Le 29 novembre 2022
Utama : La Terre oubliée ne raconte pas seulement la tragédie du réchauffement de la planète et de l’avancée des déserts. Il décrit avec brio les conflits intergénérationnels et interculturels au cœur d’une Bolivie au bord de l’asphyxie.
- Réalisateur : Alejandro Loayza Grisi
- Acteurs : José Calcina, Luisa Quispe, Santos Choque
- Genre : Drame
- Nationalité : Uruguayen, Bolivien
- Distributeur : Condor Distribution
- Editeur vidéo : Condor Entertainement Vidéo
- Durée : 1h28mn
- Titre original : Utama
- Date de sortie : 11 mai 2022
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– Sortie DVD et Blu-ray : 26 octobre 2022
Résumé : Dans l’immensité des hauts plateaux boliviens, Virginio et Sisa veillent sur leur troupeau de lamas. Jusqu’ici, rien n’a pu les détourner de cette vie âpre, héritée des traditions : ni leur âge avancé, ni le départ des habitants de la région, chassés par la sécheresse. Aussi accueillent-ils avec méfiance la visite de Clever, leur petit-fils de dix-neuf ans, venu les convaincre de s’installer en ville avec le reste de la famille. Réticent à l’idée de quitter sa terre, Virginio se montre inflexible. À tel point que le jour où il tombe gravement malade, il décide de le cacher à Sisa et Clever…
Critique : On a rarement l’occasion de découvrir des films boliviens. Utama : La Terre oubliée est une expérience inédite au cœur des étendues désertiques de ce pays d’Amérique du Sud. Un couple âgé vit là, malgré la sécheresse qui appauvrit les terres, au milieu de ses lamas. Il se contente de patates et de haricots pour seul déjeuner, sauf lorsqu’une de leur bête succombe à la soif ou la maladie. Autour d’eux, les habitants abandonnent. Ils fuient vers la ville, à la recherche d’un accès à de l’eau et un confort moins rudimentaire. Avec leur départ certes, c’est toute la tradition rurale qui s’épuise peu à peu ; mais pour eux, c’est une question de survie. Puis, arrive le petit-fils, Clever. Le garçon est venu avec un message à transmettre à ses grands-parents. Deux mondes s’opposent : celui du jeune homme équipé de son smartphone et de ses écouteurs, et celui de ce couple vieillissant qui doit marcher de plus en plus loin chaque jour pour trouver de l’eau.
- Copyright Condor Films
Alejandro Loayza Grisi réalise un premier film d’une très grande maîtrise. Le cinéaste est photographe avant tout. Cela est d’autant plus lisible que les images de la Bolivie sont somptueuses. Le long-métrage s’attache à montrer des paysages désertiques d’une incroyable splendeur. On suit la transformation des contrées désertiques dès le matin jusqu’au soir, avec cette terre sombre qui étouffe de manque d’eau. Le cri des lamas se mêle au râle maladif de Virginio qui, chaque matin, emmène ses bêtes toujours plus loin vers les pâturages arides. Pendant près d’une heure et demi, le spectateur a le souffle coupé, à l’instar du héros, devant la beauté des étendues désertiques et l’existence pénible que subit le couple âgé. Un condor s’invite soudain au milieu du récit qui se transforme en un poème spirituel.
- Copyright Condor Films
Le long-métrage est porté par trois formidables comédiens : José Calcina, Luisa Quispe et Santos Choque. Les deux acteurs âgés permettent de donner vie à un couple agraire, isolé, qui tente de survivre à leurs traditions ancestrales. Le troisième interprète le petit-fils, tout aussi aimant que révolté par la difficulté de vie de ses aînés. Toute la magie du film s’incarne dans ces trois personnages attachants et complexes, au milieu de paysages magnifiques. La conduite d’acteurs est précise. Elle s’accommode avec aisance aux lumières qui suivent le soleil et au rythme lent de cette forme d’existence.
- Copyright Condor Films
Mais ne s’y trompons pas, Utama : La Terre oubliée n’a rien du film de carte postale ou du mélodrame familial. C’est une œuvre profonde et vivante qui décline la complexité du vivre-ensemble, au sein d’une planète qui s’abîme avec le réchauffement et fait craindre à terme des exils massifs des populations du monde. Le long-métrage interroge la disparition des traditions ancestrales, bouleversées par les mouvements migratoires et les conflits intergénérationnels. Il n’est pas inutile de nous rappeler que l’informatique, le téléphone portable, Internet ne sont pas accessibles à nombre d’êtres humaines sur Terre, qui continuent de survivre de leur travail d’agriculteur, dans une économie circulaire et un souci pour les choses simples absolument admirables.
Laurent Cambon
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Test Blu-ray
Image
Les hautes plaines de la Bolivie sont sublimées par un travail sur la lumière époustouflant, qui rappelle les grandes heures du western, mais aussi les plus beaux documentaires sur la nature. Loin d’être un hasard, quand on sait que Alejandro Loayza Grisi réalise là son premier film, précisément après avoir travaillé sur des documentaires comme la série Planeta Bolivia. Autre élément d’importance, Grisi fut d’abord chez opérateur et photographe, ce qui est indéniablement une qualité au moment de filmer la cordillère des Andes. Il collabore pour ce film avec Barbara Alvarez, chef opératrice, qui saisit avec talent les tons chauds qu’arbore Utama. Le tout, sur Blu-ray est admirablement bien rendu.
Son
Les notes lyriques de Cergio Prudencio se mêlent avec délicatesse au images des plaines boliviennes, pour un résultat impeccable sur le plan sonore.
Suppléments
L’édition vidéo possède une plus-value non négligeable en matière de suppléments, sans qu’ils soient indispensables.
Le bonus majeur est l’interview du réalisateur, lequel est passionnant en dévoilant quelques secrets et en clamant son amour pour son pays. Les thèmes abordés sont vastes, et l’intéressé suffisamment précis pour faire de l’entretien un complément de choix au visionnage.
Le making-of, lui, demeure plus illustratif qu’explicatif, mais a le bon goût de nous offrir quelques moments de vie qui rendent l’équipe du film attachante.
Le troisième supplément rappelle avec force que Grisi, avant d’être metteur en scène, est photographe, et une galerie de ses plus beaux clichés vous est présentée. L’affaire vaut le coup d’œil, et il est impossible de ne pas esquisser un sourire d’admiration, voire de sidération devant certaines photos.
Plus anecdotique mais sympathique : Condor propose un petit voyage à travers les projets d’affiches non retenues, dont certains auraient tenu la comparaison sans rougir avec les grands vainqueurs que sont l’affiche française et internationale.
Thomas Bonicel
- Copyright Condor Films
Galerie Photos
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