Le 15 mai 2022
Dans un style oppressant d’un bout à l’autre du film, Jan P. Matuszynski rappelle sans le crier les vertus de nos régimes démocratiques. Une œuvre électrisante.
- Réalisateur : Jan P. Matuszynski
- Acteurs : Robert Wieckiewicz, Agnieszka Grochowska, Tomasz Ziętek , Sandra Korzeniak, Jacek Braciak
- Genre : Drame historique, Thriller politique
- Nationalité : Français, Polonais, Tchèque
- Distributeur : Memento Distribution
- Durée : 2h39mn
- Date télé : 6 mars 2023 23:38
- Chaîne : Canal+
- Titre original : Żeby nie było sladów
- Date de sortie : 4 mai 2022
- Festival : Festival de Venise 2021
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Résumé : Varsovie 1983. Le fils d’une militante proche de Solidarność est battu à mort par la police. Mensonges, menaces : le régime totalitaire du général Jaruzelski va tenter par tous les moyens d’empêcher la tenue d’un procès équitable.
Critique : Se faire agresser par des agents de la force publique dans un régime démocratique n’est pas en soi simple à faire reconnaître par les autorités judiciaires. Mais que dire d’un tabassage au sein d’un commissariat de police, qui se finit par une mort sous un régime dictatorial, austère et sans empathie aucune ? C’est tout l’enjeu de ce film qui retrace sur le mode du thriller historique, la tentation d’une mère opposante au régime polonais de faire condamner la milice polonaise. Elle s’appuie sur le témoignage d’un ami de son fils qui a assisté en direct au massacre du garçon. Mais dès lors que la justice s’empare du problème, les pressions se font de plus en plus lourdes dans l’entourage du jeune homme et de la mère.
- Copyright Łukasz Bąk
Varsovie 83, une affaire d’État est une œuvre prenante d’un bout à l’autre. Pendant presque trois heures qui semblent très fluides, on se demande comment le protagoniste peut résister à autant de manipulations, de pressions et mensonges. Les autorités cherchent par tous les moyens à faire annuler le procès, discréditer les témoins et éventuellement faire reposer la culpabilité sur d’autres personnes que les agents de police. Le rythme est soutenu et le spectateur accroché au destin du garçon sans jamais baisser la tête. Le temps semble presque arrêté et on entre dans ce récit puissant sans parvenir à en sortir. Même après la fin, on continue d’être hanté par les manières terrifiantes que la dictature communiste emploie pour faire taire le peuple et imposer son autorité. On se sent à la place des personnages, étouffé par la peur et les méthodes d’enquêtes judiciaires pour le moins critiquables. Si l’on éprouve une confiance limitée dans l’autorité judiciaire, il ne faut surtout pas regarder cette histoire qui pourrait conforter certains dans des pensées négatives.
- Copyright Łukasz Bąk
Heureusement, quelques beaux personnages apportent un peu de lumière à ce récit dense et cruel. On pense à cet avocat courageux qui continue de défendre des opposants, au risque de sa propre sécurité. Il y a aussi le procureur général qui tente de faire parler la loi avant tout et résiste, comme il peut, à la pression de l’État. Varsovie 83, une affaire d’État transporte le spectateur dans un univers gris, resserré, stressant, où le régime communiste fait taire toutes les formes d’opposition. Une scène sidérante fait apparaître le général Jaruzelski : l’homme se tait, semble l’ombre de lui-même, est monstrueux même dans le silence. En fait, la réussite du film vient du réalisme des décors et de la photographie. On est précipité trente ans plus tôt, et on s’identifie aux personnages, aux espaces sur l’écran comme si on appartenait à la même époque.
- Copyright Łukasz Bąk
Varsovie 83, une affaire d’État constitue un film nécessaire, particulièrement en cette période électorale. Si l’on a parfois tendance à accuser nos gouvernements ou nos institutions de comportements autoritaristes, le long-métrage donne à voir la mécanique monstrueuse d’un régime non démocratique. Plus qu’un témoignage historique, cette œuvre est une matière à penser.
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