Le 17 juin 2017
Nouveau bijou esthétique pour la télévision, The Handmaid’s Tale allie à son matériau de base une identité visuelle remarquable qui vient en décupler sa puissance.
- Acteurs : Joseph Fiennes , Max Minghella, Elisabeth Moss, Yvonne Strahovski
- Genre : Drame, Science-fiction
- Nationalité : Américain
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Résumé : Dans un futur proche, un groupe d’illuminés fondamentalistes a instauré une dictature théocratique basée sur l’ancien testament : La république de Gilead. Dans cette « république », la pollution a rendu une grande partie des femmes stériles. Pour lutter contre la faible natalité, celles-ci ont été séparées en trois castes : les Épouses, qui dominent la maison, les Marthas les femmes à tout faire et enfin les Servantes écarlates, non-stériles, uniquement dédiées à la reproduction. Toutes les autres, les inaptes, sont tuées ou déportées dans les colonies pour trier des déchets toxiques. Nous suivrons le destin d’Offred, (littéralement, la servante de son Maitre : Fred) à travers cet univers dangereux et terriblement humain.
Notre avis : The Handmaid’s Tale s’inscrit dans une lignée de show récents ayant fait montre de l’importance de la télévision dans l’ouverture et la liberté artistique de l’art filmique. Ses dernières années se sont distinguées des œuvres comme The Knick, Hannibal, Legion et maintenant cette adaptation de La Servante Écarlate, qui, bien que son postulat de départ et certains de ses éléments comme la prédominance de la religion pourrait rappeler Les Fils de l’Homme, trouve indéniablement sa place dans cette branche de projets esthétiques et ambitieux de ces dernières années télévisuelles. The Handmaid’s Tale trouve une osmose on ne peut plus pertinente entre son fond et sa forme, où le second vient transcender le premier par des expérimentations fortes car bénéfique à l’établissement d’une atmosphère dérangeante. Multipliant les effets de styles esthétisant basé sur le surcadrage, le décadrage, la symétrie ou encore la longueur des plans, le joyau de Hulu donne vie à la contradiction effrayante de son univers opposant dans un même cadre spatio-temporel un fonctionnement sociétal archaïque à des fragments (et pas les meilleurs) de notre civilisation actuelle (les armes et les voitures notamment). Difficile exercice car souvent un peu vain, les flash-backs appuient ici ce constant sentiment de malaise par l’effondrement progressif du fonctionnement des États-Unis au profit d’un État totalitaire fondé sur la peur d’extinction de l’humanité à cause d’une stérilité généralisée.
- Copyright : Hulu
Pour The Handmaid’s Tale, qui dit peur panique et sentiment de ne pouvoir remédier aux problèmes dit alors détournement de la religion (en l’occurrence le christianisme) pour contrôler la population. Face à l’incompréhension de la situation la Bible et le respect d’une interprétation très littérale de cette dernière sont prônées comme solution. Une hiérarchisation se met en place, les rituels morbides parcourent la vie de June, une Servante, dictés par le joug d’une religion responsable de la réduction de la femme à une simple fonction. Pour autant, The Handmaid’s Tale n’accule jamais le christianisme en tant que tel mais plutôt les personnes qui s’en empare. Ambiguïté parmi tant d’autres dans cette série, la religion occupe aussi bien l’objet de condamnation de ces personnages que celui de leur espoir, le personnage principal priant pour s’extraire de cette situation. Comme toutes les branches extrémistes dont la série s’inspire pour créer la sienne, une hypocrisie derrière cette volonté assoie le caractère détestable des acteurs importants de cette nouvelle société (le Commandant en première ligne), dépeint avec sévérité, surtout lorsqu’il s’agit de traiter les personnages masculins. Au détour de l’épisode 8 le doute s’efface face à la fallacieuse façade biblique mis en place par de hauts placés plus intéressés par leur plaisir personnel et leurs privilèges que par un désir de repopulation. Ce caractère corrompu et déviant s’insèrent logiquement dans une série d’autant plus glaçante que, si elle extrapole certaines dérives actuelles, partage de nombreux points communs avec quelques aspects de notre société.
- Copyright : Hulu
Prenant son temps pour développer et crédibiliser son univers et ses thématiques, The Handmaid’s Tale privilégie l’installation de son cadre spatio-temporel quitte à ralentir une révolution déjà souterraine dès les premiers épisodes, mais qui n’évoluera jamais au delà au terme de cette saison. La série oriente sa rébellion sur les petits gestes contestataires pour en donner toute leur puissance, mis en scène avec brio tant il s’y dégage la plus grande force protestataire, notamment le grand acte final, si fort qu’il balaye cette déception de ne pas avoir pu goûter à cette rébellion tant évoquée, mais jamais vraiment montrée. Ce final, l’un des meilleurs épisodes de cette année toute série confondue, affirme le bien-fondé des choix rythmiques et narratifs, par l’implication émotionnelle totale du spectateur, tantôt soulagé, tantôt angoissé, tantôt ému, toujours captivé, par ces personnages féminins attachants à la solidarité comme atout majeur. Ne sombrant presque jamais dans cette tendance populaire et opportuniste du pseudo-féminisme à la mode (l’exception vient d’un dialogue où Moira déblatère le discours le plus crétin sur l’émancipation de la femme, si bien qu’on doute sérieusement de son caractère premier degré), The Handmaid’s Tale, et c’est assez rare pour le souligner, parvient à dégager de ces moments iconiques un véritable « girl power ». Même plus, c’est avec une envie de lâcher un bon « fuck yeah ! » que l’on assiste à l’iconisation de June et des autres Servantes de son district, qui on l’espère, devraient accélérer la mise en place de la révolte. En attendant, « nolite te bastardes carborundorum, bitches ».
- Copyright : Hulu
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