Chouquette - la critique du film

Notre avis : On pardonne assez aisément la maladresse d’un premier film, mais dans le cas de Patrick Godeau, la situation est toute autre puisque le monsieur est, depuis plus de 25 ans, l’un des producteurs les plus influents du cinéma français. Sa première tentative d’adaptation d’un roman s’est achevée, il y a deux ans, par un film (injustement) conspué, La Dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil, mais aujourd’hui Godeau a décidé d’aller plus loin et de passer derrière la caméra. Le résultat : le road trip à la tonalité douce-amère, incapable de rendre ses personnages attachants, se révèle d’une terrible vacuité émotionnelle.

Copyright Wild Bunch Distribution

Le renvoi à La Dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil est justement intéressant dans ce sens qu’il s’agissait là aussi d’un portrait de femme névrosée et que, déjà, le rapport à la mer était au cœur de son développement. Deux thématiques qui semblent donc chères à Godeau. Ici, il s’agit, non pas d’une mais de trois femmes : Chouquette, une femme acariâtre et mélancolique puisqu’enfermée dans ses rêves passés ; Diane, une hyperactive borderline ; et Jacqueline, la mère de cette dernière. Les deux premières sont respectivement interprétées par Sabine Azéma et Michèle Laroque. Or, si la première est en sous-régime (un jeu qui peut se justifier par la nature de son personnage), la seconde, comme à son habitude, en fait trop au point de rapidement devenir fatigante. Autant dire que le duo ne fonctionne pas une seconde.
On prendra en fait davantage de plaisir à s’attacher au sort de Jacqueline, interprétée par l’excellente Michèle Moretti, et surtout au bagout du jeune Lucas, au risque de se détourner du processus de réconciliation entre Chouquette et Diane qui se voudrait être la finalité de leur rencontre. Après tout, toutes ces relations dysfonctionnelles, dont on peut même dire qu’elles n’aboutissent à rien de concret, ne sont qu’un prétexte à une virée en voiture, tournée entre les Côtes d’Armor et les monts d’Arrée en passant par la baie de Morlaix. Une balade en Bretagne qui s’évertue à nous livrer de magnifiques paysages de la côte armoricaine. Tout le film est là, dans la multiplication de ses images de cartes postales.

Copyright Wild Bunch Distribution

Il n’y a en fin de compte rien à chercher du côté du récit en lui-même, sinon quelques dialogues légers, et moins encore dans la mise en scène dont l’unique réussite est d’avoir placé des caméos vocaux de Mathieu Amalric et d’Antoine de Caunes. Les fans des deux actrices principales apprécieront peut-être et les inconditionnelles de la péninsule bretonne devraient y trouver leur compte. Ce qu’il faut vraiment espérer c’est que Patrick Godeau en tire la leçon qu’on ne s’improvise pas réalisateur sur un coup de tête.