Une chanson qui nous ressemble
Le 14 novembre 2012
Sans peur de la prise de risques et du décalage, le comédien Rachid Djaïdani signe un premier long-métrage audacieux, qui emporte son spectateur grâce à l’énergie du récit et des personnages.
- Réalisateur : Rachid Djaïdani
- Acteurs : Slimane Dazi, Sabrina Hamida, Stéphane Soo Mongo
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Durée : 1h15mn
- Date de sortie : 14 novembre 2012
- Plus d'informations : Le site du distributeur
- Festival : Festival de Cannes 2012
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Sans peur de la prise de risques et du décalage, le comédien Rachid Djaïdani signe un premier long-métrage audacieux, qui emporte son spectateur grâce à l’énergie du récit et des personnages.
L’argument : Paris, aujourd’hui. Dorcy, jeune noir chrétien veut épouser Sabrina, une jeune maghrébine. Cela serait si simple si Sabrina n’avait pas quarante frères et que ce mariage plein d’insouciance ne venait cristalliser un tabou encore bien ancré dans les mentalités de ces deux communautés : pas de mariage entre Noirs et Arabes. Slimane le grand frère, gardien des traditions, va s’opposer par tous les moyens à cette union...
Notre avis : Attention, ceci n’est rien qu’un conte ! Situé dans un Paris contemporain et cosmopolite, Rengaine prend le réel par la voie du merveilleux : Sabrina et Dorcy s’aiment d’un amour tendre, ils sont heureux, et ils pourraient se marier et avoir beaucoup d’enfants, si n’étaient les quarante frères de Sabrina, les gardiens de la tradition qui refusent qu’une Maghrébine se marie avec un Noir (et un chrétien par-dessus le marché !). A trop résumer le film, on risque cependant d’en manquer l’essentiel : le premier long-métrage du comédien Rachid Djaïdani est tout sauf un « film de société » au sens classique du terme, qui remettrait sur le tapis, sans prendre beaucoup de risques, la question de l’étanchéité entre les communautés dans la France d’aujourd’hui. Rengaine prend son sujet au sérieux, mais en le décalant, en le prenant par les côtés les plus absurdes aussi bien que les plus sombres : ce qui ressort du récit, c’est avant tout son caractère de chronique, cette traversée d’une famille très « élargie » et fantaisiste où les personnalités et les valeurs morales ne cessent de s’entrechoquer – la galerie de personnages très incarnés donnant à la fois son ton et son énergie au film. Les frères sont chauffeur de taxi, chômeur, flic, barde moderne, et sont loin d’entretenir avec leur religion et les traditions familiales le rapport monolithique qu’on voudrait bien admettre. Slimane, le « meneur » de ces quarante frères qui part en croisade contre le mariage mixte de sa sœur, est lui-même un écorché de la vie, mis devant ses propres contradictions par sa fiancée juive, et ne traîne à travers Paris sa dégaine de Gainsbarre que parce qu’il se considère comme le héraut d’une mission susceptible de donner enfin un sens à son existence.
Caméra à l’épaule qui se rapproche à l’extrême des personnages, montage très cut, durée lapidaire, Rengaine se donne un aspect formel de film « de bric et de broc », s’accordant peu de moyens pour rester à hauteur de l’énergie des personnages – c’est un poncif pourtant ici vérifié que d’affirmer que la carrière d’acteur du réalisateur lui donne un sens du jeu et du rythme empreints de justesse. Si le scénario joue parfois à l’excès « au plus malin », les situations et les dialogues – indéniablement « vivants » et rythmés – dosent assez bien le comique absurde et l’émotion réelle (notamment dans un final étonnamment sobre) qui se dégagent du récit. En décalage par rapport au naturalisme dominant du cinéma français, Rengaine déroute par son réalisme enchanté, aux prises avec les questionnements d’aujourd’hui, et qui n’a pas pour vocation de bouleverser le spectateur, mais plutôt de le bousculer un peu. Peu d’acteurs parviennent à transformer l’essai du passage à la réalisation avec une « patte » qui s’affirme d’emblée sur le fond et la forme ; pour Rachid Djaïdani, la tentative est réussie, et l’on attend avec intérêt une suite à cette rengaine de bon ton.
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