coréens. En ce sens, A Man pose des interrogations universelles sur la place que nos sociétés modernes laissent à l’altérité. Le film décrit les aléas de la définition de soi, a fortiori dans un groupe social où les individualités peinent à s’affirmer au bénéfice du poids des normes et du collectif. Derrière une mise en scène relativement lisse, quasi romantique, se cache une critique sociale sévère contre un pays développé incapable de faire droit aux différences. Les modèles familiaux oscillent entre l’apparente quiétude d’un foyer bourgeois, le désarroi d’une mère séparée et poursuivie par la mort, et la destruction complète de la relation père-fils par le crime. Plus que jamais, à travers ces modèles composites, Kei Ishikawa raconte le poids du déterminisme qui hante les existences.
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A Man se détourne des ficelles du cinéma japonais qui parfois se complaît dans une petite musique très esthétisante. Le propos est brut, sans concession, en dépit de personnages dans l’effacement d’eux-mêmes, et qui révèlent peu à peu leur vérité aux spectateurs. La fuite des identités apparaît comme le seul levier possible dans une société capitaliste qui nie l’individu dans ce qui le fonde. Ici, on existe moins pour soi qu’à travers le regard de l’autre, les attentes de l’autre, au point de se mentir et de se draper dans une existence qui n’est pas la sienne. Le récit décline toutes les émotions possibles, qu’il s’agisse de la poésie de l’amour, la tristesse du deuil ou la cruauté des relations familiales. La ville est très présente avec ses tours immenses, comme un contrepoint à ces milliers d’anonymes qui défilent dans les rues ou habitent les appartements qui se comptent par centaines.
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Kei Ishikawa réinvente le cinéma japonais. Il offre une œuvre dense, très écrite, éminemment contemporaine dont le spectateur ressort avec le sentiment d’avoir participé au vertige identitaire des personnages.
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