Le 2 septembre 2020
Ce trip sud-américain n’est pas exempt de maladresses, mais séduit par son ambiance oppressante et la sincérité de ses jeunes interprètes.
- Réalisateur : Étienne Faure
- Acteurs : Émile Berling, Paul Bartel, Ernst Umhauer, Alain-Fabien Delon, Pierre Prieur
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Américain, Français
- Durée : 1h30mn
- Date de sortie : 7 octobre 2020
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Résumé : Amérique du Sud. Dans une forêt tropicale totalement isolée, un groupe de cinq garçons entreprend une longue marche à la rencontre d’un mystérieux guérisseur. Suite à une blessure, ils se retrouvent bloqués sur le bord d’une rivière à fort courant. De l’autre côté de la rivière, ils aperçoivent un campement assez étrange qui semble occupé par trois filles. Il est absolument impossible de traverser et de communiquer...
Critique : Un monde ailleurs est le cinquième long métrage du réalisateur, scénariste et producteur Etienne Faure, connu notamment pour son documentaire À la recherche de Tadzio (1988, sur l’acteur Björn Andrésen), le drame Des illusions (2009, avec Aurélien Wiik), le thriller Désordres (2013, avec Isaach de Bankolé) et la romance gay Bizarre (2015), interprétée par Pierre Prieur, que l’on retrouve à l’affiche du présent opus, avec quatre autre jeunes comédiens. Tourné intégralement en Amérique du Sud, Un monde ailleurs ne joue aucunement la carte de l’exotisme, préférant miser sur une atmosphère poisseuse et le mystère, combinant dialogues explicatifs et zones d’ombre du scénario (la motivation réelle de la bande d’amis n’est connue qu’au dénouement), réalisme documentaire et échappées semi-oniriques, récit chronologique et brutales ellipses. Les cinq potes en vadrouille ne sont ni en voyage de loisir, ni en quête d’un nouveau mode de vie, ni en mission humanitaire, ni en expédition contrainte. Un pacte les lie, ainsi qu’une certaine complicité depuis l’enfance, malgré des tensions liées à des personnalités très différentes et aux affres du dépaysement.
- © 2020 Eivissa Productions. Tous droits réservés.
Sont sur une même galère Tom, qui perd la vue et semble désespéré ; John, geignard et boulet du groupe ; Pierre, grande gueule et leader ; Charlie, perturbateur de par son comportement déviant ; et William, décalé, cérébral et sensoriel, qui fait l’amour avec des arbres et semble le maillon ésotérique de la bande. Avec cette caractérisation de chacun des personnages, le métrage rejoint la démarche de fameux films de groupe, d’Ils étaient neuf célibataires de Sacha Guitry à Huit femmes de François Ozon, en passant par Les sept mercenaires de John Sturges ou Les douze salopards de Robert Aldrich. Mais la typologie des caractères de ces « cinq garçons » paraît ici caricaturale, et accentuée par la banalité, la fadeur ou la trivialité de certains dialogues se voulant djeuns (l’expression « putain ! » balancée à longueur de narration). Le film d’Étienne Faure peut aussi convoquer la référence au danger inhérent à une nature sauvage et méconnue, qui a fait la singularité de Délivrance de John Boorman ou The Lost City of Z de James Gray, l’angoisse semi-horrifique dans une zone naturelle faisant également écho au Projet Blair Witch de Daniel Myrik et Eduardo Sánchez ou Ni le ciel ni la terre de Clément Cogitore.
- © 2020 Eivissa Productions. Tous droits réservés.
Là encore, la comparaison n’est pas toujours à l’avantage d’Un monde ailleurs qui peine à imposer un univers véritablement personnel. Quant au sujet de société que souhaite aborder le réalisateur, il n’apparaît que comme une pirouette narrative finale, arrivant comme un cheveu sur la soupe, et qui n’est pas véritablement traité. « Le point de départ, c’est un fait divers assez horrible survenu aux Philippines il y a quelques années », précise le réalisateur dans les notes d’intention. L’auteur a-t-il souhaité avoir une caution sociétale pour justifier les égarements des personnages ? On aurait préféré que le film maintienne jusqu’au bout le cadre ambigu et irréel dans lequel les protagonistes évoluaient. Pourtant, Un monde ailleurs vaut le détour par plusieurs séquences particulièrement réussies (la disparition du chien, la vue sur le campement occupé par trois filles, la relation équivoque entre Tom et Pierre), qui dénotent un réel sens de la tension narrative. Et les jeunes acteurs témoignent d’une authentique sincérité de jeu, ne se contentant pas de jouer les gravures de mode. Outre Pierre Prieur, l’œuvre confirme le talent de Paul Bartel (Les petits princes), Emile Berling (Un conte de Noël), Alain-Fabien Delon (Les rencontres d’après minuit) et Ernst Umhauer (Dans la maison).
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