Le 10 septembre 2014
Un documentaire attachant sur le quotidien français le plus prestigieux. Même si l’on reste un peu sur sa faim.
- Réalisateur : Yves Jeuland
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Distributeur : Rezo Films
- Editeur vidéo : DVD Vidéo
- Durée : 1h22mn
- Date de sortie : 10 septembre 2014
- Festival : Festival de Cannes 2014
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Résumé : Alors que la presse doit faire face aux grands bouleversements que représentent l’arrivée des blogs, tweets et autres révolutions du web, ce film propose une plongée au cœur du travail des journalistes du service politique du Monde, lors de la campagne électorale de 2012.
Notre avis : On suit divers journalistes et grands reporters dont Ariane Chemin et Caroline Monnot, spécialistes des questions politiques, Thomas Wieder, le fringant trentenaire adepte du tweet, l’éditorialiste Erik Israelewicz (décédé après le tournage), Florence Aubenas, Raphaëlle Bacquet, ou bien encore Arnaud Leparmentier, formé à HEC, qui se définit lui-même comme le libéral de droite du quotidien, mais qui pourtant fit partie de ceux qui argumentèrent pour soutenir ouvertement François Hollande en 2012... Car le film se situe au moment de la dernière campagne électorale présidentielle. On y voit certains débats houleux dont l’ardeur est toujours tempérée par l’autodérision, les fous rires et l’enthousiasme. Ce fut notamment le cas le jour où la Une renvoyait dos à dos les populismes de Mélenchon et Marine Le Pen, où lorsqu’une première page mettait l’accent sur la consommation de cannabis en France, dans une logique éditoriale que d’aucuns comparaient à celle du Parisien... Car tels sont le dilemme et le paradoxe du Monde. Quotidien prestigieux, le plus lu par les intellectuels, décideurs et hommes politiques, il n’échappe pas à l’érosion des ventes de la presse et se doit de vendre le plus possible, tout en s’adaptant à la révolution du net, des blogs et des tweets.
- Copyright Folamour
Le film émeut alors lorsqu’il recueille le témoignage de journalistes en proie aux doutes, et remettant au quotidien leurs certitudes, tout en étant fidèles à leurs valeurs. On appréciera aussi certains passages plus anecdotiques, des déplacements pour couvrir un meeting au stress permanent dès que l’AFP annonce le décès d’une personnalité dont la nécro n’avait pas été anticipée. Les Gens du Monde trouve dans ces séquences et digressions faussement mineures la force des documentaires d’un Raymond Depardon. On reste malgré tout sur sa faim, et l’on aurait aimer voir davantage les journalistes des rubriques culturelles, ou entendre le témoignage de Plantu, ce dernier étant certes déjà au cœur de Caricaturistes - Fantassins de la démocratie. On aurait apprécié aussi une vision plus critique d’un quotidien un peu trop glorifié à notre sens. Les propos recueillis n’en restent pas moins passionnants.
Test DVD/Bluray
Les éditions DVD Vidéo proposent de visionner le film avec des séquences inédites (45 mn) et des entretiens avec les protagonistes (45 mn). Ces derniers sont découpés en sept segments. « Un monde à part » relate la culture d’entreprise du Monde, qui malgré son intériorisation des nouvelles technologies et le rajeunissement de ses effectifs reste associé à des rapports policés et des traditions issues de la vieille France. « D’accord pas d’accord » évoque la ligne politique du journal, souvent qualifiée de neutre mais qui regroupe en fait un pluralisme de courant, de l’extrême gauche à la droite, même si certaines prises de positions ont été évidentes : c’est ainsi qu’Arnaud Leparmentier rappelle que le « populisme hystérique » d’un Nicolas Sarkozy flirtant avec l’extrême droite en 2012 a conduit le journal à appeler à voter François Hollande. « Le papier et la toile » met en exergue l’avenir du support papier, de plus en plus réservé à une élite, mais qui reste associé aux articles les plus prestigieux, lemonde.fr hiérarchisant moins l’information mais permettant une audience plus vaste. « Quand le monde gazouille » se réfère aux tweets, que la plupart des rédacteurs utilisent pour diffuser leurs articles mais surtout sélectionner les autres, l’équilibre étant à trouver entre la superficialité de l’instantané et la satisfaction qu’apporte la confrontation des opinions présentée en ligne de façon synthétique. « C’est off ! » nous informe de l’ambiguïté des confidences officieuses des politiques, souvent formulées pour qu’elles soient justement divulguées. Dans « L’origine du monde », les journalistes admettent l’existence de leur reproduction sociale, la plupart d’entre eux étant issus de Sciences Po, L’École Normale Supérieure ou l’École Supérieure de Journalisme de Lille. « Les actionnaires » révèle que depuis le contrôle du Monde par Pierre Bergé et ses associés, la ligne éditoriale et les méthodes du quotidien n’ont guère changé, et que l’on ne saurait parler de pression politique, à l’instar de l’influence de Dassault sur Le Figaro. Au final, ce bonus rapporte des propos qui ne relèvent en rien du scoop mais confirment la vision d’un journal rigoureux et intègre, qui ne néglige pour autant ni l’air du temps ni les contraintes commerciales.
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