Africa paradis - la critique

Une mise en situation originale, une réalisation sans prétention mais suffisamment efficace pour se laisser aller à un peu plus de tolérance.

L’argument : Olivier et Pauline n’en peuvent plus de vivre dans une France en plein déclin. L’avenir, pensent-ils, se trouvent aux Etats-Unis d’Afrique. Alors commence pour eux le parcours de l’immigré.

Notre avis : Les victimes ne sont plus celles que l’on croit. Elles ont pris la place de ceux qu’elles assommaient de leurs préjugés. Pris dans une situation, qui relève encore en partie de l’utopie, Sylvestre Amoussou tente de montrer dans Africa paradis l’image qu’il souhaiterait que l’on ait de son continent. L’opposé de celle que les média occidentaux propagent à l’envi. Pour donner corps à son propos, il s’invente ses Etats- Unis d’Afrique, métaphore d’un continent qui jouit enfin de ses richesses dont est il est, depuis des siècles, spoliée. La terre d’Afrique est devenue un paradis où des Européens désespérés viennent s’offrir une seconde chance. A condition que les sbires de l’immigration les y autorisent ou pis, qu’ils soient prêts à prendre tous les risques.
Tous les qualificatifs dont sont habituellement affublés les Noirs sont ici réservés aux Blancs. L’immigré, démontre Africa paradis, quelle que soit sa couleur, est toujours un monde inconnu pour l’autre. Sans verser dans la revanche (mais un chouïa quand même), le réalisateur béninois filme des Africains qui ne se départissent pas de ces valeurs qui font aussi leur carte de visite : la générosité et l’hospitalité.
Avec des petits moyens trouvés difficilement, Sylvestre Amoussou a fait d’Africa paradis un long métrage qui tient la route. La problématique est clairement énoncée et illustrée par une réalisation qui n’a pas le loisir de s’éloigner de ses fondamentaux. Des acteurs dans des postures relativement crédibles et, surtout, un scénario inattendu font de cette fiction une œuvre (utile). En provoquant, dans l’humour, l’empathie, elle invite tous les préjugés dont les Noirs, plus particulièrement les Africains, sont victimes à quitter les esprits étriqués qu’ils hantent. En cette période électorale où l’immigration semble être responsable de tous les maux des Français, Africa Paradis est un vaccin pro tolérance. A ses compatriotes, le cinéaste béninois tente d’inoculer le virus de la confiance en soi et la capacité à se prendre en main. Le vrai mérite d’Africa paradis est de proposer une œuvre africaine sur l’Afrique qui innove tant d’un point de vue cinématographique que social. Le film de Sylvestre Amoussou est pour toutes ces raisons une démarche digne d’encouragement. D’autant que c’est avec plaisir (coupable pour d’aucuns comme pour Bienvenue en Afrique !) que l’on suit la mésaventure de ces immigrés d’un autre temps.